lundi 30 avril 2018

Le rétrospectif


 C’est le dernier jour des vacances de printemps. Elles n’ont duré qu’une semaine. Ça m’a semblé à la fois long et court. Pendant ces courtes vacances, je suis tombé malade, j’ai regardé plusieurs films, j’ai traduit une nouvelle entière, j’ai écrit une histoire (mais je ne l’ai pas finie). En dehors de cela, j’ai joué avec des chats et ma peluche. J’ai aussi commencé à lire « Les Démons » de Dostoïevski comme j’avais écrit, mais j’en suis encore à la moitié (c’est un long roman qui compte à peu près huit cents pages).

 Je tiens un journal depuis que je suis arrivé en France. L’objectif de mon journal était d’améliorer mon niveau de français et d’enregistrer mes journées en France. Je n’avais pas l’habitude de tenir un journal au Japon, car la vie dans ce pays n’avait rien d’intéressant pour moi. Mais au début, je ne publiais mon journal nulle part et j’étais son seul lecteur. De plus, j’écrivais uniquement quand j’en avais envie. Je ne savais pas comment enchaîner les phrases. J’ai donc commencé par imiter le style de mes quelques écrivains français préférés. Mais heureusement je manquais trop de capacité linguistique et littéraire pour les imiter. Mon écriture maladroite ne ressemblait pas à la leur. Le seul point commun, c’était qu’il y avait des paragraphes et que chaque phrase était marquée par un point.

 Aujourd’hui, j’ai relu un peu mon journal, mais je n’ai pas l’impression d’avoir écrit.
 Par exemple, il est écrit que l’auteur du journal a dispersé des kit-kat dans le couloir en janvier 2017. Je cite :
« Dans le couloir, j'étais heureux d'avoir un paquet de Kit-Kat. J'aime le chocolat, j'aime les Kit-Kat. Contrairement à la guerre, le chocolat rend les gens heureux. Mais en même temps, je me doute qu'il y a des gens qui préfèrent la guerre aux chocolats. Je l'ai ouvert pour en ingurgiter mais à cause de l'élan, j'ai répandu le contenu sur le plancher. Mon bonheur s'est dissipé en un clin d’œil. Je suis redevenu très vite malheureux à cause de ces putains de Kit-Kat. J'ai dû les ramasser en subissant les regards hostiles des gens. J'ai me suis senti comme si j'étais une prostituée qui ramassait de l'argent que son client lui avait jeté sur le sol. Cependant une fille à lunettes s'est approchée de moi et elle m'a aidé à les ramasser. J'ai essayé de lui dire ''merci beaucoup'' mais comme j'avais du snickers visqueux dans ma bouche, je n'arrivais pas à prononcer correctement. J'ai maudit la viscosité du snickers (…) »
 Un autre jour, l’auteur semble avoir rencontré sa partenaire d’exposé.
« Après ce cours, j'ai fixé un rendez-vous avec ma partenaire de l'exposé. Elle est italienne. Mais on ne le devine pas facilement parce que lorsqu'elle parle français son accent est presque imperceptible. C'est impressionnant car tous les autres Italiens que j'ai rencontrés avaient un accent italien qui chantait, sautillait, boulait en français. L'Italienne est dix centimètres plus grande que moi. Elle est souriante et gaie. Je suis morose et dépressif. Elle doit avoir beaucoup d'amis, le weekend elle doit aller voir son copain. Je n'ai aucun ami, le weekend je ne veux voir personne. Sa gaieté m'a rendu encore plus dépressif. J'étais désolé pour elle que je sois son partenaire. J'étais aussi désolé de ne pas connaître un seul mot chinois. »
 À vrai dire, je me suis désinscrit de ce cours par la suite. Je n’ai donc plus revu cette fille italienne dix centimètres de plus grande que moi. Mais je me souviens encore que le fond de l’écran de son ordinateur était ‘’Les Amants’’ de René Magritte.

 Le 17 avril l’année dernière, il est écrit que j’ai trouvé un doigt dans la cour de l’université, mais évidemment il s’agit d’un « faux journal ». Honnêtement, je ne me souviens plus pourquoi j’ai écrit cette histoire. J'étais peut-être un peu fou. 
 « Dans la cour de l'université, j'ai trouvé un doigt. J'ai d'abord cru qu'il s'agissait d'un ver blanc. Il avait l'air souple et immobile. Je m'en suis approché et je me suis accroupi pour le contempler de près. Ce ver blanc était légèrement courbé. Il n'avait ni œil ni bouche. Je l'ai pris dans ma main et c'est à ce moment-là que je me suis rendu compte que ce n'en était pas un. Ce n'était pas un ver. C'était un doigt. (…) J'ai fait une affiche et j'en ai collé des copies partout dans l'université. Le texte de l'affiche était comme suit ; 
RECHERCHE PROPRIÉTAIRE D'UN DOIGT 
taille ; 7 centimètres 
poids ; 1,5 grammes 
couleur ; blanc 
lieu de la découverte ; le buisson »
 Cela m’étonne que l’auteur de ce journal ait pu réussir son année. Je trouve ce texte assez monotone et saccadé. Comment a-t-il réussi sa dissertation ? Mais je me sens toujours frustré de ne pas pouvoir écrire comme je le voudrais. Quelques années plus tard, lorsque je relirai l'article que je suis en train de rédiger, j’aurai peut-être la même impression qu'aujourd'hui. 

dimanche 29 avril 2018

Libertine


 Aujourd’hui, je n’ai pas arrêté de me lever et de me coucher. Je me suis levé et assis devant la table. J'ai écouté ''Libertine'' de Mylène Farmer. Le refrain de la chanson s'est collé dans ma tête comme une sangsue, et j'ai cru devenir fou. Désespéré, je suis retourné au lit. J’ai fermé les yeux un court moment, puis j’ai contemplé le plafond. J’avais l’impression d’être devenu Gregor Samsa de « la Métamorphose ». Quelle était la différence entre l'insecte qu'était Samsa et moi ? Après m’être laissé du plafond, je me suis relevé et rassis devant la table. « Je devrai peut-être réviser », me suis-je dit. Mais je n'ai pas révisé. J’ai dessiné Asuka d'Évangelion sur le revers d'un ticket de caisse. Ensuite, je suis retourné au lit et j’ai joué avec ma peluche. Dans la soirée, j'ai eu faim. Je me suis relevé et j’ai préparé un steak haché. Après avoir dîné, j’ai eu sommeil et je suis retourné au lit. Vers vingt-et-une heure, je me suis finalement mis à écrire la suite de ma nouvelle que je vais lire à haute voix à la prochaine réunion de chats.

samedi 28 avril 2018

Thermae Romae


 J’ai fait des courses aujourd’hui car il n’y avait rien dans le frigo. Plus exactement, il y avait de la moutarde et un poireau. Mais qui peut se remplir le ventre d’un poireau à la moutarde ?
 J’avais envie de manger quelque chose de rafraichissant. J’ai acheté les ingrédients pour le rouleau de printemps vietnamien. De retour chez moi, j’ai mouillé une galette de riz. Je l’ai mise sur un essuie-tout pour absorber le trop d’eau. Quelques instants plus tard, j’ai essayé de l'en détacher, mais elle était parfaitement collée dessus comme une tumeur maligne qui adhère obstinément à un organe. Mon premier essai de rouleau printemps vietnamien a ainsi échoué. J’ai sorti une autre galette de riz et je l’ai mouillée. Cette fois, je n’ai pas fait la bêtise de l’essuyer. Je l’ai laissée telle quelle sur une planche à découper. Ensuite, j’ai mis de la salade et des crevettes et j’ai roulé la galette. Maintenant ça ressemblait parfaitement à un rouleau de printemps vietnamien. Toutefois je ne savais pas quelle sauce utiliser. J’ai enfin choisi une sauce teriyaki, la première qui soit entrée dans mon champ de vision. Ça avait l’air bon. Je l’ai goûté. Aussitôt j’ai constaté que le goût de la sauce était trop fort et effaçait quasiment celui de la salade et des crevettes. Mais je n’ai eu aucune difficulté à l’avaler. Ce n’était rien par rapport à mes autres essais culinaires. Une fois, j’ai ajouté de la citrouille dans un bœuf bourguignon sans aucune raison. Ça avait le goût de terre. J'ai réalisé que j’avais automatiquement ouvert la bouche, et que je crachais.

 Je pense que je rentrerai au Japon en juillet et y resterais un mois. Quand on est un fan d’animé français, cette idée est séduisante, mais quand on est japonais, rentrer au Japon, ce n’est que déprimant. Parfois il y a des gens qui me demandent si le Japon ne me manque pas. Je réponds : C'est quoi le Japon ? Dans quelle partie d'Uranus se trouve le Japon ? Une fois, on m’a demandé si je ne voulais pas revoir mes amis japonais. J’ai quelques amis français, mais je n’ai aucun ami japonais. Tant mieux pour moi. Comme je ne m’intéresse pas tellement à la gastronomie, la cuisine japonaise ne me rend pas nostalgique. Résultat : j'ai pris plus de dix kilos depuis mon arrivée en France. De surcroît, j’ai toujours l’impression que la société japonaise est comme une armée. De nos jours, cette nation a l’air pacifiste, mais je maintiens qu’il ne faudrait pas longtemps pour qu’elle redevienne militariste. Le peuple japonais se laisse porter à droite ou à gauche, selon l'air du temps. Mais moi, je suis quelqu’un qui tourne à gauche quand on me demande de tourner à droite, et je tourne à droite quand on m’ordonne de tourner à gauche.

 Mais il y a seulement deux choses qui me manquent. D’abord, le Gunpla. Le Gunpla est l’abréviation de ‘’Gundam no plastic model’’, soit ‘’la maquette plastique de Gundam’’. Je suis maniaque des séries Gundam et ma collection de maquettes plastiques de Gundam est au Japon. Mais je n’en parle pas pour l’instant, car je sais que personne ne s’y intéresse en France.

 La deuxième chose, c’est le bain. Je n’ai pris que des douches depuis plus d’un an. En hiver, j’aimerais rester longtemps dans l’eau chaude. En été aussi, j’aimerais rester longtemps dans l’eau chaude. Il semble ce soit une envie que les Français ne comprennent pas, bien que leurs lointains ancêtres, les Romains adoraient les bains publics. Quand je suis arrivé en France, j’ai passé une nuit dans un hôtel à étoiles à Paris, mais il n’y avait qu’une salle de douche. Le lendemain, j’ai pris le TGV pour venir à Strasbourg, en rêvant de prendre un bain chaud. J’ai passé une nuit dans un hôtel, mais là encore, il n'y avait pas de baignoire. Je ne sais pas si c’est vrai, mais j’ai entendu parler que les Français ont honte d’être tout nus devant autrui et c'est pour ça qu’ils n’aiment pas trop le bain public. C’est étrange, parce que j’ai l’impression que les hommes français veulent tout de suite se déshabiller devant les femmes…

 Alors pourquoi rentrer cet été ? Parce que mes parents me le demandent. En effet, il faut discuter avec eux de mon orientation quand j’aurai obtenu mon diplôme. D'ailleurs, la seule chose que je projette de faire cet été, c’est d’écrire une longue histoire en français, et on peut le faire partout dans le monde si on a un ordinateur, ou sinon, un cahier et un stylo. Dernièrement, juste avant de venir en France, mon professeur français m’avait prêté un livre de Michel Houellebecq "La Carte et le territoire" (à cette époque-là, je m’intéressais beaucoup à Michel Houellebecq) pour que je puisse le lire dans l’avion. Il venait d’avoir une fille à ce moment-là. Je sens comme si c’était il y a déjà cinquante ans. J’aimerais lui rendre ce roman, s'il se souvient toujours de moi.

vendredi 27 avril 2018

Le frigo


 Aujourd’hui, j’ai dégivré mon frigo. Dès que je l’ai débranché, le frigo a arrêté de bourdonner. J’ai attendu pendant des heures pour que le givre soit plus ou moins fondu. Ensuite, j’ai brisé le bloc de glace avec un tournevis. Mais utiliser un tournevis ne semble pas le bon moyen de dégivrer un frigo. Un site Internet le déconseillait car on risque d’abîmer le moteur.
 J’ai mis les blocs de glace dans le lavabo. Pendant cette opération, j’ai découvert une momie de viande hachée antique dans le congélateur. Je ne sais pas depuis quand ce vestige du passé dormait à cet endroit. La viande était devenue grise alors qu’elle devait être rouge lorsque je l’ai achetée. J’étais content d’avoir trouvé mon dîner de ce soir. Mais non, je l’ai jetée mise à la poubelle. Ô ! Viande hachée surgelée de Charal. Que tu reposes en paix !

 « Elle aime ça », m’a dit une jeune femme qui était à l’accueil quand je jouais avec Mimi. La chatte était couchée sur le carrelage et ronronnait.
« Ça ? ai-je dit.
- La caresse », m’a-t-elle dit.
 J’ai pensé que c’était une bonne occasion pour lui poser des questions sur les chats. Je lui ai demandé quel âge avait Mimi. Après avoir murmuré « Je ne sais pas… » d’un air hésitant, elle m’a dit qu’elle devait avoir à peu près dix ans.
« Je croyais qu’elle était plus jeune, ai-je dit. Alors Patience ?
- Il est plus vieux. Environ treize ans.
- C’est un mâle, n’est-ce pas ?
- Oui, c’est un mâle.
- Il dort tout le temps ».
 Je regrette de ne pas lui avoir demandé pourquoi Mimi avait l’oreille déchirée et pourquoi le gros chat s'appelait Patience.

''La nuit du robot'' Shinsei-Kamattechan



Ah, j’ai peur.
J’ai peur des mots. J’ai peur du bleu. J’ai peur. J’ai peur du bleu. J’ai peur des gens. J’ai peur. J’ai peur.
S’il y a du bleu, le rêve est bleu. Tu es bleu dans la ville obscure.

Ah, j’ai peur.
La nuit s’écoule. La nuit s’écoule. Je suis comme un robot dans la nuit.
J’ai peur du bleu. J’ai peur du matin. J’ai peur de toi. J’ai peur.
J’ai peur des gens.
J’ai peur.

jeudi 26 avril 2018

''Apprends-moi par la recherche'' Tofubeats feat.Noko (Shinsei-Kamattechan)



De la fille voisine aux célébrités de la télé
On peut savoir tout ce que les autres pensent à cette époque
Les petites opinions ou les avis sur les livres
On dirait que tout le monde parle avec des connaissances empruntées
Même si tu connais seulement la bonne réponse
C’est pas bon
Mais pourquoi ?
Pourquoi dois-je faire un détour ?
C’est important de faire des efforts
Pour toi-même
Mais moi, je veux faire uniquement ce que je veux

Problèmes, réponses, mes soucis
Réponds à tout grâce à la recherche sur Internet
Je veux savoir tout de suite
Je veux avoir ces informations maintenant
Les problèmes internationaux, le diner de ce soir
Apprends-moi tout
Par la recherche sur Internet
Partout, les gens font des recherches dans le monde

De la fille voisine aux célébrités de la télé
Tout le monde peut laisser un moment chouette à cette époque
Hier et il y a vingt ans
C'est comme si on regardait tous les moments de la même façon
Tu fouilles inutilement dans les choses
C’est pas bon
Mais on a envie d’entrer le nom d’une personne que l’on aime
Finalement, il faut agir soi-même
Je suis tendu même si on peut facilement envoyer un message

Problèmes, réponses, mes soucis
Réponds à tout grâce à la recherche sur Internet
Je veux savoir tout de suite
Je veux avoir ces informations immédiatement
Les problèmes internationaux, le diner de ce soir
Apprends-moi tout par la recherche sur Internet
Partout, les gens font des recherches dans le monde
Alain, Peter
Devine la vérité avec votre seconde vue
Surfez sur Internet et ramassez des informations


''Front Memory'' Shinsei-Kamattechan



Je me demande si je fais des efforts aujourd’hui
C’est la suite d’hier
Je ne peux rien faire
C'est peut-être ennuyeux, même très ennuyeux
Je suis sur le point de m’effondrer sur le toit
Homme et femme parlent d’amour dans le train
Le dernier train que j’ai pris est dans
Le crépuscule que j’ai enregistré

J’ai tout à coup envie de manger une glace au beau milieu de l’été
Il fait super chaud dehors
Je sens cette peur parfois
Je pèse 42 kilos, mes sentiments tordus avec des emojis
Sont dans le crépuscule que j’ai enregistré

Je ne peux toujours pas avancer
Car l'été revient
Avec mes chaussures trop serrées
Je ne peux pas avoir le panier à trois points

Je ne suis pas motivé aujourd’hui.
Avec mon talisman,
Je feins de faire du Hip Hop et je vis à peine
J’ai refusé la conversation, je n’ai même pas envoyé de mail disant « D’accord »,
J’ai feint d'être absent, et j’ai marché tout seul
Ai-je appris ‘’I love you’’ pendant un cours d’anglais ?

Je ne peux pas faire d’effort, je ne peux pas faire d’effort
Mais il faut faire quelque chose
I’m bloody girling, le héros est boring
Ce jour de l’été, j’ai tout à coup envie de manger une glace
Il fait super chaud dehors
De l’air du ventilateur souffle contre mon visage et je ressemble à une grenouille
Cette atmosphère de trois heures me rend las
Pendant que je regardais distraitement le paysage par fenêtre,
Je ne sais plus qui je suis

Je ne peux toujours pas avancer
Car l'été revient
Mes chaussures sont trop serrées
Et je ne peux pas avoir le panier à trois points
Car l’été revient
Le paysage que j’ai enregistré ne se passe pas,
New Beat
Ce matin, très
L’été
Summertime
Je descends du train en août
Je crie vers le champ
Simplement
Je me demande si je fais des efforts aujourd’hui
C’est la suite d’hier
Je suis sur le point de m’effondrer sur le toit
Homme et femme parlent d’amour dans le train
Le dernier train que j’ai pris est dans
Le crépuscule que j’ai enregistré


La répétition


 Je lu ‘’Quand nous étions orphelins’’ de Kazuo Ishiguro avant de m’endormir à l’aube. Dans mon rêve, je passais un partiel sur une œuvre de cet écrivain britannique alors qu’il n’y avait aucun cours à ce sujet. Alors que je mettais ma tête entre mes mains car je n’arrivais pas à répondre à quelques questions, un homme, peut-être un professeur ou un surveillant est venu à côté de moi. J’ai levé la tête, et c’était Kazuo Ishiguro en personne.

 Au premier semestre, j’avais un cours consacré à l’écrivain autrichien Thomas Bernhard. Je ne le connaissais pas jusque-là, et ‘’la Cave’’ est le seul livre de cet écrivain que j’aie lu pour le moment. Ce roman autobiographique m’a fort étonné parce qu’il y avait beaucoup de répétitions. Thomas Bernhard est autrichien si bien que sa langue maternelle est l’allemand et ce livre a été traduit en français, mais le français est une langue qui essaie d’éviter la répétition. Répéter des expressions semblables ou les mêmes mots n’est vraiment pas joli en français. Je me suis donc demandé pourquoi il fallait autant de répétitions, alors que le français n’est pas fait pour cela. Ce n’est pas bien de répéter des mots ainsi, parce que ça embrouille les idées. Si on répète une phrase, cela crée une sonorité particulière, tantôt plaisante tantôt déplaisante. En fait, une sonorité singulière se crée si on répète les mêmes mots. Quand j’ai lu ce livre de Thomas Bernhard, j’étais vraiment surpris, car j’ai pensé qu’il y avait trop de répétitions. J’ai fermé le livre et je l’ai rouvert, pour voir s’il y avait toujours autant de répétitions. En fait, j’ai constaté qu’il y avait toujours beaucoup de répétitions, tout au long du livre. Chose étrange, même si je lisais plusieurs pages, j’avais l’impression que le récit n’avançait pas du tout et que je revenais au même endroit. C’était étrange. À cause de phrases semblables les unes aux autres, c’était comme si le même récit se répétait comme la pellicule abîmée d’un film. Je n’avais jamais lu un tel livre, c’est-à-dire, un livre dans lequel le récit était répétitif et cyclique. Alors que c’est un livre tout mince, j’avais l’impression que je lisais toujours la même page. C’est en fait à cause de la répétition des mêmes mots, des mêmes phrases, des mêmes personnages. Mais si on fait attention, on constate que le récit avance quand même. Il y avait du progrès dans le récit, malgré les répétitions. C’est vrai qu’il y a beaucoup de répétitions, je n’ai aucune objection ; ça me gêne un peu. Je ne nie pas qu’il y ait des répétitions dans ce livre. Il me semble même évident que les mêmes scènes se répètent dans plusieurs passages. Mais le texte original est en allemand. En allemand, la répétition d’une même phrase se fait naturellement ? Je me suis posé cette question, car en français, on dit qu’il faudrait éviter de répéter les mêmes mots. Le français n’aime pas la répétition, mais c’est ce qui a enrichi le vocabulaire de cette langue. Cependant, lorsque j’y repense, ce livre est comme la vie. Dans la vie quotidienne, on voit souvent les mêmes personnes ; on a l’impression que l’on répète les mêmes journées comme si nous étions des personnages enfermés dans la pellicule abîmée d’un film. Mais si on fait attention, on constate que notre récit avance petit à petit, et nous arrivons finalement à la dernière page de notre livre.
                                        

mercredi 25 avril 2018

''Les vacances d'été de mes 23 ans'' Shinsei-Kamattechan



Cette année, j’ai eu 23 ans
Mon visage est un peu fatigué
L’été est venu
Mais je ne vais nulle part
Car je n’ai aucun projet
Je passe à la vitesse supérieure et je vis cet instant

Les vacances d’été trop misérables commencent
La carte holographique que tu m’as donnée,
Je veux la coller sur ton dos maintenant

Combien d’argent as-tu ?
Ça ne me regarde pas
L’été est venu,
Mais cette année non plus,
Je ne ferai rien
J’ai continué de pédaler
Et j’ai 20 ans passés

Je commence à courir en feignant de ne pas m’en rendre compte
La carte holographique que tu m’as donnée,
Je veux la coller sur ton dos

J’ai crié à la plage de Kujyûkuri que j’ai eu 23 ans
Ensuite j’aurai 33 ans
Le soleil étincelant m’énerve, ça m’énerve
Au fait, je me demande si tu vas bien

Quant à moi, je continue de pédaler et les journées passent
Les vacances d’été merdiques commencent
Où es-tu et que fais-tu ?
Alors que ça ne me regarde pas

Mais j’ai envie de savoir
Je suis comme ça
Je fais s’éloigner l’image changeante de moi-même
La carte holographique que tu m’as donnée,
Je veux la coller sur ton dos
Maintenant
Ouais, maintenant
Voilà, ce sont mes vacances d’été


Stupeur et tremblement 2


 J’aime beaucoup les filles aux cheveux longs et lisses ; par contre, je déteste avoir les cheveux longs. Les cheveux qui tombaient sur ma nuque m’irritaient et quand j’avais envie de lire un livre, mes mèches m’en empêchaient. De plus, c’est bientôt l’été et il fera chaud. J’ai donc décidé d’aller chez le coiffeur aujourd’hui.

 Vers onze heures, j’ai appelé le salon de coiffure où je vais toujours. La voix d’une femme entre deux âges m’a dit qu’elle était disponible à midi et demi. J’ai avalé le café que j’étais en train de boire et je me suis tout de suite préparé.

 Je suis arrivé chez le coiffeur, mais il n’y avait personne. En fait, il y avait quelqu’un, car j’entendais une conversation au fond. Je pouvais crier bonjour, mais je me suis borné à leur envoyer de la télépathie.

 La télépathie a marché. Quelques instants plus tard, le coiffeur qui s’occupe toujours de mes cheveux est sorti du fond. Il m’a salué et m’a dit que c’était lui avec qui j’avais parlé au téléphone tout à l’heure. J’ai pensé qu’il plaisantait.
« Mais non, c’était une dame ! ai-je dit.
- En fait, on me dit souvent que j’ai une voix féminine au téléphone », a-t-il dit.
Très étrange.

 J’ai remarqué que chez le coiffeur en France, quand on fait du shampooing, le client doit lever la tête. C’était la même chose chez un autre coiffeur que j’avais envie d’appeler plutôt décoiffeur. Au Japon, il y a deux types de salons de coiffure, celui pour hommes et celui pour femmes. Cette différence devient de plus en plus ambiguë depuis quelque temps, et les salons de coiffure deviennent progressivement unisexes, mais normalement, dans ceux pour hommes, le client baisse la tête pour le shampooing. Personnellement, je préfère baisser la tête car je suis sûr que le visage des êtres humains pendant le shampooing ressemble à celui d’un idiot. Si je ne veux pas avoir l’air idiot, je dois prendre une expression douloureuse, comme si je réfléchissais à une question métaphysique que personne au monde n’avait affrontée. Et alors le coiffeur me demande : « Ça va ? L’eau est trop chaude ? ».

« Comme d’habitude ? m’a demandé mon coiffeur.
Comme d’habitude », lui ai-je dit de la manière la plus hard-boiled possible.

 Je pense que c’est un bon coiffeur, puisqu'il sait bien ce que je souhaite et aussi qu’il n’essaie pas de bavarder avec moi pendant la coupe. Il est vrai que le nombre de salons de coiffures où je suis allé en France est limité, mais au Japon, parfois, ou très souvent, il y a des coiffeurs qui veulent causer avec leurs clients. Dans cette nation où le service clientèle est excédentaire, le bavardage inutile est censé plaire aux clients alors qu’en réalité, le plus souvent ce n’est pas le cas. Le supermarché japonais en est aussi un exemple : c’est-à-dire, le service superfétatoire censé être dans l’intérêt du client a le résultat inverse.

 Imaginez : le weekend, vous faites des courses au supermarché près de chez vous et à la caisse, une vendeuse vous dira :
« Bienvenue à notre supermarché. Voudrez-vous un sac plastique ? Des  baguettes ? Une cuiller ? Une fourchette ? Une paille ? Vous achetez une bière, pouvez-vous prouver que vous êtes majeur ? …Merci, c’est bon. Avez-vous la carte de notre magasin ? C’est gratuit et vous aurez beaucoup d’avantages. En ce moment, nous faisons telle ou telle promotion, si vous achetez tel ou tel article, vous aurez tel ou tel avantage. Vous avez fait un achat de 5,000 yens, vous pouvez tirer au sort. Félicitations ! vous avez gagné une grande figurine spéciale d’un animé quelconque. Voudrez-vous un sac plastique ? Une cuiller ? Une fourchette ? Une paille ? Je m’excuse d’avoir salué deux degrés trop bas. Je recommence. Cette fois, c’est une erreur de trois degrés. Je recommence jusqu’à ce que je puisse m’incliner à quatre-vingt dix degrés, sinon c’est impoli pour les clients… ». 
 Et vous ne sortirez plus jamais du supermarché.

 J’ai fait une digression.
 En tous cas, c’est ainsi que mon coiffeur m’a coupé les cheveux, comme d’habitude.
 J’ai pris une douche chez moi pour faire tomber les cheveux. Ils étaient secs en cinq minutes. Maintenant, je suis prêt pour l’arrivée de l’été.

 Je me suis rendu compte que chaque fois que j’écris quelque chose sur le Japon, je ne peux m’empêcher de ridiculiser ce pays. J’écrirais peut-être ‘’Stupeur et tremblement 2’’ si Amélie Nothomb m'y autorise. Ce sera une histoire dans laquelle Amélie-san aux yeux bleus revient au Japon pour se venger de ses anciens collègues de la compagnie Yumimoto en les massacrant un par un. Monsieur Omochi sera étouffé avec douze mochis (gâteaux de riz), Fubuki (qui veut dire littéralement ‘’tempête de neige’’) périra gelée au sommet du mont Fuji. Pour le sort de Monsieur Shiranaï (qui veut dire littéralement ‘’je ne sais pas’’), je ne sais pas.

mardi 24 avril 2018

''Jules et Jim'' (1962)



 J’aimerais voir tous les films de François Truffaut. Jusqu’ici, j’ai vu ‘’Les Quatre Cent Coups’’, ‘’Tirez sur le pianiste’’, ‘’La Peau douce’’, ‘’Fahrenheit 451’’, ‘’Baiser volés’’, ‘’L’Enfant sauvage’’, ‘’Domicile conjugal’’, ‘’Les Deux Anglaises et le Continent’’, ‘’L’Histoire d’Adèle H’’, ‘’L’Argent de poche’’, ‘’L’Homme qui aimait les femmes’’. Et je me suis offert le DVD de ‘’La Nuit américaine’’ pour mon dix-huitième anniversaire. D'ailleurs, j'ai commencé l’apprentissage du français pour voir ses films sans sous-titre.

 J’avais depuis longtemps la bande originale de ‘’Jules et Jim’’, par contre je n’avais pas encore découvert le film. J’ai donc regardé ‘’Jules et Jim’’ aujourd’hui. Il est considéré comme l’un des chefs-d’œuvre de ce cinéaste.

« Tu m’as dit ‘’Je t’aime’’, je t’ai dit ‘’Attends’’. J’allais dire ‘’Prends-moi’’, tu m’as dit ‘’Va-t’en’’. »
 Voilà, ce film commence par ces mots de Catherine (Jeanne Moreau). L’histoire commence avant la première guerre mondiale. Un jeune homme autrichien Jules (Oscar Werner) rencontre un garçon français Jim (Henri Serre) à Montparnasse, et ils deviennent tout de suite de grands amis.
 Jules et Jim rencontrent un jour une jeune femme qui s’appelle Catherine (Jeanne Moreau) et ils en tombent amoureux. Catherine est une femme libre, exubérante. Elle se déguise en homme, elle se jette dans la Seine.  
 Finalement, c’est Jules qui épouse Catherine. Mais la guerre éclate et les trois amis sont obligés de se séparer. En fin de compte, ‘’le pays de Jules a perdu et le pays de Jim a gagné’’(selon l’expression dans le film). Jules et Catherine commencent leur vie en Autriche. Lorsque Jim retrouve son meilleur ami et sa femme, Catherine n’est pas satisfaite de sa vie.

 On peut donc dire que c’est l’histoire d’un ménage à trois. Cependant, dans ce film, Jules accepte que Catherine entretienne une relation amoureuse avec Jim dont il n’est pas du tout jaloux, alors que normalement, les deux hommes sont rivaux dans un ménage à trois.

 La scène la plus célèbre de ce film est sans doute celle où Jeanne Moreau chante ‘’Le tourbillon’’ en s’accompagnant à la guitare. Lorsque cette grande actrice française nous a quittés l’an dernier, la radio diffusait cette chanson pour annoncer sa mort. À la base, c’est une chanson qu’un des acteurs de ce film, Cyrus Bassiak a improvisée pour distraire Jeanne Moreau quelques années avant le tournage de ‘’Jules et Jim’’. Et François Truffaut a intégré dans son film ce morceau qui était tout à fait personnel. Curieusement, les paroles de cette chanson semblent symboliser le thème de ce film (et ça doit être la raison pour laquelle le réalisateur a décidé de l’utiliser).

 Par ailleurs, une cascadeuse était censée se charger de la scène où Catherine se jette dans la Seine, mais comme elle a refusé, Jeanne Moreau elle-même a dû se jeter dans le fleuve. La Seine était sale et la jeune Jeanne Moreau a eu mal à la gorge.

 Je pense que si François Truffaut n’avait pas été réalisateur, il serait devenu écrivain, car on peut remarquer le goût littéraire du cinéaste dans ce film. La voix d’un narrateur intervient régulièrement et explique la situation comme un livre.

 Des tableaux de Pablo Picasso apparaissent tout au long de l’histoire et illustrent la psychologie des personnages. Quand Catherine se sent triste, le portrait d’une femme morose est accroché au mur. Quand Jim est avec Catherine dans un café, on voit le tableau d’un couple mélancolique à l’écran.

 Je voudrais aussi souligner que le jeu candide de Jeanne Moreau est une grande partie du charme de ce film. Elle rit comme une petite fille, elle court comme un garçon de dix-sept ans, et elle prend une expression triste comme une femme qui a vécu cent ans solitaire.

 Ce que j’aime chez François Truffaut, c’est qu’il arrive à raconter une histoire naturellement, sans exagérer ni dramatiser. Par exemple, il n’utilise pas de musique triste pour la scène de funérailles. C'est comme s'il nous disait que c'est la vie.

lundi 23 avril 2018

''Une certaine manière de boire un café'' Haruki Murakami

 Cet après-midi, on entendait le piano de Wynton Kelly. Une serveuse a déposé mon café dans ne tasse blanche devant moi. C’était une tasse épaisse et lourde, et elle a fait un bruit sec et agréable. Comme un caillou tombé sur le fond d’une piscine, ce bruit est resté gravé pour toujours dans ma mémoire. J’avais seize ans et il pleuvait dehors.

 C’était une ville maritime et je sentais toujours le parfum de la mer dans le vent du sud. Un bateau de plaisance faisait un tour autour du port quelques fois par jour. Je le prenais souvent et je regardais les paquebots et le paysage autour du dock sans me fatiguer. Même s’il pleuvait, nous restions sur le pont tout mouillés. Près du port, il y avait un petit café où il n’y avait qu’une seule table à part le comptoir et des haut-parleurs installés au plafond diffusaient du jazz. Si je fermais les yeux, je me sentais comme un petit enfant enfermé dans une pièce obscure. J’y retrouvais toujours la chaleur intime d’une tasse de café et le parfum doux des filles.

 Ce que j’appréciais vraiment, c’était peut-être plutôt le paysage autour du café que son goût lui-même. C’est ce que je pense maintenant. Devant moi, il y avait un miroir étincelant et typique des adolescents, reflétant mon image qui buvait un café. Derrière moi s’étendait un petit paysage coupé au carré. Le café était noir comme les ténèbres, chaleureux comme le son du jazz. Lorsque j’ai avalé ce petit monde, ce paysage m’a béni.

 C’était aussi une photo-souvenir d’un garçon qui a grandi dans une petite ville. Tiens, prends un café dans ta main droite ; rentre le menton et souris naturellement…oui, comme ça, clic !

 Parfois, la vie est une question de chaleur qu’apporte une tasse de café, a écrit Richard Brautigan quelque part. Parmi les textes sur le café, c'est mon préféré. 

L'âne tuberculeux


 Depuis quelques jours, je ne peux m’empêcher de tousser comme un âne tuberculeux. J’étais fiévreux, j’avais légèrement mal à la tête, mais je croyais que c’était à cause du soleil. Aujourd’hui, en rentrant, j’ai pris ma température, et j’ai découvert que j’avais trente-sept trois degrés. En France, trente-sept n’est pas considérée comme de la fièvre. Au Japon, la fièvre, c’est à partir de trente-sept. Est-ce vrai que les Français, quand ils prennent leur température, mettent le thermomètre dans le trou du cul ? Si c’est vrai, j’imaginerai chaque Français que je croise dans les rues (un monsieur moustachu avec une cravate, une belle fille en jupe, des adolescents qui crient etc.) en train de mettre un thermomètre dans son cul et je perdrai confiance en l'humanité.

 Je suis de nouveau malade, mais j’aimerais écrire mon avis sur trois films que j’ai regardés hier. Je ne résume pas leur histoire parce que c’est ennuyeu…parce qu’on peut facilement la trouver sur Internet.

 D’abord, le film du cinéaste italien Nanni Moretti, intitulé ‘’La Chambre du fils’’. C’était un bon petit film chaleureux qui suit subtilement ce qui se passe dans le cœur d’une famille après la perte de leur fils. J’ai peur de me tromper, mais je pense que le thème de ce film est comment dépasser la douleur. Giovanni traite quotidiennement des patients qui souffrent, mais il se trouve aussi dans leur situation par la mort de son fils. Vers la fin, un des patients lui dit qu’il arrête de le voir car il veut se concentrer sur le traitement de sa maladie physique. Une autre patiente lui dit qu’elle attend que Giovanni retrouve une vie normale.

 Le deuxième film que j’ai regardé est ‘’Les Enfants du Paradis’’ de Marcel Carné. Un de mes professeurs en avait parlé pendant un cours, et comme c’est un film qui se trouve en bonne place dans les classements des meilleurs films, j'avais depuis longtemps l'intention de le regarder.
 J’avais un peu peur de m’ennuyer, mais c’étaient les trois heures les plus courtes de ma vie. J’ai l’impression que les Français sont forts pour raconter des histoires polyphoniques. Ce film m’a rappelé un peu les romans de Balzac. La dernière scène est émouvante. Le jour du carnaval où tout le monde est joyeux sous son déguisement, Baptiste essaie désespérément de rejoindre Garance en criant son nom dans la foule. Plus il tente d’avancer, plus la voiture à cheval de Garance s’éloigne. J’aimerais aussi souligner que ce film est sorti en 1945, ce qui signifie qu’il a été réalisé pendant l’occupation de Nazi. Dans ces conditions Marcel Carné a consacré trois ans à la création de ce film d'excellente qualité. J’avais vraiment l’impression d’être dans le Paris du dix-neuvième siècle.

 Et le dernier est un film allemand ‘’Le Tambour’’. Il s’agit de l’adaptation du roman du même titre de Günter Grass. J’avais acheté la version anglaise de ce livre au Japon, mais je suis venu en France sans avoir le temps de le lire. Je ne peux donc pas comparer le film avec le roman, mais à commencer par la conclusion, c’est l’un des films les plus étranges que j’aie jamais vus, avec ‘’Pink Flamingos’’ de John Waters et ‘’ Salò ou les 120 Journées de Sodome’’ de Pasolini. Il est même plus effrayant que la plupart des films d'horreur ordinaires. Il y avait plusieurs scènes cauchemardesques et répugnantes (des hommes sortent des anguilles de la tête d’un cheval mort, une fille de seize ans joue un jeu érotique avec un petit garçon, des nains qui se déguisent en officiers nazis etc). Ce film a reçu le Palme d’or du Festival de Cannes en 1979 avec ‘’Apocalypse Now’’ de Coppola. C’est un excellent film, je n’ai aucune objection, mais je dois cependant le classer comme ‘’l’un des films que je ne veux plus jamais regarder’’ dans mes Cahier du cinéma personnels, avec ‘’Hostel’’, ‘’All About Lily Chou Chou’’ et ‘’Vol au-dessus d’un nid de coucou’’. Je vous le conseille si vous voulez faire un cauchemar.

dimanche 22 avril 2018

''Mauvais Sang'' (1986)



 J’ai regardé ‘’Mauvais Sang’’ de Leos Carax pour la deuxième fois. La première fois, c’était il y a longtemps. C’est plutôt un film artistique qui n’est pas forcément facile à suivre. Les dialogues sont lyriques et la photographie est originale.

 L’histoire est la suivante : À Paris, la maladie qui se transmet par l’amour sans amour, le STBO se propage. Un jour, le père d’un jeune homme solitaire Alex (Denis Lavant) se suicide pour une raison obscure. Les amis de son père, Marc (Michel Piccoli) et Hans (Hans Meyer) se trouvent contraints de rembourser la dette de leur ami défunt et proposent à Alex de voler le vaccin contre le STBO. Alex se sentait vide même quand il était avec sa petite amie Lise (Julie Delpy). Il accepte leur proposition et quitte sa copine. Ainsi, il rencontre la maîtresse de Marc, Anna (Juliette Binoche).
 Mais franchement, l’intrigue n’est pas importante car beaucoup de scènes sont consacrées à des détails insignifiants.

 Il semble que Leos Carax était considéré comme le successeur de Jean-Luc Godard quand il a débuté. Il est vrai que beaucoup de séquences me font penser à ce réalisateur. Le zoom sur des journaux et des personnages, et la composition de couleurs vives me rappellent ‘’Pierrot le fou’’. Ce chef d’œuvre de Godard est un film dans lequel la lumière éblouissante du soleil du sud de la France est impressionnante. Au contraire, ‘’Mauvais Sang’’ est un film nocturne. La plupart des scènes se passent la nuit, même pendant la journée, le ciel est couvert d’épais nuages.

 Tantôt le style des dialogues de ce film m’a plu, tantôt il m’a irrité. Parfois j’avais l’impression qu’un garçon de 15 ans au visage plein de boutons qui se croit Rimbaud me chuchotait ses poèmes à l’oreille. Mais il y a beaucoup de scènes charmantes dans ce film, celle où Alex court sur un fond de ‘’Modern Love’’ de David Bowie, celle où il essuie les larmes d’Anna, et celle où il joue avec elle comme un enfant. J’aime aussi la scène du début où Alex fuit Lise dans le métro parisien, et la dernière où Anna court sur la piste d’un aérodrome, et où son visage se convulse comme celui d’une épileptique.

 Il semble que le cinéaste n’essaie de pas de cacher qu’il s’agit d’une fiction. Au contraire, il essaie de montrer l’artificialité de son œuvre. Dans la dernière partie, Alex est blessé dans le ventre, mais sa blessure n’est pas réaliste. Les relations entre personnages sont aussi superficielles. Alex est amoureux d’Anna, mais Anna ne quitte jamais Marc. Lisa poursuit Alex après qu’il l’a quittée, et lorsqu’il meurt, elle dit sèchement : « De toute façon, il en avait fini avec moi ». Et c’est cette superficialité qui est cruellement belle dans ce film.

 Ce n’est peut-être pas les propos d’une personne qui l’a regardé deux fois. Mais je pense que je ne l’aurais pas regardé jusqu’à la fin si l’actrice n’était pas Juliette Binoche.

 Si je parle de Juliette Binoche, j’aimerais aussi aborder ‘’Copie conforme’’ d’Abbas Kiarostami, dans lequel elle incarne une femme d’âge mûr qui feint de former un couple de longue date avec un écrivain anglais bien qu'ils viennent de se rencontrer.

samedi 21 avril 2018

''Fight Club''


 J’avais le nez bouché et je ne pouvais pas dormir. C’était comme si je me noyais alors que j’étais sur la terre. Dans « Nausicaä », il y a des forêts appelées ‘’Fukaï’’ (Mer de la décomposition) où personne ne peut respirer sans masque à gaz. Je pense que ce monde où voltigent les pollens de bouleaux blancs est un fukaï.

 J’ai regardé « Fight Club » de David Fincher. Je pensais que je n’avais jamais vu aucun de ses films, mais je me suis rendu compte que j’en connaissais en fait plusieurs. J’avais vu ‘’Se7en’’, ‘’Panic Room’’, ‘’Zodiac’’, ‘’L’Étrange Histoire de Benjamin Button’’, et ‘’The Social Network’’.

 Comment était « Fight Club » ? C’était dingue, drôle, un peu flippant. J’ai adoré ce film, particulièrement la drôlerie des dialogues, le scénario avec une chute inattendue. L’interprétation excentrique de Brad Pitt était ensorcelante, mais le jeu réaliste d’Edward Norton était aussi incroyable. Recommanderai-je ce film ? Oui. Est-ce un bon film ? Un film inouï. Ai-je envie de le regarder de nouveau ? Hmm, non, pas pour l'instant.

 Aujourd’hui, j’ai acheté de la viande de bœuf pour faire déboucher mon nez. J’ai l’impression que la plupart des problèmes sont résolus si on mange un steak. J’en ai donc mangé un, et maintenant je peux respirer normalement.

 Récemment, je suis triste car le cahier des avis de clients de Simply d’Esplanade a été enlevé depuis quelques semaines. J’ai envie d’y écrire ‘’Rendez les avis de clients !’’, mais il a disparu.

vendredi 20 avril 2018

J'ai traversé des océans de tristesse


 Comme le Patio est toujours bloqué, le partiel de littérature générale et comparée a eu lieu à l’Institut de Botanique. Avant d’y aller, je l’ai cherché sur Google Map et j’ai appris qu’il se trouvait juste derrière le musée zoologique. Je suis descendu à l’arrêt Université. Je suis entré dans le jardin botanique, toutefois je n’arrivais pas à trouver l’Institut de Botanique. Pendant que je regardais alentour comme un extraterrestre qui vient de faire un atterrissage forcé sur la terre, deux filles inconnues sont passées à côté de moi. Elles n’étaient pas dans ma classe, mais j’ai décidé de les suivre parce que leurs longs cheveux flottant dans le vent semblaient me dire ''Suivez-nous !''. Au bout de quelques minutes, elles sont entrées dans un bâtiment en béton sur lequel il était écrit ‘’L’Institut de Botanique’’.

 L’épreuve n’était ni facile ni difficile. Mais je n’ai pas pu répondre aux premières questions. Je n’ai particulièrement pas compris la question suivante : « Pourquoi y a-t-il deux récits de la création de l’être humain dans la Genèse ? », quelque chose de ce genre. J’ai appris pour la première fois qu’il y avait deux récits de la création dans la Genèse. Je suis devenu un petit peu plus savant. Merci.

 Ce matin, quand j’ai appris que le Portique avait été débloqué, j’étais déçu. Ce n’est pas parce que je ne voulais pas aller en cours, mais c’est parce que le cours qui aurait dû avoir lieu sur la pelouse aujourd’hui, celui dont j’ai parlé hier, se donne normalement dans le Portique. Donc, si le Portique était ouvert, il n’y avait plus aucune raison de faire ce dernier cours à l’extérieur. J’ai remarqué que les grévistes ne bloquent pas les bâtiments quand je le souhaite, et qu’ils les libèrent quand je ne le veux pas. (Référence : le journal du 19 avril)

 Cependant, quand j’arrivais au Portique avec un peu de retard, j’ai vu mon professeur et mes camarades sortir du bâtiment. Je me suis demandé pourquoi ils sortaient alors que le Portique était ouvert. On m’a dit qu’il y avait un examen dans la salle que l’on utilise d’habitude et que le professeur avait décidé de faire cours sur la pelouse. Mon souhait était exaucé. Nous nous sommes assis sur un banc. Les rayons du soleil étaient forts, mais le vent sec du début de l’été était agréable. Ainsi, la première et (peut-être) la dernière classe sous le ciel bleu a eu lieu à l'ombre d’un arbre, dans un parfum d’herbe.

''Nausicaä de la vallée du vent''



 Il y a quelques semaines, j’ai écrit un article sur Hayao Miyazaki avant la fondation du studio Ghibli et ça m’a donné envie de regarder de nouveau « Nausicaä de la vallée du vent ». Je l’ai regardé d’innombrables fois depuis mon enfance, car la télé diffuse très souvent ce film au Japon (la monstruosité des œuvres de Miyazaki, c’est que leur popularité ne baisse pas même plusieurs années après leur sortie), mais je ne l’avais jamais regardé sérieusement.

 Donc, j’ai regardé « Nausicaä » en français la nuit dernière et j’ai découvert plusieurs éléments que je n’avais pas remarqués quand j’étais enfant. C’est aussi la particularité des œuvres de Miyazaki : elles sont divertissantes pour les enfants mais aussi pour les adultes (même si le cinéaste lui-même dit qu’il crée des films pour enfants).

 Au milieu de l’histoire, au-dessous de la fukaï (Mer de la Décomposition) dans laquelle Nausicaä et Asbel sont tombés, Nausicaä se souvient du passé. Quand elle était petite, elle a essayé de sauver un bébé d’Omu, mais son père et ses soldats le lui ont enlevé. La petite Nausicaä leur a crié : « Ne le tue pas ! Ne le tue pas ! » et elle se réveille. Dans la dernière partie de l’histoire, le royaume de Pejite essaie de lancer les Omus vers la vallée du vent pour anéantir l’armée de l’empire des Tolméques qui l’occupe. L’appât que le Pejite utilise pour attirer l’attention des Omus est leur bébé blessé. Nausicaä libère cette larve et ils se tiennent devant les Omus qui se jettent sur eux. Le petit Omu et Nausicaä se font renverser, mais tous les deux sont finalement sauvés. Et quand elle sauve un bébé d’Omu, le traumatisme que Nausicaä a subi dans son enfance disparait.

 Je ne sais pas si le cinéaste en avait l’intention, mais je pense personnellement que Nausicaä a une ressemblance avec Jésus Christ. Elle se sacrifie pour sauver son peuple et semble perdre la vie dans son combat. Les habitants de la vallée du vent sont chagrinés. Mais peu après elle se ressuscite et marche sur les tentacules des Omus qui semblent former une mer dorée. Cette scène me fait penser au miracle de Jésus marchant sur l’eau. De plus, elle ne tue pas ses ennemis alors qu'ils ont assassiné son père Jill, le roi de la vallée du vent. Au contraire, elle a sauvé Kushana d’un vaisseau aérien en flammes alors qu’elle aurait pu la laisser mourir.

 Au début de l’histoire, Nausicaä porte un vêtement bleu. Plus tard, elle se fait capturer par les gens de Pejite, et elle échange son vêtement bleu contre l’habit rouge d’une fille qui veut l'aider à s'enfuir. Nausicaä porte donc un vêtement rouge, mais au moment où elle essaie de libérer le bébé d’Omu, son sang tâche son vêtement qui devient bleu. Donc, le destin veut que le vêtement de Nausicaä soit bleu, comme la légende du Messie de la vallée du vent.

 J’ai aussi remarqué que le Dieu-guerrier géant ressemble beaucoup à Evangelion. Le Dieu-guerrier géant dans son œuf me rappelle exactement Adam dans le ‘’Central Dogma’’. Vous me direz sans doute que c’est normal, puisque c’est le jeune Hideaki Anno (le réalisateur de ‘’Neon Genesis Evangelion) qui l’a dessiné, mais ce que je voudrais dire, c’est que le Dieu-guerrier géant est devenu une sorte d’obsession pour lui. Par exemple, il a réalisé un film « Le Dieu-Guerrier géant à Tokyo » en 2012 et il dit toujours qu’il veut réaliser la suite de « Nausicaä » lui-même. Il y a des gens qui essaient d’associer « Evangelion » à « Gundam ». Anno est sans doute influencé par « Gundam » (comme beaucoup de gens de sa génération), mais pour moi, « Evangelion » est plutôt la mélange du Dieu-guerrier géant et d’Ultraman (Je pense que « L’Attaque des titans » a hérité de ce courant). Il faudrait aussi souligner que les ‘’Eva’’ ne sont pas des robots, mais des humains géants. Si Hideakki Anno, à vingt-trois ans, n’avait pas rencontré Hayao Miyazaki, et s’il n’avait pas dessiné le dieu-guerrier géant dans « Nausicaä », « Evangelion » n’aurait sans doute pas été né.

 J’ai fait une longue digression. Je voudrais terminer sur une dernière remarque à propos de la vie de Hayao Miyazaki. Son premier long métrage était « Le Château de Caligostro », mais c’était un projet dont il avait hérité de Yasuo Otsuka. Sa première œuvre totalement originale est « Nausicaä de la vallée du vent », et son dernier long métrage est « Le Vent se lève », sorti en 2013. En quelque sorte, la carrière de Miyazaki en tant que réalisateur de longs métrages commence avec le vent et s’achève avec le vent. Représenter le vent est pour lui l’un des thèmes fondamentaux. D’ailleurs, le nom ‘’ghibli’’ qu’il a donné à son studio est un mot italien qui désigne ‘’le vent chaud qui souffle dans le Sahara’’. Ça doit être un curieux hasard, mais le titre de son dernier long métrage ‘’Le Vent se lève’’ extrait d’un poème de Paul Valéry, semble comprendre la notion d’un commencement, une sorte de retour au début.

 Hayao Miyazaki est en train de réaliser un court métrage dont la sortie est prévue en 2019. Un documentaire sur ce nouveau projet, « L’homme qui n’en a pas fini », a aussi été tourné en 2016.

jeudi 19 avril 2018

La classe sous le ciel bleu




 La nuit dernière, j’ai vu dans le groupe ‘’étudiants Strasbourg’’ de Facebook le poste d’un garçon qui montrait, la photo à l’appui, que l’on avait débloqué le Patio et d’autres bâtiments. À ce moment-là, je me suis dit qu’il y aurait peut-être le partiel de linguistique diachronique (ancien français) le lendemain. Mais aujourd’hui, lorsque je me suis réveillé, d’autres publications disaient qu’ils étaient toujours bloqués. Les manifestants les avaient sans doute bloqués de nouveau.

 Au début, c’était la bataille entre les grévistes et ceux qui sont pour la réforme universitaire. Maintenant j’ai l’impression que c’est surtout la bataille entre les bloqueurs et les anti-bloqueurs. Ils se chassent les uns les autres comme Tom et Jerry. Mais qui est Tom et qui est Jerry ?

 J’ai pensé qu’il n’y aurait pas de partiel de linguistique diachronique aujourd’hui. J’ai vérifié ma boîte mail de l’université ; il n’y avait aucun courrier à ce sujet. Si je n’y allais pas et si le partiel avait lieu, je serais bel et bien perdant. De plus, le professeur nous avait dit qu’il serait devant l’entrée de l’Institut Le Bel pour annoncer si l’examen aurait lieu.

 Je me suis rendu au campus avant quinze heures. L’entrée principale de l’ILB était barricadée comme hier. Des gardiens avec un gilet bleu surveillaient les gens. Au fur et à mesure que je les observais, j’ai compris qu’ils laissaient entrer uniquement les professeurs ou les chercheurs, après avoir vérifié leurs pièces d'identités.

 Quelques minutes plus tard, mes camarades se sont rassemblés, puis notre professeur est enfin arrivé en vélo. Il a commencé à expliquer quelque chose devant tout le monde. Je ne l’entendais pas bien, mais j’ai compris par l’expression de mes camarades que le partiel était reporté. Plus le professeur parlait, plus le sourire d’une fille qui se tenait devant moi ’s’élargissait. Elle ressemblait à un écureuil qui se réjouit de l’arrivée du printemps. Quant à moi, debout à côté de lui, j’ai constaté qu’il était plus mince et plus grand quand je le regardais de près.

 Personnellement, c’était dommage que ce partiel ait été reporté parce que j’avais beaucoup révisé cette matière. Au début, je trouvais l’ancien français irritant car je n’y comprenais rien. À force de travailler, je commencé à comprendre et maintenant je trouve ça même intéressant. Si ce partiel était reporté après les vacances d’avril, j’oublierais tout.

 J’ai reçu le mail d’un autre professeur disant qu’il souhaitait faire son dernier cours sur la pelouse demain. Au Japon, peu après la Seconde guerre mondiale, comme les écoles étaient toutes détruites à Tokyo, les gens installaient des tables et des chaises dehors pour donner des cours aux enfants. Ce type d'école s’appelait ‘’Aozora-Kyôshitsu », littéralement « Classe sous le ciel bleu ». Je n’avais jamais pensé vivre l’expérience d’une ‘’classe sous le ciel bleu’’ en France. C’est un secret, mais j’attends avec impatience ce dernier cours demain. J’espère qu’il fera beau comme aujourd’hui.