mercredi 29 janvier 2020

"La mort de Shigeru Mizuki" Tsuge Yoshiharu


 La mort de Monsieur Shigeru Mizuki est un événement choquant. De plus, c'était si soudain et je n’arrive pas à exprimer mes sentiments.
 Fin des années 1960, j’ai été son assistant pendant quatre ou cinq ans, la période où Monsieur Mizuki était le plus occupé. À l’époque, le magazine qui prépubliait ses œuvres m’a demandé de l’aider. C’est ainsi que j’ai commencé à travailler pour lui quatre ou cinq fois par mois. Je gagnais ma vie de ma plume et de ce travail d’assistant. Monsieur Mizuki était taciturne et je ne me souviens pas d’avoir discuté de choses personnelles. Mais lorsque j’ai vu qu’il y avait de nombreux livres philosophiques dans ses étagères, j’ai été fort étonné. À la télé, il se comportait comme un homme étrange. Ce n’est pas ce qu’il l’était en réalité, et je me suis demandé s’il avait des conflits intérieurs et des soucis profonds. J’imagine qu’il cherchait les réponses de ses questions dans ces livres philosophiques.
 Sa maison se trouvait dans la même ville que moi, à Chôfu. Séparés par un rail, Monsieur Mizuki vivait dans le sud, et moi, dans le nord. Son chez soi était à 15 minutes à pied, mais j’avais du mal à franchir cette distance. C’était comme si le rail nous séparait.
 Je l’ai vu pour la dernière fois il y a quatre ou cinq ans. Je l’ai rencontré dans un marché au puce qui se tenait dans un sanctuaire près de chez lui. « J’imagines que tu t’ennuies », m’a-t-il dit à ce moment-là. « En effet, je m’ennuie », lui ai-je dit. « Je le savais », m’a dit Monsieur Mizuki. Notre dialogue s’est terminé, mais j’ai compris vaguement qu’il voulait dire. Il est devenu un grand maître de manga très populaire, mais sans doute il pensait que sa vie était inintéressante. Je suppose qu’il se posait toujours des questions philosophiques sans être convaincue de sa vie longue.

le journal Yomiuri du premier décembre 2015

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