Pendant le cours de FLE, le
Coréen m’a donné « Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur » de Harper Lee et «
Gatsby le magnifique » de Fitzgerald. J’avais déjà lu ce dernier en anglais,
mais jamais en français. Il a de bons goûts en littérature. De plus, il est
gentil et plus intelligent que moi.
Pendant
l’exercice appelé « Revue de presse », chaque étudiant fait un exposé sur un article
de journal qu’il a choisi devant tout le monde. Comme j’avais séché cet
exercice deux fois, c’était mon premier jour de « Revue de presse ». Je me suis
déplacé dans une salle vide avec mon enseignante, une Allemande et une
Espagnole. D’abord, l’Allemande a présenté son article sur le service de
location de vélos. Dès qu’elle a eu terminé son bref exposé, tout le monde a
fait des commentaires. Je n’avais pas grand-chose à en dire. Ensuite,
l’Espagnole a parlé, un sourire aux lèvres, d’une fusillade qui avait eu lieu
en Russie dans une école. Un garçon de dix-huit ans s’est suicidé dans la
bibliothèque après avoir massacré avec un kalachnikov environ vingt élèves et
professeurs. À cause d’elle, j’ai dû faire mon exposé dans une atmosphère de
veillée funèbre L’article que j’avais trouvé dans Le Monde s’intitulait « Le
combat quasi perdu de la francophonie dans la culture Internet ». En bref, cet
article disait que l’anglais et le japonais étaient la source principale de la
culture Internet et que le français n’occupait que peu de place malgré son
nombre considérable de locuteurs. Par exemple, sur Twitter, seul deux pour-cent
de tweets sont en français, tandis que trente-quatre pour-cent sont en anglais,
et seize pour-cent en japonais. J’ai aussi un compte Twitter. Aujourd’hui, j’ai
‘’tweeté’’ « Je ne pourrai pas être prêtre car je ne suis pas pédophile.
Dommage ». J’avais choisi cet article parce que j’étais attiré par le titre. Je
ne m’attendais pas à ce qu'il y soit question du Japon. Devant mon public, j’ai
cité quelques exemples de mots anglais et japonais incrustés mondialement dans
la culture Internet. Les mots venant de l’anglais sont nombreux, « E-mail », «
Web », « Smiley », « Like », « Geek » etc. Mais il y a aussi des mots japonais
qui font concurrence à la terminologie anglophone, « otaku », « emoji », «
hentai ». Je n’ai quand même pas osé prononcer le mot « hentai » en classe. Il
est en fait étrange qu’autant de culture Internet viennent d’un petit archipel
comme le Japon.
Mon
enseignante m’a dit qu’elle ne savait pas que le mot « emoji » était japonais
et m’a demandé sa signification. Je lui ai dit que « e » signifie « dessin,
illustration » et « moji » signifie « caractère, lettre ». Ensuite, elle a
demandé à l’Allemande et à l’Espagnole de me regarder, parce que je serais sans
doute l’un des derniers Japonais. Elle avait en fait lu un article selon lequel
la population japonaise diminuait d’une vitesse incroyable à la vitesse d’un
TGV et que les Japonais disparaîtraient dans une centaine d’années. L’Allemande
a fait remarquer que le français n’a pas beaucoup d’influence sur Internet car
les Français ont une vraie vie. J’ai pensé à ma vie. Je n’avais pas de vraie
vie. J’étais un hikikomori. Je n’ai que peu d’amis. Je parle à une peluche. Au
lieu de chercher une copine, je cherche des maquettes de Gundam. Ensuite,
l’Aryenne m’a demandé si je ne voulais pas me marier. Je peux m’imaginer me
pendant, mais pas m’occupant d’un bébé et d’une femme. Si j’habite avec
quelqu’un, je finirai très probablement par aller en prison. Les Japonais disparaîtront
sûrement comme ils en sont conscients depuis l’époque du « Dit de Heiké » : «
Du monastère de Gion le son de la cloche, de l’impermanence de toutes choses
est la résonance. Des arbres “shara” la couleur des fleurs démontre que tout ce
qui prospère nécessairement déchoit. L’orgueilleux certes ne dure, tout juste
pareil au songe d’une nuit de printemps. L’homme valeureux de même finit par
s’écrouler, ni plus ni moins que poussière au vent. »
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