lundi 8 juin 2020

Le vice de l'homme

Ces derniers temps, je me suis complètement désintéressé du français. J’abandonnais la lecture et l’écriture ; la poussière accumulée sur des livres d’André Gide que je n’ai pas encore lus représente ma perte de passion pour l’apprentissage des langues. Mais lorsque j’y repense, j’étais apathique depuis le début ; je ne voulais rien faire. Cependant, j’essaie de continuer à faire des exercices de français, comme je le fais actuellement, pour ne pas être réduit à une bête qui ne parle pas de langage humain.
Depuis sa naissance, l’humanité n’a jamais cessé d’accumuler les péchés. D’innombrables fois, l’être humain s’est entretué, a détruit la nature pour la remplacer par de laids bâtiments en béton, a causé la disparition d’un bon nombre d’espèces animales, a mis du cornichon dans un hamburger, et a inventé Facebook. Malgré ces actes impardonnables, l’être humain continue de nourrir la fleur du mal. Mais par exemple, quel est le symbole qui représente le mieux le vice de l’humanité ? La bombe nucléaire qui permet d’anéantir une ville entière en quelques secondes ? Un policier blanc qui étrangle un Noir avec sa jambe ? Les documents officiels qu’un homme politique a détruits pour dissimuler un détournement du fond ? Non, c’est la lettre de motivation. Par nature, la lettre de motivation est un tissu d’hypocrisie et de mensonge ayant pour but de tromper l’homme. D’ailleurs, personne n’a la motivation de rédiger une lettre de motivation. Si on doit en écrire une, c’est parce qu’on est obligé de le faire. Je dirais donc que la lettre de motivation, faite pour sélectionner les candidats est complètement inutile. S’il y a un employeur qui pense qu’elle permet de savoir si un candidat a vraiment une motivation, il a un cœur innocent et pur comme un agneau qui vient de naître. Je veux l’embrasser et le chérir.
Il faut réfléchir à un moyen de sélection de candidats plus efficace et surtout, plus sincère. Je propose le moyen suivant ; aligner des candidats, et ils devront se battre contre des recruteurs. Si les premiers gagnent, ils sont embauchés. Les recruteurs vaincus devront quitter l’entreprise. Sinon, pourquoi ne pas aligner les candidats, et un recruteur jette une balle sur celui qu’il veut prendre/recruter en criant : « Pikachuu ! Je t’ai choisi ! » ? Je pense que ce sont de belles personnes qui recevront une balle sur la tête, mais je trouve que c’est plus franc.
Par ailleurs, alors que le travail que je voudrais faire consisterait à allonger le cou d’une girafe, le corps d’un chat, ou à rester couché sur mon lit toute la journée à grignoter du gâteau, je ne trouve que des offres d’emploi inintéressantes qui affichent souvent des mots incompréhensibles comme « digital » ou « marketing ».

samedi 11 avril 2020

Les 12 coups de midi

Lorsque je suis chez moi à midi, je regarde les 12 coups de midi. Il s’agit d’une émission de quiz animée par un homme jovial qui a une tache rose sur le visage. Tous les jours, il y a de nouveaux participants qui sont tous des amateurs parmi lesquels meilleur participant appelé « maître » reste sur le plateau jusqu’à ce qu’il perde. En ce moment, le maître est un homme d’un certain âge aux cheveux blancs. Il s’appelle Éric. Éric est très fort et il ne se trompe presque jamais. Tous les jours, il y a de nouveaux participants qui sont tous des amateurs et dont le meilleur, appelé « maître », reste sur le plateau jusqu’à ce qu’il perde. Comme je ne suis pas très cultivé et que je manque de références culturelles, je ne connais souvent pas les réponses.
Chaque fois qu’Éric donne une bonne réponse, je me dis « Ce salaud ». Je l’appelle donc salaud secrètement. Il y a quelques semaines, un Alsacien d’un certain âge au gros ventre un peu comme Obélix participait à l’émission. Il parlait avec un fort accent alsacien. Une jeune femme lui a dit qu’elle ne comprenait pas trop ce qu’il disait. Moi non plus. Le Monsieur a défié le maître, Éric. Comme moi aussi j’habite en Alsace, j’espérais qu’il gagnerait. Mais Éric a donné une bonne réponse. L’Alsacien a perdu. « Ce salaud », me suis-je dit.
Toutefois je ne déteste pas Éric. Au contraire, je l’admire. En plus, il a l’air gentil. Du moins, il n’a pas l’air d’un pédophile. Cependant, comme il est si cultivé qu’on dirait une encyclopédie humaine, je me demande si ce n'est pas robot, en réalité. Il faut faire attention. Peut-être qu’il se recharge quelque part

Le confinement


J’étais un enfant introverti qui aimait lire des livres, dessiner des mangas plagiat de Tezuka, créer des voitures en carton et monter des maquettes plastiques de Gundam. Je n’aimais pas jouer dehors avec d’autres enfants. D’ailleurs, j’étais nul en sport. Si je jouais au tennis de table, je ne touchais pas la balle. (Il est donc tout à fait faux de croire que tous les Asiatiques sont forts au ping-pong).Inutile de préciser que je ne sais pas faire du kung-fu, Le sport que je détestais le plus est celui que tous les Japonais adorent ; le base-ball. Je détestais le base-ball parce que premièrement, un match de base-ball dure longtemps, et que deuxièmement, la balle du base-ball est si dure qu'il est dangereux de la recevoir au visage. D’ailleurs, pourquoi les gens pensent qu’il est possible de frapper une si petite balle avec une batte si fine ? Je détestais aussi le kendo, une sorte d’escrime japonaise, qui est obligatoire au collège. En somme, le kendo n’était pas si dangereux car on mettait une armure, mais je le détestais car le professeur nous obligeait de crier « Meeeeeeen ! » quand on frappait sur la tête de l’adversaire. 



Mais les adultes voulaient que je sorte dehors et que je chasse au ballon avec d’autres enfants. Dans le monde de l’adulte, il existe une loi non écrite selon laquelle l’enfant idéal et sain joue dehors dans la nature et que l’enfant casanier deviendra hikikomori dans l’avenir, ou dans le pire des cas, meurtrier en série ou pédophile ou schizophrène (vous choisissez ce que vous voulez).


Des années se sont écoulés depuis mon enfance, et je suis devenu adulte. Cependant, mon caractère n’a guère changé. Je ne dessine plus de manga plagiat de Tezuka, mais je dessine de temps à autres soit sur le papier soit sur l’ordinateur. J’aime sculpter et monter des maquettes plastiques de Gundam. J’aime toujours lire surtout en français. Regarder un match de base-ball ne me dérange pas, mais je déteste y jouer.
En ce moment, le coronavirus dévaste le monde entier, et les Français et les ressortissants résidant dans la France métropolitaine sont interdits de sortir. Enfin, le moment est venu. Le moment que j’ai attendu plus de vingt ans. Ce n’est évidemment pas l’épidémie qui s’empare cruellement de la vie des personnes innocentes, mais le moment où je peux dire avec fierté : « Je ne sors pas » et que je puisse critiquer ouvertement ceux qui sortent dehors sous prétexte que c’est mauvais pour la santé.

dimanche 16 février 2020

"La Glace aux myrtilles" Haruki Murakami

« Je veux manger de la glace aux myrtilles », a déclaré cette fille à deux heures du matin. 
Pourquoi les filles ont-elles des idées ridicules à des heures ridicules ? Sans raison particulière, en songeant au destin qu’ont suivi Tchang Kaï-chek et le gouvernement nationaliste, j’ai enfilé une chemise ; je suis sorti dans la rue et j’ai attrapé un taxi.
« À n’importe quel magasin qui vend de la glace aux myrtilles », ai-je dit au chauffeur. Puis, j’ai fermé les yeux et bâillé.
Environ quinze minutes plus tard, le taxi s’est arrêté devant un immeuble inconnu d’une ville inconnue. L’entrée était disproportionnée. Sur le toit flottaient sept drapeaux que je n’avais jamais vus. 
« On peut vraiment acheter de la glace ici ? ai-je demandé au chauffeur.
- C’est pour ça qu’on est venus » 
C’était une réponse impeccable qui respectait la tradition de la dramaturgie. J’ai payé et je suis descendu du taxi. Puis, je suis entré dans l’immeuble.
À la réception, une jeune femme d’environ vingt ans était assise. Alors qu’elle ne bougeait pas d’un pouce, son visage semblait vouloir dire : « Je suis trop occupée et je n’en peux plus ».
« Une glace aux myrtilles, s’il vous plaît », ai-je dit.
Elle a affiché expression dégoûtée comme pour dire que le moment était inopportun. Ensuite, elle m’a tendu un bout de papier d’une belle couleur pastel.
« Écrivez ici vos noms et adresse, et rendez-vous à la porte numéro 3 ».
Je lui ai emprunté un crayon pour écrire mon nom et mon adresse. Puis, j’ai monté l’escalier qui me faisait penser à un cercueil, et j’ai poussé la porte numéro 3. Au milieu de la pièce, il y avait une table de la taille d'une table de de ping-pong sur laquelle était assis un jeune homme. Il tenait des documents qu’il regardait tour à tour.
« Une glace aux myrtilles », ai-je dit en lui tendant le bout de papier. Sans me regarder, il l’a tamponné.
« Porte numéro 6 », a-t-il dit.
Je devais franchir une rivière profonde pour atteindre la porte numéro 6. Des projecteurs illuminaient la rivière d’une lumière blanche. De temps à autre, des coups de feu retentissaient.
Entre la porte numéro 6 et la porte numéro 8, il y avait un hôpital de campagne installé dans une vieille église. De nombreux soldats amputés des jambes ou des bras étaient couchés sur le gazon de la cour. Dans la cantine de l’hôpital, de la glace rhum-raisin remplissait trois bidons, mais il n’y avait pas de glace aux myrtilles.
« Myrtilles, c’est à la porte numéro 14 », m’a dit un cuisinier.
La porte numéro 14 avait été complètement détruite par des bombardements nocturnes. Il n’en restait que le chambranle. Une note était épinglée : « Si vous voulez quelque chose, allez à la porte numéro 17. »
Devant la porte numéro 17, une grande armée de chameaux se révoltait. L’obscurité de la nuit était remplie des cris aigus des bêtes et de l’odeur de leur pisse. En fin de compte, j’ai réussi à trouver un chameau sympathique qui m’a ouvert la porte numéro 17.
La porte numéro 17 était la dernière.
Lorsque je l’ai ouverte, deux hommes d'un certain âge, luxueusement vêtus se colletaient avec un fourmilier géant. Ils saignaient de partout. Ils étaient tous venus ici pour de la glace aux myrtilles.
Maudite glace aux myrtilles.
Mais je ne suis pas un type sentimental. Je les ai tués les uns après les autres avec une mandoline comme dans la « Tragédie de Y ». J’ai ouvert le réfrigérateur et j’ai pris une glace aux myrtilles.
« Je vous mets combien de neige carbonique ? m’a demandé la vendeuse.
- Pour trente minutes », ai-je dit avec sang-froid.
Il était cinq heures du matin quand je suis rentré chez moi. La fille était déjà profondément endormie. 

mercredi 29 janvier 2020

"La mort de Shigeru Mizuki" Tsuge Yoshiharu


 La mort de Monsieur Shigeru Mizuki est un événement choquant. De plus, c'était si soudain et je n’arrive pas à exprimer mes sentiments.
 Fin des années 1960, j’ai été son assistant pendant quatre ou cinq ans, la période où Monsieur Mizuki était le plus occupé. À l’époque, le magazine qui prépubliait ses œuvres m’a demandé de l’aider. C’est ainsi que j’ai commencé à travailler pour lui quatre ou cinq fois par mois. Je gagnais ma vie de ma plume et de ce travail d’assistant. Monsieur Mizuki était taciturne et je ne me souviens pas d’avoir discuté de choses personnelles. Mais lorsque j’ai vu qu’il y avait de nombreux livres philosophiques dans ses étagères, j’ai été fort étonné. À la télé, il se comportait comme un homme étrange. Ce n’est pas ce qu’il l’était en réalité, et je me suis demandé s’il avait des conflits intérieurs et des soucis profonds. J’imagine qu’il cherchait les réponses de ses questions dans ces livres philosophiques.
 Sa maison se trouvait dans la même ville que moi, à Chôfu. Séparés par un rail, Monsieur Mizuki vivait dans le sud, et moi, dans le nord. Son chez soi était à 15 minutes à pied, mais j’avais du mal à franchir cette distance. C’était comme si le rail nous séparait.
 Je l’ai vu pour la dernière fois il y a quatre ou cinq ans. Je l’ai rencontré dans un marché au puce qui se tenait dans un sanctuaire près de chez lui. « J’imagines que tu t’ennuies », m’a-t-il dit à ce moment-là. « En effet, je m’ennuie », lui ai-je dit. « Je le savais », m’a dit Monsieur Mizuki. Notre dialogue s’est terminé, mais j’ai compris vaguement qu’il voulait dire. Il est devenu un grand maître de manga très populaire, mais sans doute il pensait que sa vie était inintéressante. Je suppose qu’il se posait toujours des questions philosophiques sans être convaincue de sa vie longue.

le journal Yomiuri du premier décembre 2015

jeudi 23 janvier 2020

éplucheur

Je n’écoute pas de rap. Mais de temps en temps, j’imaginerais un rap pour exprimer ma reconnaissance envers l’inventeur de l’éplucheur. 
Je connaissais l’existence de l’éplucheur depuis longtemps. Toutefois, je persistais à utiliser un couteau. Lorsque j’épluchais une pomme, une carotte, une pomme de terre, j’utilisais toujours un couteau. Je pensais que ceux qui utilisent un éplucheur sont des tricheurs. Un jour, lorsque j’ai fait mes courses au supermarché, un éplucheur à un euro a attiré mon attention. Je l’ai mis dans mon panier sans réfléchir. Ce soir-là, j’ai utilisé pour la première fois un éplucheur. J’ai épluché une pomme de terre. J’ai caressé légèrement sa surface. Une pellicule de la peau de la pomme de terre, si fine qu’on aurait dit une plume d’ange est tombée. J’étais ému. Avec un éplucheur, il est plus facile d’éplucher qu’avec un couteau. Je me suis demandé ce qu’avait été ma vie jusqu’ici. C’était nul. Maintenant j’ai rencontré un éplucheur et ma vie a totalement changé.
Je ne connais pas l’inventeur de l’éplucheur. J’ignore sa nationalité. J’ignore s’il est encore vivant ou pas. J’ignore si c’est un homme ou une femme, mais je suis plein de reconnaissance envers cette personne.
C’est pourquoi j’aimerais exprimer ce sentiment sous forme de rap.

L’inventeur de l’éplucheur
Tu es un sacré tricheur
Yo Yo
J’aime ce truc magnifique
Car l’éplucheur, c’est pratique

mardi 21 janvier 2020

One Piece

 Parfois, je me demande comment je me sentirais si j’avais les mêmes pouvoirs qu’un personnage de fiction. Par exemple, dans le manga « One Piece », ie héros est un garçon qui a mangé « le fruit du caoutchouc ». À cause de ce fruit mystérieux, son corps a les mêmes propriétés que le caoutchouc. C’est-à-dire qu’il peut allonger son corps. Dans le manga, il profite de cette particularité pour battre des méchants.
 En réalité, cette capacité d’être comme du caoutchouc a l’air assez utile. Par exemple, lorsque je me couche le soir. Sur le lit, je lis un livre. Quelques instants plus tard, j’ai sommeil et j’aimerais éteindre la lumière. Mais la lumière et loin. En même temps, je ne veux pas me lever. Coincé dans cette situation, seul le temps passe. Mais si j’avais les pouvoirs du héros de « One Piece », je n’aurais pas ce problème. J’allongerais mon bras pour éteindre la lumière.
On peut utiliser ces pouvoirs lorsqu’on regarde la télé. On suppose que le soir je me détend et regarde vaguement « Quotidien ». À un moment, j’ai envie de regarder Arte, mais la télécommande est loin. En même temps, je n’ai pas envie de me lever, donc je continue de regarder « Quotidien » alors que je n’en ai pas envie. Dans cette situation, si j’avais les pouvoirs du héros de « One Piece », je pourrais prendre la télécommande sans me lever pour regarder tranquillement Arte.
 Comme je l’ai déjà évoqué ci-dessus, dans le manga, le héros de « One Piece » profite de ces pouvoirs pour battre les ennemis. Cela me semble utile quand j’ai envie de battre quelqu’un que je n'aime pas. Par exemple, supposons qu'il y ait un professeur sévère qui ne donne jamais plus que 10. Je dis « Je ne pardonnerai pas celui qui fait pleurer mes "compagnons"!!!»(le héros de One Piece dit souvent ce genre de propos). Toutefois, il est en réalité quasiment impossible d’employer ces pouvoirs pour ce but puisque la loi interdit et pénalise les agressions physiques. Donc « One Piece » est un manga où le héros résout des problèmes par la violence.
 Toutefois, ces pouvoirs ont aussi des inconvénients. Le caoutchouc s’étire en effet, mais à force de l’utiliser, sa qualité se dégrade et finalement il se coupe. Peut-être que dans « One Piece », un jour, les bras du héros se couperont soudainement au moment où il essaiera de battre un ennemi.