samedi 25 février 2017

''Apocalypse now'' et ''Au cœur des ténèbres''

''Au cœur des ténèbres'' est un roman culte de Joseph Conrad.
Malgré la simplicité de l'histoire, il est difficile de disserter sur cette oeuvre énigmatique.
Le mystère de celle-ci nous intrigue et attire de nombreux lecteurs depuis la nuit des temps, en traversant les lieux et les ères.
Un jeune homme anglais, employé par une entreprise coloniale, s'embarque sur un bateau dans un état déplorable, avec la mission de rendre visite à un homme mystérieux qui se cache au fond de la jungle.
La plupart des lecteurs ont sans doute du mal à saisir le fond du récit.
On a l'impression qu'une énigme insaisissable s'ancre silencieusement en nous.

L'auteur de ''Au cœur des ténèbres'', Joseph Conrad.
Ce portrait me rend inquiet d'une certaine manière.


Cette oeuvre a attiré quelques grands cinéastes à l'instar d'Orson Welles et de Stanley Kubrick.
Ils ont tenté de l'adapter pour un film mais malheureusement ce projet n'a jamais abouti.
Finalement, c'est Francis Coppola qui l'a réalisé sous le titre de ''Apocalypse now''.

''Apocalypse now'' (1979)

Après avoir lu ''Au cœur des ténèbres'', j'ai tout à coup voulu revoir ce film.
Je l'avais déjà vu lorsque j'étais lycéen.
(Comme je n'avais pas d'ami, je tuais le temps en dévorant de nombreux films)
Mais je ne me souvenais pas de grand chose.
Tout ce dont j'ai pu me souvenir était le fait que ce film était relativement long et la scène où un hélicoptère américain massacrait les pauvres Vietnamiens.
C'est surtout la fin qui restait brumeuse dans ma tête.
J'ai tapé le titre du film sur Google, j'ai éteint la lumière de ma chambre, je me suis assis devant l'écran.
Le film a commencé avec une chanson langoureuse des Doors.
Au fur et à mesure que l'histoire avançait, ma mémoire se ravivait petit à petit.
Coppola avait changé quelques éléments.
La différence la plus remarquable était le changement de lieu et d'époque.
Dans l'oeuvre originelle, l'histoire se passe au Congo à l'époque de la colonisation.
Dans la version cinématographique, l'histoire est restituée au Vietnam durant la guerre du Viêt-nam.
Le courant majoritaire du récit est identique(Le capitaine Willard s'est vu confié par l'armée américaine la mission de s'introduire dans la jungle pour exécuter le colonel Kurtz qui avait complètement perdu la raison), mais quelques événements qui ne sont pas dans le livre apparaissent dans le film.(le personnage excentrique du lieutenant-colonel Kilgore ''I love the smell of napalm in the morning'', la scène des play-mates, et celle du dîner avec des colons français).
Je pense personnellement que ce film est l'interprétation intime du cinéaste.
(Il y aura des gens qui ne seront pas d'accords)
Lorsque je l'ai vu pour la première fois, je n'ai honnêtement pas compris ce que celui-ci voulait dire.
Mais cette fois je l'ai vraiment apprécié.
J'ai pu mieux le comprendre après avoir lu ''Au cœur des ténèbres''.
Le film avait bien fait resurgir l'ambiance énigmatique et lourde du roman.
''Au cœur des ténèbres'' est un roman sensoriel.
Les ténèbres d'une Afrique inconnue couvre le cœur du lecteur comme des nuages néfastes d'été.
J'ai également apprécié le goût musical du cinéaste.
Parmi les morceaux soigneusement choisis, celui qui était le plus percutant tout au long du film était ''The end'' des Doors.

This is the end, beautiful friend 
This is the end, my only friend, the end 
Of our elaborate plans, the end 
Of everything that stands, the end 
No safety or surprise, the end 
I'll never look into your eyes, again

La méfiance absolue et la mélancolie diabolique de Jim Morisson faisait un écho avec l'obscurité de la jungle du Viêt-nam.

Mais la fin et la scène du dîner avec des colons français m'ont moins plu.
Tout simplement parce qu'elles étaient trop longues et ennuyeuses.
Au début, le visage de Kurtz (Marlon Brando) était dissimulé par l'obscurité mais plus tard, il a été dévoilé sous le soleil.
C'est dommage car j'ai eu l'impression que le mystère et les ténèbres de Kurtz ont été perdus à ce moment précis.
La scène des colons français a été rajoutée plus tard dans ''la version complète,
Celle-ci est majoritairement consacrée à critiquer l'inintelligence des États-Unis.
Elle dure assez longtemps et elle me semble superflue.
Alors, si vous êtes intéressé par ce film, je vous conseillerais ''la version incomplète''
Or, j'ai aimé la scène où les soldats ont couché avec deux playmates.
Je pense que cette scène a été la seule parenthèse féminine du film car le reste était exclusivement un monde masculin.
Le monologue d'une playmate a surtout résonné dans ma tête.
''Le fait d'être Miss playgirl de l'année a été l'expérience la plus solitaire que je n'aurais jamais imaginé....''
C'est bizarre, n'est-ce pas ?
Ces deux jeunes prostituées étaient aussi déréglées d'une certaine manière par la folie de la guerre.

Lorsque le film s'est terminé, il était cinq heures du matin.
Il restait encore quelques heures avant le lever du soleil.
Je me suis inquiété si j'allais faire un cauchemar dans lequel je serais décapité comme Jay Hicks.
Lorsque je me suis réveillé, je me suis rendu compte que je n'avais eu aucun rêve, que de l'obscurité dans ma tête, comme si elle était remplie de paille

mercredi 22 février 2017

La fille de l'espace



Nous nous sommes rencontrées pour la première fois lorsque nous étions en cinquième.
À l'époque, elle était déjà remarquable aux yeux de tous.
Je me rappelle qu'elle s'était tout à coup immobilisée comme si le temps autour d'elle s'était arrêté.
Un matin, lorsque je suis arrivée à l'école, je l'ai découverte accroupie sur une table, complètement immobile telle une poupée.
Elle était étrange, mais c'était quelqu'un d'unique.
Jamais dans mon existence, je ne rencontrerais une autre personne comme elle.
Nous n'avons pas eu besoin de beaucoup de temps pour être intimes.
Un jour, elle m'a confié son secret.
''En fait, je viens de l'espace...'' m'a-t-elle dit.
D'après elle, sa météorite avait fait une chute aux alentours de la Russie, elle est ensuite arrivée au Japon en faisant de l'autostop.
''J'apprécie cet endroit...la terre est pleine d'énergies cosmiques...''
Une fois elle a disparu durant la réunion sportive sous prétexte d'obtenir une communication avec sa planète maternelle.
Au début, je ne la croyais évidemment pas.
Qui peut croire une telle chose ?
Ce qu'elle me disait était trop ridicule et enfantin.
Je n'avais plus l'âge de croire au Père Noël.
Mais plus je passais du temps avec elle, plus je la croyais.

Nous sommes devenues collégiennes.
Je me suis rendue compte qu'elle avait une capacité incroyable de mémoire.
Elle n'oubliait jamais les choses qu'elle a vues une fois.
Son odorat était aussi surhumain.
Elle ne s'est jamais trompée sur qui était passé dans le couloir tout à l'heure.
Elle était également douée dans le domaine du sport.
Elle avait en outre une intelligence extrême.
Malgré une longue absence, elle a obtenu la meilleure note aux partiels alors qu'elle n'avait rien étudié.
En bref, elle était impeccable, à part le fait qu'elle se prétendait toujours fille de l'espace.

Elle était douée en tout même au lycée, mais sa conduite restait bel et bien curieuse.
À ce moment-là, elle a encore élaboré et détaillé son contexte.
Elle m'a dit que son vrai nom était différent et m'a demandé de le retenir.
Elle a tenté de me l'apprendre à plusieurs occasions, mais cette prononciation était trop compliquée pour une terrienne comme moi.
De temps à autres, elle réalisait soudainement toute seule l'entièreté des conversations que nous avions faites en cinquième.
À un moment donné, la fille de l'espace a été diagnostiquée.
Ses parents l'ont amenée chez un psychiatre car elle s'était soudainement immobilisée en roulant des yeux.
Je n'avais jamais entendu le nom de cette maladie mentale.
Comme c'était un nom compliqué, je n'arrive plus à m'en souvenir.
Après m'avoir raconté cette histoire, mon amie de l'espace a ajouté que c'était normal parce que son corps était différent de celui des terriens.
Je me suis dit que c'était normal qu'on l'ait jugée anormale mentalement.
Mais pour moi, les moments les plus heureux étaient ceux que je passais avec elle.

Elle était belle et toujours entourée de soupirants.
Je n'ai jamais vu une fille aussi belle.
Un jour, elle m'a invitée pour la première fois chez elle.
C'était une grande maison de style japonais avec un jardin qui comprenait même un étang et un pont qui le traversait.
Je me suis souvenue qu'elle avait un nom de famille rare.
Sa famille devait être d'origine noble, supposais-je.
J'ai salué ses parents.
Ils étaient ravis que leur fille ait une amie.
Dans sa chambre, il y avait plusieurs objets étranges, de fils de fers métalliques.
Cette chambre était entièrement décorée en argent.

''C'est comme une vraie maison de l'homme de l'espace !'' fis-je.

''Tu en doutais encore...'' a-t-elle soupiré.

À ce moment-là, je lui ai offert un cadeau, une peluche de l'homme de l'espace du type Grey.
Mon amie de l'espace a tout à coup fait une grimace.
Elle m'a dit que les Greys étaient ennemis de sa tribu.

''Je ne savais pas...''

Je me suis excusée et ai essayé de reprendre mon cadeau, mais elle l'a quand même gardé et m'a brièvement remerciée.


Nous étions en terminale.
C'était l'âge où il faut penser à l'avenir.
J'étais dans la même classe que la fille de l'espace mais elle ne venait plus en cours.
Une amie qui venait d'un quartier lointain m'a informée qu'elle avait vu la fille de l'espace à la station de son quartier.
Que faisait-elle dans un tel endroit ?
Je voulais le lui demander mais je me suis persuadée que c'était inutile.
En hiver, la plupart de mes camarades avaient décidé ce qu'ils allaient faire après le lycée.
J'ai demandé à la fille de l'espace quelle était son orientation.
Elle m'a dit qu'elle n'irait pas à l'université et qu'elle travaillerait dans une entreprise de ses parents.
Je lui ai dit que j'irais à l'université d'une autre préfecture.
''Ah bon.'' fit-elle indifféremment.
Elle acquiesçait toujours de cette manière lorsque le sujet ne l'Intéressait pas.

''Adieu.'' m'a-t-elle dit.

''Envoyons de temps en temps des mails.'' lui ai-je dit.

''Non'' m'a-t-elle dit.

J'étais un un peu triste de me séparer d'elle, avec qui j'étais depuis l'école primaire mais elle, elle était calme comme d'habitude.


Pendant les vacances du nouvel an, je suis allée en voiture à un centre commercial avec mes parents.
Lorsque je regardais des meubles pour commencer une vie nouvelle au printemps, j'ai trouvé dans la foule la silhouette de la fille de l'espace.
J'ai couru pour l'attraper.
Elle m'a dit ''ah bon'' en reconnaissant mon visage.

''Tu es venue avec qui ?''

''Seule''

''Tu es venue aussi pour faire des courses ?''

''Je suis inconsciemment arrivée ici.''

Elle m'a dit qu'elle était occupée et a disparu dans la foule.
Mes parents, qui nous voyait de loin, m'ont demandé ;
''c'est qui ? Elle est très belle.''

Il a été révélé que la fille de l'espace avait pris l'habitude de vagabonder.
Sa maison était proche de la gare.
Lorsqu'elle entendait le bruit des trains, elle sortait et prenait inconsciemment le premier train qu'elle voyait.
Elle descendait au hasard, prenait un bus d'une manière aléatoire.
C'est ainsi qu'elle était arrivée à ce centre commercial ce jour-là.
Les jours où elle ne venait pas à l'école, elle prenait le train d'une autre direction et errait quelque part.
Il lui arrivait même de temps à autres d'être ramenée par la police,
En Mars, j'ai fini mes études au lycée.
La fille de l'espace n'est pas venue à la cérémonie de remise des diplômes.
La dernière fois que je l'avais vue était en Février.
J'ai déménagé dans une autre ville sans lui dire au revoir.
Je restais en contact avec mes quelques amis mais j'ai perdu le contact avec elle.

Un jour, mes parents m'ont téléphoné.
Les parents de la fille de l'espace la recherchaient.
Elle avait encore disparu.
Ils voulaient savoir si je n'étais pas avec elle dans mon nouvel appartement.
D'habitude elle rentrait au crépuscule mais cette fois-là elle n'était pas revenue.
Quelques jours avant cette disparition, elle parlait de moi comme si elle s'était tout à coup souvenue,
C'est pour ça que ses parents pensaient à la possibilité que j'aie quelques clés.
Maintenant son vagabondage dépassait la limite de la préfecture.

J'ai jeté un coup d’œil à l'extérieur par la fenêtre, mais elle n'était pas là.
C'était normal.
Je ne lui avais dit que le nom de la préfecture.
Elle n'avait pas mon adresse.
Sa mère avait déjà contacté la police mais comme elle avait laissé son portable, il ne leur restait aucun moyen efficace de la joindre.
Une journée s'est finalement passée, j'étais inquiète.

Tout à coup, mon portable a sonné.
C'était la fille de l'espace.

''T'es où ?'' lui ai-je demandé.

''Aucune idée'' m'a-t-elle dit.

''Tes parents s'inquiètent beaucoup pour toi...''

''Ah bon''

Après un moment de silence, elle m'a dit,

''J'ai essayé de rentrer mais je me suis perdue.''

''Je vais te chercher. Tu peux me dire le nom de la station la plus proche ?''

Elle m'a dit le nom d'une station que je n'avais jamais entendu.
Il semblait qu'elle utilisait un téléphone publique.
Elle avait mémorisé mon numéro de portable que je lui avais dit une fois seulement lorsque nous étions au collège.
Je lui ai demandé de ne pas bouger.
Elle m'a dit ''Ah bon'' puis elle a raccroché.
J'ai recherché cette station sur Internet.
Elle se trouvait dans une préfecture contiguë.
J'ai pris mon portefeuille et mon portable et j'ai couru à la gare.
Je ne connaissais pas trop la ligne.
Un employé de gare m'a aidée à acheter le bon ticket.
Dans le train, j'ai téléphoné à mes parents pour leur dire que j'avais trouvé la fille de l'espace.
J'étais encore inquiète.
J'avais peur de me tromper de train.
Mais quarante minutes plus tard, je suis arrivée à la station qu'elle m'avait dite.
J'avais hâte de la trouver.
J'ai marché vite aux alentours de la station.
Enfin, je l'ai trouvée assise sur un banc avec un paquet de Mikado.
Elle s'est aperçue que j'arrivais au bruit de mes pas.

'C'est qui... ?'' m'a-t-elle dit.

''Je suis venue te chercher. Rentrons.''

''Tu es vraiment venue''

''Bien sûr''

Je me suis assise à côté d'elle.

''Ton parfum a changé.'' dit-elle.

''Comment ça ?'' demandais-je.

''Avant tu sentais comme une chaise.''

Une chaise...

La fille de l'espace avait son sac du collège.
Dedans il y avait des médicaments, des gâteaux et la peluche du Grey ligotée par des fils.

''Tu la gardes encore...'' dis-je.

''Elle est venue toute seule !'' a-t-elle dit et elle l'a jetée sur le sol.


Je l'ai prise et lui ai donnée.
Elle l'a remise dans son sac.
Pendant un moment je me suis tue.
J'attendais qu'elle finisse de manger les Mikado.

''Ta mère a contacté la police.''

''Elle exagère...'' soupira-t-elle.

''Il faut rentrer maintenant'' dis-je.

''Non.''

Je me suis levée et je me suis mise à marcher.
La fille de l'espace s'est aussi levée et m'a suivie.
En cherchant avec Google Map, j'ai calculé le tarif.
J'avais suffisamment d'argent car j'avais mis dans mon portefeuille plus d'argent que d'habitude.
Devant le distributeur, j'ai demandé à la fille de l'espace si elle avait de la monnaie.
Elle a sauté sans rien dire, les pièces ont tinté dans ses poches.
J'ai acheté un ticket pour elle.
Si nous partions maintenant, nous pourrions arriver à peine avant minuit.
Nous sommes montées dans le train.
La fille de l'espace s'est mise à côté de la fenêtre.
Je me suis assise à côté d'elle.
Elle lisait à haute voix les panneaux, je lui ai adressé quelques paroles mais elle ne m'a pas répondu pendant ce temps.

''Comment vas-tu ?'' demandais-je.

''Pas super'' m'a-t-elle dit.

Elle m'a ensuite posé la même question, je lui ai dit, ''ça va.''

''Ah bon'' fit-elle.

J'ai su que le champ de son vagabondage s'était élargi car elle m'a dit qu'elle était allée récemment à une station thermale qui se trouvait au loin.
Elle s'est plainte que la fédération cosmique fraudait.
Après m'avoir longuement parlé de sa planète natale, elle a murmuré,

''Je veux rentrer....''

Je ne sais pas si cela désignait sa planète natale ou sa maison au Japon.

Nous sommes descendues à la gare de correspondance.
Comme je n'avais rien mangé, j'ai acheté deux boules de riz et en ai donnée une à la fille de l'espace.
Elle l'a jetée sur le sol puis l'a reprise et mise dans son sac.
Après nous être reposées environ trente minutes, nous sommes montées dans le train.
La nuit était tombée.
La fille de l'espace ne pouvait plus lire les panneaux.
Elle dormait comme une petite fille.
J'ai reçu un coup de fils de mes parents, ils m'ont demandée de descendre à la gare qui est un peu loin de chez eux.
La fille de l'espace s'est réveillée puis s'est rendormie.
Elle penchait sa tête sur mon épaule.
J'ai senti le parfum de son shampoing.
Je voyais le paysage qui me rendait nostalgique.
À travers la vitre obscure, j'ai pu voir le centre commercial où je l'avais rencontrée.
J'ai regardé tour à tour son visage endormi et le paysage nocturne.
Je me rappelais le moment où nous nous sommes rencontrées pour la première fois.

Avant notre station de destination, elle s'est réveillée.

''La prochaine station....'' murmura-t-elle.

''Tes parents seront là''

''Ah bon.''

Nous sommes arrivées à la gare.
Je me suis levée et je suis descendue.
La fille de l'espace me suivait.
En dehors, nos parents nous attendaient.
Après avoir embrassé leur fille, les parents de la fille de l'espace se sont inclinés devant mes parents et moi.
La fille de l'espace s'est aussi inclinée.
J'ai regardé en arrière, mes parents s'inclinaient aussi.
Ses parents la tançaient, lui disant qu'ils s'étaient vraiment inquiétés pour elle.
La fille de l'espace, regardant vers le haut, a dit seulement ''Ah bon.'' dans les bras de sa mère.
Pendant que nos parents se parlaient, elle a chancelé, s'est mise à tripoter la terre d'un pot de fleurs.
Je l'ai suivie.
Elle était accroupie.
Je regardais vaguement son dos.
Lorsque j'ai regardé en arrière, j'ai vu nos parents illuminés par la réverbère de la gare déserte.
Une sensation indescriptible m'a remplie.
Nos parents se sont rapprochés de nous, la fille de l'espace et ses parents sont montés dans la grande voiture qui était garée à côté de la nôtre.
Je voyais la dernière salutation de mes parents.
J'ai donné un coup d’œil à la fille de l'espace mais je n'ai pas pu voir son visage car elle me tournait le dos pour lire le panneau d'un magasin.
Leur voiture a démarré avant la nôtre.
Avant que la voiture disparaissent dans la nuit, j'ai vu la fille de l'espace me regarder et s'incliner.
Ce fut la dernière fois que je l'ai vue.
J'ai passé cette nuit chez mes parents.
Le lendemain je suis rentrée dans mon appartement où je vis seule.



*Il s'agit de la traduction d'une histoire que j'ai trouvée sur Internet.
Comme j'ai bien aimé cette histoire, j'ai essayé de la traduire en français.
(Mais j'ai modifié ou ajouté quelques phrases pour donner une cohérence au texte)
Ceci n'est donc pas ma création.

mercredi 8 février 2017

Une semaine



Lundi ; Comme je n'ai toujours pas reçu mon portable, je deviens de plus en plus anxieux.
Lorsque je n'ai pas d'Internet, je me sens mal.
Le sourire disparaît de mon visage, mes yeux sont creusés, je perds de plus en plus de poids, mes cheveux chutent.
Comme une fille frêle anémique a besoin d'une transfusion du sang, j'ai besoin d'une transfusion du réseau.
Vers 17 heures, je suis allé à la fac pour assister à un atelier d'allemand.
Pleuvait-il ?
Peut-être.
Cette semaine était pluvieuse.
Dans la salle de classe, il y avait quatre asiatiques y compris moi.
À côté de moi, une coréenne grosse telle une mauvaise plaisanterie était assise.
Elle ne parlait guère français ni allemand, par contre elle m'a parlé en japonais sans aucune faute.
Une Chinoise et un Chinois, qui a posé la même question toutes les cinq secondes et un arabe barbu se mettaient ensemble.
La professeur voire l'animatrice (car c'était plutôt un atelier pour pratiquer la conversation qu'un véritable cours) était une jeune allemande aux cheveux noirs, que j'ai supposé qu'elle n'atteignait pas une trentaine d'année, avait un joli visage avec son nez retroussé et ses lèvres fines comme l'halo de la lune.
Cependant elle avait l'air d'une psychopathe.
Elle nous a sourit seulement quelques fois.
Lorsque j'ai fait des fautes, elle m'a dit d'un ton sec,

''Je vous donne dix secondes.''

Si je n'arrivais pas à donner une réponse correcte en dix secondes, elle me fouettait à plusieurs reprises.
Ce châtiment m'a excité.
J'ai donc intentionnellement fait des fautes pour qu'elle me fouette.

Mardi ; Le vin que j'avais bu la veille m'a rendu malade.
Je ne suis pas allé en cours le matin.
Je suis resté dans mon lit et j'ai contemplé le plafond.
Mais le plafond n'était que le plafond.
Mon partenaire italien d'exposé m'avait envoyé un mail dans lequel était écrit ''à tout à l'heure ;)''.
J'ai culpabilisé car je n'y suis pas allé et je ne lui ai pas répondu.
Je me suis dit que c'était normal si je n'avais aucun ami.
J'ai continué à admirer le plafond.

Mercredi ; En ligne, sur la fiche de suivi de DHL, il était toujours affiché ''envoi en instance".
Bon, ils peuvent garder mon colis éternellement et tant que ça les satisfera, ils tiendront mon colis jusqu’au jour du jugement dernier..
Super.
Tout de même, j'ai envoyé un mail au service client au cas où mon colis n'était vraiment pas arrivé.
Quelques heures plus tard, ils m'ont répondu que mon colis était déjà livré au point relais.
Alors qu'est-ce que cet ''envoi en instance'' ?
Malheureusement je n'étais pas assez intelligent pour résoudre cet énigme.
C'est ainsi que j'ai finalement eu mon nouveau iphone vingt jours après son expédition.

Jeudi ; En cours d'allemand, il y avait deux filles qui y sont inscrites à nouveau.
L'une portait une robe blanche sans manches alors que le printemps n'était pas encore arrivé.
J'admirais ses jambes nues dont j'étais tombé amoureux.
C'était vrai que ce jour-là, nous avions un soleil dont les intenses rayons me donnait tendrement mal à la tête.
Cette lumière héraldique rendais ma vue et les jambes de la fille irréelles.
Mon angoisse a gonflé sans cesse jusqu'à ce qu'elle crève, puis s'est transformé en une dépression.
Les jambes m'importaient de moins en moins.
Je m'en foutais des putains de jambes.
Le plafond n'est que le plafond.
Les jambes ne sont que des jambes.
Le bavardage que j'entendais s'éloignait tel un écho lointain.

Vendredi ; La professeur de littérature africaine nous a dit qu'autrefois face à la colonisation, les Européens ont hiérarchisé les races selon la clarté de la couleur de peau.

''Évidemment, ceux qui avaient la peau claire appartenaient au sommet de la hiérarchie, et ceux dont la peau était la plus sombre étaient considérés les plus bas.''

J'ai jeté un coup d’œil à ma peau.
Elle était assez blanche mais comme j'y ai remarqué un hâle jaunâtre, je suis devenu un peu inquiet.
Je me suis demandé à quelle classe j'aurais appartenu toutefois je ne l'ai pas demandé à la professeur.

Je longeais la longue route vers chez moi.
Il faisait déjà nuit.
Cette route en pente douce semblait durer à jamais.
Je me suis demandé où arriverais-je si je suivais cette route jusqu'à la fin.
Les phares des voitures m'illuminaient de temps à autres.
J'ai mis mes écouteurs.
J'ai écouté ''The soft parade'' des Doors.
Avant que la chanson ne commence, Jim Morrison a donné un discours.
Il criait presque.

''When I was back there in seminary school.
There was a person there
Who put forth the proposition
That you can petition the Lord with prayer.
Petition the Lord with prayer...
Petition the Lord with prayer....

YOU CANNOT PETITION THE LORD WITH PRAYER !''

Depuis que j'ai écouté cette chanson pour la première fois, j'ai trouvé ce discours brusque et étrange.
Pourquoi a-t-il eu besoin de crier comme ça ?
Je ne comprenais même pas ce qu'il voulait dire par ses paroles.
Je ne connaissais pas ce ''Seigneur''.
Je n'ai jamais prié à quelqu'un.
Toutefois depuis lors ces cris de Jim Morrison n'ont cessé de se répéter dans ma tête.
Moi-même je monologuais ces paroles...

''il est impossible d'adresser une requête au Seigneur par la prière....''


Lorsque la chanson s'est terminée, une voiture est passé en faisant retenir le bruit de l'engin puis a disparu au fond de la route.

dimanche 5 février 2017

''Quelqu'un lui avait chuchoté une phrase dans son sommeil ; Lointain Auteuil, quartier charmant de mes grandes tristesses, et il la nota dans son carnet, sachant bien que certains mots que l'on entend en rêve, et qui vous frappe et que vous vous promettez de retenir, vous échappent au réveil ou bien n'ont plus aucun sens.''
                                                                                Patrick Modiano ''L'horizon'' (2010)

Strasbourg sous la pluie













vendredi 3 février 2017

Le vent d'été, le bombardement sur l'Alsace-Lorraine en 1943

J'ai senti le parfum de la pluie.
J'ai levé le voile.
J'ai découvert qu'il pleuvait.
La ville entière était humide.
L'asphalte et les bâtiments reluisaient tel un planisphère céleste.
Les flaques d'eau parsemées dans la ville reflétaient un autre monde comme si elles étaient un passage vers un monde à l'envers.
J'ai vite fait bouillir de l'eau pour boire une tasse de café au lait.
Car je sais que le matin ne commence pas sans caféine.
Je me suis assoupi comme d'habitude dans le bus,
J'ai continué de rêver.
Je portais un uniforme de collégien que je haïssais.
La cravate bleu-marine m'étouffait.
Je devais avoir environ 15 ans.
J'étais dans la salle de classe après les cours.
C'était un été vertigineusement chaud du Japon.
Les cigales chantaient à tue-tête.
J'étais seul.
C'est du moins ce que je croyais.
J'ai aperçu soudainement une fille aux longs cheveux noirs et lisses.
Elle me tournait le dos.
Elle se tenait derrière un rideau blanc en dentelle, fin comme un souffle.
Ses chaussettes bleues, la même couleur que ma cravate, les recouvraient jusqu'aux genoux.
Le vent d'été faisait flotter ses cheveux et onduler sa jupe.
Elle contemplait sans doute le paysage qui s'étendait dehors.
Mais que regardait-elle exactement ?
La circulation des voitures ?
Les passants ?
La montagne ?
Je transpirais.
Je voulais savoir qui elle était, si je la connaissais.
Je voulais voir son visage.
Je me suis levé pour lui adresser la parole mais elle m'a tourné le dos pour que je ne puisse pas voir son visage.
Tout à coup le chant des cigales a cessé.
Ma transpiration s'est accentuée.
Un coup de vent a soufflé.
Elle avait disparu.

Je transpirais dans le bus.
Le chauffage était trop fort.
Je voyais devant moi une fille blonde regarder droit par la fenêtre.
Son regard avait quelque chose de passionnant comme si elle avait pris une décision ferme.
Elle téléphonait à quelqu'un.
Sa voix était basse et  paisible, presque un chuchotement.
Mais cette langue n'était pas le français.
Je dirais que c'était du russe.
Mais cette langue sonnait comme une sorte de langue fictive, comme si elle venait de mon rêve.
À l'université, quelques étudiants et moi attendions la professeur de méthodologie.
Quelques minutes plus tard, une grosse à la peau brunâtre est venue.
Ce n'était évidemment pas notre professeur.
Elle est grande et élancée.
Cette dame nous a dit qu'elle ne viendrait pas aujourd'hui.
Je suis donc parti.

J'ai lu ''Les attaques de la boulangerie'' à la bibliothèque U2-U3.
Comme le titre l'indique, c'est une histoire dans laquelle les protagonistes braquent une boulangerie.
Ce livre est très court.
Il est illustré de dessins d'une artiste allemande.
Selon l'explication, lors d'un voyage à Berlin, l'auteur a découvert une illustration de cette dessinatrice et a été ensorcelé.
Sur le plat inférieur, les portraits de l'auteur et de la dessinatrice me souriaient discrètement.
Je leur ai aussi rendu un sourire.
Mais tout ce que j'ai pu faire était un rictus grotesque.
Le coin gauche et le coin droit de mes lèvres n'étaient pas équilibrés.
La première partie de ce livre s'intitule ''L'attaque de la boulangerie'',
Le protagoniste et son compagnon de l'époque attaquent une boulangerie dont le propriétaire est un fanatique de Richard Wagner et un membre du parti communiste.
Vous devez vous demander pourquoi ils avaient besoin de braquer une boulangerie.
La réponse est simple,

1. Parce qu'ils avaient une faim insatiable, presque violente.
2. Parce qu'ils n'avaient pas un sou et qu'ils ne voulaient absolument pas travailler.

La deuxième partie s'intitule ''La seconde attaque de la boulangerie''.
Quelques années se sont écoulées depuis la première attaque.
Le protagoniste n'est plus en contact avec son compagnon.
Par contre, il s'était marié.
À minuit, le jeune couple a soudainement eu une fringale féroce.
Ils n'ont rien trouvé dans le frigo.
Tant pis.
Après quelques discussions, ils ont décidé d'attaquer une boulangerie.
Cependant comme il faisait déjà nuit, ils n'ont trouvé aucune boulangerie ouverte.
Suite à un compromis, ils ont décidé d'attaquer un Mcdo.

Durant le cours de littérature haïtienne, une sirène a sonné.
Cette sirène était semblable aux sanglots d'un homme.

OUUUUUUUUUUUF......

OUUUUUUUUUUUF......

OUUUUUUUUUUUF.......

OUUUAAAUUUUUF.......

Quelque part, pas très loin d'ici, un homme sanglotait ainsi.
Qu'est-il arrivé ?
À quoi ressemblait-il ?
J'ai regardé à l'extérieur par la fenêtre, cependant je n'ai pas vu d'homme sangloter.

''Je dis aux étudiants étrangers.
En France, on fait sonner la sirène le premier mercredi d'un mois pour voir si ça fonctionne bien.
Donc il ne faut pas vous inquiéter.
Ce n'est rien.'' dit la professeur.

Mais c'était trop tard.
J'avais paniqué et je me suis mis à courir nu dans la salle de cours en criant.
Tout le monde me regardait.
La professeur était stupéfaite.
C'est un mensonge.
Malheureusement je ne suis pas aussi sensible.
J'ai juste imaginé dans ma tête une formation de bombardiers allemands s'approchant dans le ciel lourd d'Alsace-Lorraine.
La ville de l'Alsace était détruite.
Je voyais des maisons en flammes, des enfants pleurer en cherchant leurs mamans, la cathédrale était aussi endommagée.
''C'était ma cathédrale...'' murmurai-je.
Personne ne m'a entendu.
Selon un livre historique,
 ''20 pour-cent de la métropole alsacienne ont été détruits, 5797 bombes ont touché 13,982 maisons ou immeubles, dont 1524 n'étaient plus que des ruines.
La cathédrale a souffert sur l'arrière, au niveau de la tour Klotz. 
À quelques mètres près, la flèche aurait été atteinte, et l'événement aurait alors pris une tout autre ampleur.''
En me promenant dans les rues de Strasbourg, j'ai réalisé qu'il est difficile d'imaginer les choses qui se sont déjà passées.
Les événements passés ne reviennent jamais.
Je ne reverrai plus jamais ces gens.
Je ne rattraperai plus jamais ces temps.
Mais de temps à autres, nous entendons un écho qui vient d'un passé lointain.
Une image transmise d'un endroit inexistant scintille puis s'en va tel un mirage.

C'était en effet pourquoi l'homme sanglotait sans cesse jusqu'à ce que la guerre se finisse et que le drapeau tricolore se hisse dans le ciel d'azur.

Je marchais en sentant contre ma peau la pluie fine presque comme une brume.
Quand il fait beau, je me sens isolé comme si j'étais la seule personne infectée de mélancolie dans le monde.
Personne n'a envie de rire quand il pleut.
J'ai remercié secrètement ce crachin d'avoir dissimulé ma mélancolie.
Je voulais m'échapper dans le monde qui se trouvait dans la réflexion des flaques.
C'est un monde où les ombres règnent.
Contrairement à ce monde réel, régi par les substances, le monde de la réflexion est régi par les hommes-ombres.
Dans ce monde, les substances sont contraintes à être ombres des hommes-ombres.
Les hommes-ombres marchent dans les rues cependant ils n'ont pas de visage.
Même si vous en croisez dans ce monde substantif, il est difficile d'en apercevoir.
Parce qu'ils sont semi-transparents, s'oscillant comme une voile fine.
Certains pensent que c'est du vent noir.
D'autres pensent que ce ne sont que des idées.
Mais ils guettent au coin de la rue et vous attendent.
Les jours de pluie, un passage lié au monde des hommes-ombres s'ouvre à la dérobée.
Parfois il y a des gens qui y tombent.
Ces gens ne reviendront jamais.
Ils seront obligés de vivre en tant qu'ombre des hommes-ombres.

À la maison, j'ai bu une canette de bière en regardant vaguement les traces de gouttes que laissait la pluie sur la vitre.
Une goutte tombait après l'autre, puis elles se sont enchaînées tel un collier.
J'ai souri comme une lune.