mercredi 31 mai 2017

''Le secret de l'usine de spaghettis'' Haruki Murakami



Ils appellent mon bureau l’usine de spaghettis. 
''Ils'' désignent l’homme-mouton et les belles jumelles. 
Le mot ''l’usine de spaghettis'' n’a pas de grand sens. 
En bref, régler la température de l’eau, parsemer du sel, mettre le minuteur, c’est ça.

Lorsque j’écris un manuscrit, l’homme-mouton vient en agitant ses oreilles.

'' - Franchement, j’aime pas trop cette phrase.
- Ah bon? dis-je.
- Elle est quelque peu présomptueuse, de plus, elle manque de poésie.
- Tant pis.'' dis-je.
J’ai quand même fait des efforts.
''- Peut-être que tu as mis trop de sel, me dit la jumelle 208.
-Refais la, dit la 209.
- Je peux aussi t’aider'', dit l’homme-mouton.
Non merci. Si l’homme-mouton intervient, tout sera gâché.
''Apporte-moi une bière'', dis-je à la 208. 
Et à la 209,
"Et toi, taille trois crayons, s’il te plaît.''
Tandis que la 209 taille des crayons avec un couteau à fruits, je bois une bière. 
L’homme-mouton grignote des fèves séchées.
Lorsque les trois crayons aiguisés s’apprêtent, je frappe des mains et je les expulse de mon bureau. 
Travail, travail.

Pendant que je travaille sur mon manuscrit, ils chantent une chanson main dans la main dans le jardin. 
Elle est comme cela,

Mon pays natal est al dente
Ni trop tôt, ni trop tard
C’est le blé dur
qui se brille en or

La lumière du printemps se verse sur eux. 
C’est un paysage assez chouette.

''A DAY in THE LIFE'' Haruki Murakami

Lorsque j’attendais le bus pour aller au travail, une dame s’est approchée de moi et m’a demandé si j’allais à l’usine d’éléphants. 
Je lui ai répondu que oui, je travaillais à l’usine d’éléphants.
Cette dame a attentivement contemplé mon visage, mon apparence, mes chaussures et mon sac pendant un moment. 
Pendant ce temps, je l'observais aussi. 
Elle avait environ quarante ou cinquante ans et était habillée sobrement. 
Elle portait une casquette à visière comme celles de base-ball, des lunettes à monture rouge en celluloïd, une robe simple marron et des chaussures de tennis blanches.
‘’Comment avez-vous su que je vais à l’usine d’éléphants ?" ai-je demandé à la dame. 
J’ai déménagé dans cette ville il y a seulement deux semaines et je n’avais dit à personne que je travaillais à l’usine d’éléphants. 
Le fait que la dame l'ait deviné m’a fort intrigué.

‘’-C’est normal que je le sache, a dit la dame comme si elle savait tout, ceux qui travaillent à l’usine d’éléphants depuis longtemps ont une atmosphère particulière.
-Peut-être’’, lui ai-je dit.
Ce qu’elle m’a dit m’a plutôt plu. 
Dans cette région, le fait de travailler à l’usine d’éléphants est quelque chose. 
Tout le monde n’y a pas droit.
La dame et moi avons parlé de l’usine ou encore de l’élection jusqu’à ce que le bus arrive. 
Comme nos destinations étaient différentes, nous nous sommes dits ''Au revoir’’ ''Bonne journée’’, puis j’ai pris l’autre bus. 
Les lunettes de la dame brillaient sous le rayon du soleil du matin.

Je suis descendu du bus. 
Les alentours étaient pleins d’ouvriers qui se rendaient à l’usine. 
Tout le monde tenait un sac de papier dans lequel se trouvait leur casse-croûte. 
Ils se taisaient tous. 
L’idée de fabriquer des éléphants toute la journée jusqu’au soir les rendait tellement tendus qu’ils ne n'avaient pas à dire quoi que ce soit.
Nous longions la rivière vers l’usine en silence. 
Le chemin était en pente douce, des fleurs de lilas s’épanouissait par-ci et par-là. 
Le mois prochain sera rempli du parfum d’oliviers odorants. 
Le claquement des boîtes-repas et le bruit des pas des ouvriers retentissaient.

À l’entrée de l’usine, le gardien a vérifié nos cartes d'identification une par une. 
Il doit déjà connaître les visages de tous les ouvriers par cœur, mais il vérifie chaque carte avec attention. 
L’ordre est très important dans l’usine d’éléphants.
''- C’est bon, me dit le gardien en me rendant ma carte. Bon courage, ajoute-t-il.
- Merci.'', dis-je.
Ensuite, je suis allé au vestiaire pour revêtir mon uniforme et j'ai enfilé mon chapeau. 
Ce chapeau a deux lignes vertes. 
C’est un signe qui montre que je travaille ici depuis cinq ans. 
Lorsque je sors du vestiaire, j’entends les cris d’éléphants qui sont dans le processus final. 
Ils seront complets avec l’installation des défenses.

Ainsi, une journée à l’usine d’éléphants commence.

''Fun, Fun, Fun'' Haruki Murakami



Eh bien, elle a pris la voiture de son père et a roulé jusqu'au fast-food

Elle a complètement oublié d'aller à la bibliothèque, comme elle l'avait dit à son père

Et avec la radio à fond, elle roule aussi vite qu'elle le peut

Et elle va s'amuser, s'amuser, s'amuser, jusqu'à ce que Papa lui confisque la T-Bird

Ce sont les paroles de ‘’Fun, fun, fun’’ des Beach Boys, le tube de l’année 1964. 
Parmi les nombreuses chansons à succès des Beach Boys, celle-ci est ma préférée. 
Le rythme et la mélodie sont vraiment joyeux, en particulier, les paroles sont fascinantes. 
Lorsque j’écoute ces paroles, le paysage présent dans cette chanson se lève devant moi. 
Une fille à la queue-de-cheval dans la Thunderbird rouge carénée de l’année 1964. 
Sous prétexte qu’elle va à la bibliothèque elle emprunte cette voiture à son père, elle va la montrer à tout le monde d’un air satisfait. 
Toutes les filles la regardent d’un air étonné, les garçons montent dans leurs voitures et ils commencent une course. 
Mais nul ne peut dépasser la Thunderbird. 
Au bout d’un moment, son père la retrouve et il emmène la voiture. 
La fille est découragée. 
Mais pour ‘’moi’’, cette situation est plus favorable. C’est-à-dire,

Et depuis qu'il t'a confisqué ton trousseau de clés,

tu penses que la fête est finie

Mais tu peux venir avec moi

car on a des tas de choses à faire maintenant.

Cette fille dans la voiture de T-bird en 1964 doit avoir dépassé la trentaine maintenant. 
Je me demande ce qu’elle fait aujourd’hui. 
Peut-être qu’elle fréquente l’atelier de Jane Fonda. 
Peut-être qu’elle habite dans de nouveaux lotissements tels qu’on voit dans ‘’E.T.’’ et qu’elle écoute Barry Manilow. 
De temps à autre, je pense à toi et à la T-Bird rouge. 

lundi 29 mai 2017

''Le porte-queue'' Porno Graffitti



Un porte-queue apparu lestement comme une danseuse
Au beau milieu d’une nuit d’été, sous la lune
Le jaune pour le plaisir, le bleu teinté de la mélancolie
Ces ailes noires de jais semblables au bout du monde

Je demandai à un voyageur, jusqu’où il allait, quand son voyage prendrait fin
Il me répondit qu’il n’y avait pas de fin, qu’il pouvait juste abandonner
Ah bon…alors, prenez bien garde, en lui disant je regardais son dos éloignant il y a longtemps
Au final, je me rendis compte que cet homme qui ne revint jamais était moi

Je vous rencontrai, c’était trop pour moi
Le monde fut rempli de lumière
Bien que les rendez-vous dans les songes me suffisent
Je souhaitai que vous m’aimiez
Le monde changea de visage
Le ciel et la mer se fondent au bout du monde

Je ne connaîtrais jamais la signification qu'avait cachée le poète dans ce seul mot
Je souhaite que ce mot arrivera à mes amis, mais surtout à vous

Si c’était une pièce, quelle scénario épouvantable est-elle
Sans pouvoir avancer ni reculer
J’en réduisis à rester debout au milieu de ce théâtre

Si vous voulez, je suis prêt à sacrifier tout mon corps
Je choisirais avec plaisir d’être le bouclier contre la flammèche
Mais sauvez le reste de mon sentiment et gardez-le dans un coin de votre cœur

Je vous rencontrai, c’était trop pour moi
Le monde fut rempli de lumière
Bien que les rendez-vous dans les songes me suffisent
Je souhaitai que vous m’aimiez
Le monde changea de visage
Le ciel et la mer se fondent au bout du monde

Le porte-queue s’épanouit sur la lande
Derrière ce paysage vacillant
J’aperçois une oasis inatteignable
Donnez-moi un verre d’eau froide
Aimez-moi si c’est possible
Reposez vos ailes sur mon épaule

ヒラリヒラリと舞い遊ぶように
姿見せたアゲハ蝶
夏の夜の真ん中 月の下
喜びとしてのイエロー 憂いを帯びたブルーに
世の果てに似ている漆黒の羽

旅人に尋ねてみた どこまで行くのかと いつになれば終えるのかと
旅人は答えた 終わりなどはないさ 終わらせることはできるけど

そう...じゃあ お気をつけてと見送ったのはずっと前で
ここに未だ還らない
彼が僕自身だと気づいたのは
今更になってだった

あなたに逢えた それだけでよかった
世界に光が満ちた
夢で逢えるだけでよかったのに
愛されたいと願ってしまった
世界が表情を変えた
世の果てでは空と海が交じる

詩人がたったひとひらの言の葉に込めた 意味をついに知ることはない
そう それは友に できるならあなたに届けばいいと思う

もしこれが戯曲なら なんてひどいストーリーだろう
進むことも戻ることもできずに
ただひとり舞台に立っているだけなのだから

あなたが望むのなら この身など
いつでも差し出していい
降り注ぐ火の粉の盾になろう
ただそこに一握り残った僕の想いを
すくい上げて心の隅において

あなたに逢えた それだけでよかった
世界に光が満ちた
夢で逢えるだけでよかったのに
愛されたいと願ってしまった
世界が表情を変えた
世の果てでは空と海が交じる

荒野に咲いたアゲハ蝶
揺らぐその景色の向こう
近づくことはできないオアシス
冷たい水をください
できたら愛してください
僕の肩で羽を休めておくれ

dimanche 28 mai 2017

''Music Hour'' Porno Graffitti



Cette émission attend vos demandes de morceaux préférés
Appelez-nous avec une belle histoire de votre amour
Je vous présente la carte du pseudonyme ''Loving Rabbit'',
''Pourquoi souffre-t-on autant quand on est amoureux ?''

C’est parce que ton cœur te presse et te donne un coup de pied dans le dos
Vide ta tête et écoute ce morceau,
Let’s get to your love !

Parce que tu brûles d’amour, cet été devient de plus en plus chaud
Et moi, je délivre des morceaux qui t’incitent à la plage
Si tu ne sépares jamais la queue de ton amitié amoureuse
Cet été sera exceptionnellement joyeux

J’espère que ça t’a aidée un peu, le pseudonyme ''Loving Rabbit'' et tous ceux qui sont préoccupés de l’amour sans retour au monde
Peut-être tu te demandes encore, comme un flipper sur le point de se casser
Sans jamais comprendre la règle
Is game over ?

Parce que tu désires du fond de ton cœur, ton rêve reste toujours un rêve
Tu n’arrives pas à avancer d’un pas parce que tu es amoureuse
Parce que tu es amoureuse, tu deviens timide
Nage jusqu’au bout de cet amitié amoureuse
Music Hour encourage ton amour trop mignon

Si tu as du mal à être stable, reste comme tu l’es
Let’s get to your love !
Parce que tu désires de réaliser ton rêve, les musiciens chanteront encore plus,
La plage sera remplie de tes morceaux préférés cette année
Si tu ne sépares jamais la queue de ton amitié amoureuse
Cet été sera exceptionnellement joyeux

この番組では みんなのリクエストをお待ちしています
素敵な恋のエピソードといっしょにダイヤルをして
ここでおハガキを一通 R.N「恋するウサギ」ちゃん
“なぜ人を好きになると こんなにも苦しいのでしょう?

それは心が君のこと 急かして蹴飛ばしているからで
シンプルな頭で聞けばいいのさ Let's get to your love!

キミが胸を焦がすから 夏が熱を帯びてく
そして僕は渚へと 誘うナンバーを届けてあげる
淡い恋の端っこを決して離さなければ
この夏は例年より騒々しい日が続くはずさ

少しは参考になったかな?R.N“恋するウサギ”ちゃん
そして世界中で叶わぬ恋にお悩みの方

たぶん心は迷っていて 壊れかけたピンボールみたいで
ルールがいつまでも曖昧なまま Is game over?

キミが夢を願うから 今も夢は夢のまま
大好きだから踏み出せない 大好きだから臆病になる
淡い恋の真ん中を泳ぎきってみせてよ
可愛すぎるハートを見守ってるミュージック・アワー

強い人にはなれそうにもない 揺れてる君でいいよ
Let's get to your love!
キミが夢を願うから ミュージシャンも張り切って
また今年も渚には 新しいナンバー溢れていくよ
淡い恋の端っこを決して離さなければ
この夏は例年より騒々しい日が続くはずさ

''Apollo'' Porno Graffitti




Il y a très longtemps, avant que nous soyons nés, Apollo 11 avait déjà atteint la Lune
Ta montre en édition limitée qu'on veut tous est en mode digital.
Est-ce vrai qu’elle avance plus vite que la mienne ?
Elle est juste cassée, en fait.

Sur les publicités gigantesques qui couvrent tout le ciel,
Une Belle adresse un sourire ambigu
Ses lèvres sont vachement écarlates.

Il y a très longtemps, avant que nous soyons nés, Apollo 11 avait déjà atteint la Lune
Nous cherchons toujours la forme de l'amour éternel
Depuis l'époque où cette ville n’était qu’une jungle

Il n’y a rien d’inconvénient d’ignorer le nom du Président,
Mais au moins, n'oublie pas ton rêve que tu croyais

Tu es perdu dans le flux d'informations qui circule en sous-sol
C'est parce que ta vision est ambiguë
Avec ton cerveau rempli de bogues.

Il y a très longtemps, avant que nous soyons nés, le projet Apollo était déjà mis en œuvre
Ils croyaient sérieusement à être sur la lune
Comme nous qui cherchons l'idéal de l'amour

Si le monde continue à évoluer à cette vitesse,
Jusqu’où Apollo 100 pourrait-il atteindre ?
L'e-mail d’un amant éloigné qui arrive de Vénus,
Ce sera vachement chouette

Il y a très longtemps, avant que nous soyons nés, Apollo 11 avait déjà atteint la Lune
Nous cherchons toujours la forme de l’amour éternel
Depuis l'époque où cette ville n’était qu’une jungle

僕らの生まれてくるずっとずっと前にはもう
アポロ11号は月に行ったっていうのに

みんながチェック入れてる 限定の君の腕時計はデジタル仕様
それって僕のよりはやく進むって本当かい? ただ壊れてる

空を覆う巨大な広告塔には
ビジンが意味ありげなビショウ
赤い赤い口紅でさぁ

僕らの生まれてくるずっとずっと前にはもう
アポロ11号は月に行ったっていうのに
僕らはこの街がまだジャングルだった頃から
変わらない愛のかたち探してる

大統領の名前なんてさ 覚えてなくてもね いいけれど
せめて自分の信じてた夢ぐらいは どうにか覚えていて

地下を巡る情報に振りまわされるのは
ビジョンが曖昧なんデショウ
頭ん中バグっちゃってさぁ

僕らの生まれてくるもっともっと前にはもう
アポロ計画はスタートしていたんだろ?
本気で月に行こうって考えたんだろうね
なんだか愛の理想みたいだね

このままのスピードで世界がまわったら
アポロ100号はどこまで行けるんだろ?
離ればなれになった悲しい恋人たちの
ラヴ・E・メール・フロム・ビーナスなんて素敵ね

僕らの生まれてくるずっとずっと前にはもう
アポロ11号は月に行ったっていうのに
僕らはこの街がまだジャングルだった頃から
変わらない愛のかたち探してる

''Les échasses efficaces'' Haruki Murakami

Un dimanche peu avant midi, lorsque je mijotais du radis séché, les échasses efficaces m’ont rendu visite.
J’ai ouvert la porte, les échasses efficaces étaient debout.
Elles avaient une tête de plus que moi.

''Au fait, j’imagine que vous le savez déjà, il n’y a pas d’échasses aussi efficaces que nous au monde’’, m’ont bredouillé les échasses efficaces d’une vitesse incroyable, sa manière de parler était quelque peu provocatrice.
Tout étonné, je ne leur ai pas pu répondre tout de suite..

''- Les échasses efficaces, comment sont-elles efficaces concrètement ? lui ai-je demandé.

- Ouf, n’avez-vous jamais lu Hideo Kobayashi ? m’ont bredouillé les échasses efficaces d’un air stupéfait.

Elles ont piétiné en faisant un bruit sec sur le plancher en béton.

Ne savez-vous pas que le mot les échasses efficaces paraît dans un ouvrage de Hideo Kobayashi ? ''

Malheureusement, je n’avais même pas lu une ligne de Hideo Kobayashi.
Après avoir terminé mes études à une petite université des sciences et de technologie, je travaille en tant que dessinateur industriel de travaux publics à la mairie de l’arrondissement Ohta.
Je ne pense pas qu’il y ait une personne qui ait déjà lu un livre de Hideo Kobayashi autour de moi.
Je le leur ai dit honnêtement, les échasses efficaces ont fait ‘’Hum’’ d’un air ricaneur.
Comme si elles disaient qu’elles n’avaient plus rien à dire à quelqu’un qui n’avait jamais lu Hideo Kobayashi.
Toutefois elles n’avaient pas l’air de partir.

''- Euh, en fait, en quoi puis-je vous être utile ?’’ lui ai-je posé cette question craintivement.
Peut-être qu’elles m’ont rendu visite pour me vendre quelque chose.
J’espère que non, ai-je pensé.
Je manquais d’argent car je n’avais pas encore reçu le salaire du mois.

''- Ah, en réalité nous n'avons pas de raison particulière, m’ont dit les échasses efficaces d’un ton étrangement péremptoire.
Juste en marchant dans cette couloir, j’ai eu tout à coup envie de savoir combien les gens nous comprenaient, c'est-à-dire, le fait d’être échasses efficaces.
C’est la raison pour laquelle nous avons frappé à la porte de votre studio.''

Je me suis excusé de mon ignorance.

''-Mais ne soyez pas déçues, s’il vous plaît.
Je ne représente pas tous les gens.''

Les échasses efficaces ont tiré une pipe de la poche de poitrine, elles l’ont tapée deux ou trois fois sur la paume puis elles l’ont remise dans la poche.

''Alors, savez-vous si le K421 de Mozart est en mode mineur ou majeur ? '' ,m’ont demandé les échasses efficaces comme si elles me donnaient une seconde chance.
Je lui ai répondu que je ne le savais pas.
C’est normal.
Je suis occupé depuis le matin jusqu’au soir pour créer de nouveaux tuyaux d’égout.
D’un visage pâle, les échasses efficaces m’ont indiqué du doigt, elles ont crié '' Vous voyez, vous êtes les gens vous-même !’’. Puis elles ont brusquement fermé la porte et elles sont parties.
Je ne comprenais rien de ce qui m’est arrivé mais il semblait que tout soit maintenant fini.
J’ai donc mangé du riz chaud et du radis séché pour le déjeuner.

vendredi 26 mai 2017

''Le cœur est un chasseur solitaire''



Pour moi, Carson McCullers est une écrivaine aussi grande que Truman Capote.
Et Truman Capote est l'un des plus grands écrivains qu'ont engendré les Étas-Unis.
Ils viennent tous deux du sud dont l'histoire est inséparable de l'esclavage et de la guerre.

J'ai lu des romans de Mccullers en anglais. ("The heart is a lonely hunter", "The ballads of a sad café" , "The member of the wedding").
Les personnages de ses romans sont souvent solitaires, ou ils ont des défauts moraux ou physiques.
Le héros de "the heart is a lonely hunter", qui s'appelle Singer est un sourd-muet.
Son ami avec qui il habite est aussi sourd-muet, en plus, il est paranoïaque.
L'héroïne de "The member of the wedding", Frankie est une fille de douze ans, qui se préoccupe de sa taille trop grande pour son âge, elle craint d'être vendue à une baraque de forains.
Un jour d'été, la nouvelle du mariage de son frère l'obsède comme la fièvre.
Elle croit obstinément qu'il l'amènera avec son fiancé sans raison.
La femme de ménage noire qui travaille chez elle, Berenice, lui dit qu'elle n'avait jamais entendu une telle histoire et que c'est impossible. (Je suis d'accord avec elle)
L’un de ses yeux est artificiel, puisque son quatrième mari l’a arraché.

Je ne savais pas que tous les romans de McCullers (sauf ‘’The member of the wedding'' traduit par Haruki Murakami) sont épuisés au Japon car d'habitude je ne lis qu’en français ou en anglais.
Sans doute, le déluge d’expressions et de mots racistes qui ne conviennent pas à cette époque empêchent de republier ses livres.
J’ai tout à coup eu envie de relire ‘’Le cœur est un chasseur solitaire’’.
L’édition que j’ai trouvée à la bibliothèque était très vieille.
Toutes les pages sont entièrement jaunies.
Chaque fois que j’ai ouvert une page, j’ai senti l’odeur du moisi.
Il n’y a pas de ce qu’on appelle reliure, la couverture est toute rouge, sauf le titre en or marqué sur le dos, ‘’Le cœur est un chasseur solitaire, C.McCullers’’.
Celle-ci est probablement la première édition, parce que la date de publication est 1947, peu après la seconde guerre mondiale.
Il est également écrit ; ‘’Achevé d’imprimer sur les presses de l’imprimerie moderne, 177, avenue Pierre-Brossolette, à Montrouge. Le dix-sept octobre mil neuf cent quarante-sept’’
Cette imprimerie existe-t-elle encore ?

L’histoire commence comme le suit ;
‘’Il y avait dans la ville deux muets que l’on voyait toujours ensemble. Chaque matin ils quittaient la maison qu’ils habitaient et descendaient la rue, bras dessus bras dessus, pour se rendre à leur travail. Les deux amis étaient très différents. Celui qui décidait toujours du chemin à prendre était un Grec obèse et rêveur……L’autre muet était grand ; ses yeux vifs avaient une expression intelligente. Il était toujours d’une propreté scrupuleuse et habillé très sobrement.’’
Cependant, Antonapoulos tombe malade et son médecin lui interdit de manger de la viande, des sucreries, et de prendre l’alcool.
Cette restriction soudaine le rend excessivement paranoïaque.
Au final, il est interné à l’hôpital.
Désormais Singer vit tout seul dans une chambre d’un appartement que possède la famille de Mick.

Les trois habitants principaux lui rendent régulièrement visite.
Singer, muet mais calme et gentil les accueille comme psychologue.
D’abord Mick, la fille de 14 ans rêveuse et mélomane visite fréquemment la chambre de Singer sous prétexte qu’elle a envie d’écouter la radio.
Mais en réalité, c'est parce qu'elle en est secrètement amoureuse.
Jake Bloumont, ivrogne et marxiste, a une clairvoyance qui se brille dans sa folie..
Il croit que Singer est la seule personne qui comprend ses idées communistes.
Copueland est un médecin noir, il est aussi intelligent et rationnel mais il haït les Blancs, il se bat pour la liberté des gens noirs aux États-Unis.
Effectivement Singer est blanc, mais il pense que ce muet est différent des autres Blancs alors il lui ouvrit le cœur.
Malgré cette intimité qu'ils ressentent, leur cœur ne se croisent jamais.
Une fois, par hasard, ces trois habitants du village se sont rencontrés dans la chambre de Singer.
Une atmosphère embarrassante a régné dans la pièce.
Ils ont attendu que les autres partent, finalement ils se sont tous partis en même temps.
Singer, dans sa tête, ne pense qu'à Antonapoulos qui est interné dans l'hôpital.
Mais c'est douteux que Antonapoulos ressente la même amitié envers Singer car sa tête est remplie de nourriture.

Ce livre est donc l'histoire du développement de différentes formes de solitudes .
Tous désirent d'être lié à quelqu'un, ils veulent être compris, mais ce souhait est si fragile et impossible qu'aucun d'entre eux n'arrive pas à le réaliser.
Ils sont tous condamnés à vivre avec leur solitude.

Après avoir souffert de la fièvre rhumatismale qui l'affligeait depuis l'âge de quinze ans, de l'alcoolisme et de plusieurs échecs de la vie amoureuse, McCullers est morte à l'âge de cinquante ans dans l’hôpital de New York.

''Peu avant une averse véhémente’' Haruki Murakami

Ce n’est pas une invention mais une histoire authentique
À ce moment-là, j’habitais à Kokubunji.
Un jour, j’ai pris le train pour acheter du pain chez Saint-Germain, devant la station Musashi-koganei.
Si j’explique pourquoi j’habitais à Kokubunji, pourquoi j’ai dû prendre le train et me rendre à Musashi-Koganei juste pour acheter du pain (pourtant ces deux stations sont côte à côte), cette histoire sera si longue que je ne pourrai pas tout raconter.
Par exemple, maintenant dans une pièce de ma maison à Boston, je suis en T-shirt de Banana Republic, je bois une grande tasse de café, je suis en train d’écrire ce manuscrit en écoutant ‘’Bob Dylan Greatest Hits Vol.2’’ que j’ai acheté il y a quelques jours chez Tower Record, mais si je devais expliquer depuis le début comment j’en suis arrivé là, porté comme une feuille par un vent capricieux emporte, je pourrais en faire un livre.
Sans exagération, je pourrai réellement en écrire un.
Un chapitre pour Banana Republic, un autre chapitre pour Bob Dylan, et ainsi de suite.
Toutefois, je ne pense pas qu’il y ait quelqu’un qui souhaite lire un tel livre.
C’est la raison pour laquelle je n’expliquerai rien de tout ceci.

D’ailleurs, le nombre de mots de ce manuscrit est limité.
Je vous prie donc de m’imaginer prenant le train, seul pour acheter du pain à Musashi-Koganei.
J’avais une vingtaine d’année, mes cheveux étaient plus longs.
Je portais un stadium jacket (que je garde encore) que j’avais acheté dans un magasin (existe-il encore ?) qui s’appelait Backdrop à Shibuya.
Je n’avais jamais écrit de roman.
J’étais marié, j’avais trois chats.
Je me méfiais de la démocratie parlementaire, je n’avais jamais voté.
J’avais regardé trois fois ‘’Wood Stock’’.
Le train de la ligne chuô était de couleur de brique (ma mémoire est-elle exacte ?), c’était l’automne.
Même si j’étais endetté, même si la victoire des Giants était définitive, l’automne était beau.

Cependant, lorsque je passais un portique de la station Musashi-koganei, je me suis rendu compte que j’avais perdu mon ticket de train.
J’ai fouillé partout mais je ne l’ai pas trouvé.
Comme s’il avait disparu dans une autre dimension.
‘’Comment pourrait-on perdre son ticket entre deux gares seulement ?’’ Ainsi, vous devez être stupéfaits ... ou pas (je perds souvent mes tickets de train).
Mais l’employé de la station Musashi-koganei n’a pas du tout cru que je venais de Kokubunji.
‘’En fait, Monsieur, tous ceux qui ont perdu leur ticket prétendent être montés à la gare précédente. Franchement, j’en ai marre.’’ m’a dit cet employé d’un air vraiment dégoûté comme si quelqu’un lui servait du journal haché pour son dîner.
Toutefois je venais vraiment de Kokubunji.

Vingt ans se sont écoulés depuis cet indicent, j’ai vécu une variété d'expériences déplaisantes.
Je n’ai même pas pu dormir quelques nuits car j’étais trop blessé.
Mais j’ai oublié la plupart de ces choses.
Et j'en oublierais encore bien d'autres.
Car elles ne seront rien par rapport au fait que personne n'ait cru à la perte de mon ticket à la station Musashi-koganei, ce beau matin d’automne.

mercredi 24 mai 2017

''Donut, encore'' Haruki Murakami

Le club de recherche sur le donut de l’Université Sophia, - les jeunes étudiants inventent pleines de choses de nos jours– m’a appelé pour me demander de participer à leur colloque sur ce que doit être le donut.
Avec plaisir, ai-je répondu.
J’ai mes propres idées en ce qui concerne le donut, d’ailleurs, en connaissance, perspicacité, sens esthétiques, je suis quand même plus instruit que la plupart des étudiants.
La réunion de l’automne du club de recherche sur le donut de l’Université Sophia a eu lieu dans le hall de l’Hôtel New Otani.
Il y avait une interprétation musicale, le puzzle donut, après que des casse-croûtes ont été servis pour le dîner, le colloque a commencé dans une pièce voisine.
À part moi, des gens tels qu’un célèbre anthropologue et un critique de la cuisine étaient présents.

'' Si le donut joue un rôle important dans la littérature contemporaine, ce sera en tant que facteur indispensable capable de connecter directement une sorte de force personnelle de la convergence, qui identifie le domaine sous la conscience à…’’, ai-je harangué, ma rémunération était de 50,000 yens.

J’ai mis ces 50,000 yens dans la poche et je me suis déplacé dans le bar de l’hôtel, j’ai bu une vodka tonic avec une étudiante de littérature française avec qui j’avais fait connaissance pendant le puzzle donut.

'' Au final, vos romans sont donutiques J’imagine que Flaubert n’aurait jamais pensé au donut’’.

Elle a raison, Flaubert n’aurait sans doute jamais pensé au donut.
Mais maintenant on est au XXe siècle, bientôt le XXIe siècle commencera.
Ce n’est pas le bon moment pour aborder Flaubert.

''- Donut, c’est moi, ai-je dit en imitant Flaubert.

-Tu es drôle’’, m’a-t-elle dit en étouffant un rire.

 Je ne veux pas me vanter mais je suis plutôt doué pour faire rire les étudiantes de littérature française.

lundi 22 mai 2017

Gregor Samsa comme un otaku japonais incroyablement obèse

Un matin, après avoir fait un étrange rêve, Gregor Samsa s'est réveillé et a découvert qu'il s'était transformé en un otaku japonais incroyablement obèse.
Des affiches de filles aux yeux étrangement gros étaient collées partout sur les murs, des figurines de telles fillettes presque nues étaient soigneusement juxtaposées sur les étagères.
Son corps était engourdi et lourd. 
Il a d'abord essayé de bouger son corps, mais l'obésité l'empêchait de se lever. 
Il a roulé sur le lit et il est misérablement tombé par terre.
Il a fait un grand bruit lourd et le plancher a grincé. 
Il a entendu une femme d'âge mûr crier quelque chose au res-de-chaussée. Mais c'était une langue qu'il n'avait jamais entendue auparavant.
Il s'est efforcé de se lever, son corps sentait une drôle d'odeur. 
Cet homme obèse quelconque, n'avait pas dû se doucher depuis longtemps, pensa Samsa.

En s’agrippant l’étagère, Samsa soutenait son corps lourd. 
Il a regardé pendant un certain temps une figurine qui était posée sur l’étagère. 
La forme disproportionnée de cette figurine l’a terrifié. 
Elle avait les cheveux roses en désordre dont la vivacité de la couleur l’a étonné. 
Auparavant il n’avait jamais vu une couleur aussi forte. 
Il s’est souvenu de la ville de Prague qui est plutôt monotone mais belle et il a failli verser des larmes parce qu’il s’est rappelé sa mère, son père et sa sœur. 
Les yeux de la figurine étaient aussi immenses qu'ils occupaient la moitié du visage. 
De plus, cette figurine avait un énorme poitrine, sa jupe était aussi courte qu’elle laissait entrevoir sa culotte. 
Ça doit être la statuette d’une prostituée, s’est-il dit. 
Cette vulgarité a provoqué en même temps de la nausée et une légère érection chez lui. 
Puis il est tout à coup devenu inquiet et il a frissonné à l’idée que cette forme grotesque représentait les habitants de ce pays. 
Je ne pourrai pas vivre avec ces monstres aux grands yeux, au nez presque inexistant, avec les jambes étrangement longues et maigries comme celles d’un insecte, sans la moindre pudeur, a-t-il pensé.

À ce moment-là, il a entendu un grand bruit. Quelqu'un montait l'escalier d'une manière grossière. 
Samsa a cherché un endroit où se cacher mais la chambre était relativement petite par rapport à son corps énorme. 
Il a enfoncé sa tête sous le lit, mais les épaules ont été bloquées. 
Par conséquent, il se couchait sur le ventre avec seule la tête cachée. 
À ce moment là, la porte s'est brusquement ouverte. 
Il n'a pas pu regarder cette personne parce que sa tête était enfoncé sous le lit. 
Mais cette personne, qui était sans doute une femme d'un certain âge, sans doute la mère du vrai propriétaire de ce corps, lui a crié ; ''Que fais-tu là ? Je t'ai demandé mille fois de prendre le petit déjeuner tout de suite ! Je ne pourrai pas faire la vaisselle ! Toi, tu ne travailles même pas, et tu ne me laisses même pas faire la vaisselle ? Quel fils compétent ai-je ! ''. 
Mais Samsa n'a pas du tout compris cette langue. 
En tremblant, il a retiré sa tête et il a vu une grosse femme mais pas autant que son corps actuel, le transperçait d'un regard dédaignant.
Son apparence physique semblait au moins celle d'humain. 
Cette idée que la forme grotesque de la figurine ne représentait pas forcément les habitants de ce pays l'a rassuré.
''Viens manger tout de suite !'' La femme lui a crié encore.
Samsa ne comprenait toujours pas mais il a décidé de la suivre. 
En tous cas, il savait qu'il ne pourrait pas rester toujours ainsi. 
De plus, il a misé sur l'espoir de connaître quelques clés de ce qui lui étaient arrivé.

dimanche 21 mai 2017

''Le vent se lève'' Tatsuo Hori

Le vent se lève, il faut tenter de vivre.                                                                                                                                                                     Paul Valéry   

L'ouverture


Ces jours de l'été, pendant que tu peignais debout sur la prairie couverte d'herbes de pampas, je me reposais sous l'ombre d'un bouleau blanc à proximité de toi.
Lorsque le soleil s'est couché, après avoir terminé ton travail, tu est venue à côté de moi, nous sommes restés en mettant nos mains sur nos épaules l'un et l'autre, puis nous avons regardé au loin l'horizon illustré d'un cumulus dont les seuls bords bleuâtres étaient teintés de rouge.

Un après-midi (peu avant le début de l’automne), couché sur le dos à côté de ce bouleau blanc, nous mangions des fruits ensemble en laissant ton tableau inachevé sur le chevalet.
Des nuages qui étaient comme du sable, coulaient dans le ciel.
À ce moment-là, le vent s'est levé.
Au-dessus de nos têtes, l'azur semblait se raccourcir et s'allonger sans cesse à travers les feuilles de cet arbre.
En même temps, nous avons entendu tomber un quelconque objet.
Il nous a semblé que c'était le tableau et le chevalet que nous avions laissés là
Tu as essayé de te lever pour les récupérer, mais comme je ne voulais pas que cet instant nous échappe, je t'ai tenue à mon côté.
Tu m'as laissé faire comme je voulais.

Le vent se lève, il faut tenter de vivre.

Ce poème a tout à coup traversé mon esprit, je l'ai murmuré par reprises, en mettant ma main sur ton épaule penchée contre moi.
Tu t'es finalement dégagée de ma main, tu t'es levée et partie.
Le tableau qui n'était pas encore sec, était entièrement couvert d'herbes.
Tu l'as remis sur le chevalet en essayant de te débarrasser de ces herbes avec un couteau à palette.
Tu m'as dit,

'' Ah, si mon père nous trouvait tous les deux comme ça...''.
 Tu m'as regardé et tu m'as adressé un sourire quelque peu ambigu.


''Mon père me rejoindra dans deux ou trois jour.''

Un matin, lorsque nous errions dans la forêt, tu me l'as dit tout à coup.
Je me taisais d'un air gêné.
En te tournant vers moi, d'une voix un peu enrouée, tu m'as dit,

''- S'il arrive, nous ne pourrons plus nous promener comme ça

- Si on veut, on pourra se promener tant qu'on le voudra.''

Il semblerait qu'un signe de mécontentement restait encore sur mon visage, en ressentant ton regard inquiet, j'ai fait semblant d'être attiré par le bruissement des feuilles qui s'étalaient au-dessus de nous.

''- Mon père ne veut pas me lâcher.

Je t'ai fixée d'un regard quelque peu précipité.

- Tu veux me dire adieu ?

- Qu'est-ce que je pourrai faire ?''

Et tu as essayé de m'adresser un sourire comme si tu renonçais à tout.
Ah, la pâleur de ton visage et de tes lèvres à cet instant !

''Ah, pourquoi as-tu si changé ? Alors qu'avant tu te confiais tout à moi...''
J'ai continué à marcher sur ce chemin étroit que des racines ensevelissaient de plus en plus, en te laissant avancer devant moi.

Plus nous nous avancions dans la forêt, plus l’air devenait frais.
J'ai vu des ruisseaux par-ci, par-là.
Tout à coup, une idée m’a traversé l’esprit.
Cet été, tu étais obéissante même à une personne comme moi que tu connaissais à peine, de la même manière tu obéis à ton père ; je me suis donc demandé si tu te confiais sans doute à tout ce qui te dominait
''Setsuko ! Si tu es comme je pense, je t'aimerai encore profondément.
Lorsque je gagnerai assez d'argents pour que nous puissions vivre ensemble, je te demanderai en mariage.
Jusqu'à ce jour, il vaut mieux rester auprès de ton père...''
Je me suis dit de telles choses dans ma tête.
Comme si je te suppliais que tu acceptes, j'ai pris ta main dans ma main.
Tu l'as laissée prendre la mienne.
Ainsi, main dans la main, en silence, nous sommes restés debout devant un ruisseau, nous avons contemplé avec un sentiment inexplicablement triste, la lumière du soleil, que des arbrisseaux filtraient d'une manière enchevêtrée et éparpillée, atteignait à peine le fond de ce ruisseau couvert de fougères. La lumière était agitée par un vent quasi imperceptible.

Deux ou trois jours plus tard, en soirée, je t'ai vue dîner avec ton père qui était venu te rejoindre.
Tu me tournais le dos d'un air perplexe.
Ces gestes que le fait d'être avec ton père te faisait faire inconsciemment, m'ont fait découvrir en toi l'image d'une fille que je ne connaissais pas.
''Même si j'appelais son nom, ai-je murmuré tout seul, elle ne me portera aucune attention, c'est comme si quelqu'un d'autre l'appelait..
Ce soir, même après être rentré d'une promenade solitaire à laquelle j'étais parti avec un sentiment mélancolique, j'ai continué encore à me balader dans le jardin désert de l'hôtel.
J'ai senti le parfum de lis dorés.
Je regardais vaguement deux ou trois fenêtres de l'hôtel qui étaient encore allumées.
Petit à petit, le brouillard est arrivé.
Comme si le brouillard les avait effrayés, la lumière de ces fenêtres s'est éteinte l'une après l'autre..
Lorsque toutes les lumières de l'hôtel se sont éteintes, j'ai entendu un léger grincement, une fenêtre s'est doucement ouverte..
J'ai vu une jeune fille en rose se pencher par la fenêtre.
C'était toi...


 Après que vous êtes partis, mon cœur me serait chaque jour.
Je me souviens encore de ce sentiment douloureux qui était teinté d'une atmosphère heureuse.

Je me suis enfermé dans l'hôtel toute la journée.
J'ai finalement repris le travail pour toi, que j'avais abandonné il y avait longtemps.
J'ai pu me concentrer sur mon travail plus que je n'aurais jamais pensé.
Pendant ce temps, tout est parti vers la prochaine saison.
Et la veille de mon départ, je suis parti me promener.

L'intérieur du bois était si désordonnée que je ne l'ai pas reconnue tout de suite..
À travers les arbres qui avaient perdu beaucoup de feuilles, la terrasse de la villa semblait être encore plus en surplomb que la dernière fois.
Le parfum des feuilles mortes était mélangé à celui des champignons.
Ce changement de saison que je n'avais jamais prévu, - le fait qu'un temps vertigineux s'était passé depuis que je t'avais rencontrée - me semblaient étranges.
Quelque part dans mon cœur, y avait-il une confidence que notre séparation n'était que temporaire, et pour cette raison, ce changement du temps avait-il maintenant un sens différent ?
J'ai vaguement eu une telle sensation que j'ai confirmée plus tard moi-même.

Quelque dix minutes plus tard, vers la fin du bois, je suis sorti sur la prairie couverte d'herbes de pampas de laquelle je pouvais voir l'horizon entier.
Et je me suis couché à côté d'un bouleau blanc dont les feuilles s'étaient mises à jaunir.
C'était le même endroit où je m'étais couché en te regardant peindre durant ces jours de l'été.
Les alentours de l'horizon qu'un cumulus avait dissimulés à ce moment étaient maintenant aussi clairs que je pouvais apercevoir au-dessus des épis blancs, même le contour d'une ligne de montagne que je ne savais pas d’où elle venait.

Pendant que je me concentrais à contempler cette ligne de montagnes éloignées autant qu'elle se grave dans ma mémoire, j'ai ressenti que j'ai finalement trouvé un secret que la nature avait incrusté en moi, et que cette confidence grandit petit à petit dans ma conscience.