J'ai fini ''L'extension du domaine de la lutte'' de Michel Houellebecq.
C'est son premier livre.
J'ai connu cet écrivain français lorsque j'étais au Japon.
Un jour, mon professeur de français (C'est un homme français marié à une japonaise) m'en a parlé.
Le lendemain, je suis allé à la bibliothèque la plus grande de ma ville.
Le rez-de-chaussé était consacré aux livres en japonais.
Les livres en langues étrangères se trouvaient au premier étage.
Malheureusement la partie consacrée aux livres en français était relativement petite par rapport aux livres en anglais.
Franchement je ne pensais pas qu'il y aurait un livre de Michel Houellebecq.
C'était la bibliothèque d'une ville régionale.
D'ailleurs je n'avais jamais entendu le nom de cet écrivain.
Le nom ''Houellebecq'' sonnait étrangement pour moi.
C'est long par rapport aux noms tels que ''Hugo'', ''Camus'', ''Sartre''.
Je me suis demandé si c'était vraiment un nom français.
Dans un tel moment, je l'ai vu.
Dans une étagère poussiéreuse d'une bibliothèque régionale d'une ville du nord, un livre de Michel Houellebecq dormait.
Le temps l'avait jauni.
Mais chaque page avait l'air intacte.
Cela signifiait que ce livre n'avait pas été touché depuis longtemps.
Sur la couverture, il était écrit ''Les particules élémentaires''.
''Les particules élémentaires''....
J'ai répété ce titre dans ma tête.
Il y avait également une photo d'un homme mince ayant une cigarette à la main.
Sa veste me semblait trop grande pour son corps.
Son visage ne manifestait aucune expression.
Il semblait se méfier de tout.
Cet homme est probablement l'auteur.
Ça doit être lui, ''Houellebecq''.
La semaine suivante, j'ai montré ce livre à mon professeur.
Il était aussi surpris que moi que ce livre se trouve dans une bibliothèque de ma ville.
Il m'a dit qu'il n'appréciait pas du tout son style littéraire mais qu'il était connu en France.
S'il était autant méprisé, je voulais savoir pourquoi.
Ainsi, j'ai ouvert la première page des particules élémentaires.
Ce livre était difficile pour un apprenti du français.
En plus, à cette époque-là, mon niveau du français était plus bas qu'aujourd'hui.
Je n'ai donc pas tout compris, surtout les passages où le narrateur faisait une longue réflexion philosophique.
Mais j'ai quand même pu suivre l’entièreté du récit.
En bref, c'était horrible.
Ce livre atteignait l'extrémité de la vulgarité.
Il était pleins d'argots, d'insultes, d'expressions sexuelles et de temps en temps racistes.
Dans le monde il y a des livres sexuels, des livres remplis d'argots, des livres racistes, mais celui-ci comprenait à la fois tous ces éléments.
Cependant il était aussi certain que cette histoire avait quelque chose de touchant, quelque chose qui arrivait à faire trembler nos cœurs.
Lorsque j'ai terminé la dernière page, j'étais perplexe.
Je n'avais jamais lu un tel livre auparavant.
Je pense que c'est grâce à mon professeur que j'ai réussi DALF C1 (un examen officiel du français).
Avant de partir en France, il m'a prêté un livre de Houellebecq, ''La carte et le territoire''.
Il m'a dit qu'il ne m'en voudrait pas même si je le perdais.
Le livre était déjà usé.
Il l'avait lu dans l'avion pour le Japon.
Je l'ai lu dans l'avion pour la France.
Celui-ci était beaucoup moins vulgaire par rapport aux particules élémentaires.
C'est un livre qu'on peut recommander publiquement aux gens.
Celui-ci a reçu le Prix Goncourt en 2010.
Cette fois, j'ai cherché l'origine de l'auteur, au moment où l'extension de sa lutte a commencé.
Maintenant je me suis habitué à son style.
La vulgarité de l'auteur ne me bouleverse plus.
''L'extension du domaine de la lutte'' est un récit sans salut ni espoir.
J'ai eu l'impression que le protagoniste représentait l'auteur lui-même mais je ne peux pas l'affirmer.
Le héros est un informaticien d'un cadre moyen, dépressif et célibataire.
J'ai oublié si son âge était clarifié.
Mais son collègue, Tisserand avait 28 ans.
J'imagine donc qu'il devait avoir à peu près le même âge.
Tisserand est un homme obèse et laid, selon ce que le narrateur dit ''Il a exactement le faciès d'un crapaud-buffle.''.
Il cherche toujours à coucher avec une femme mais sa laideur rebute toutes les femmes.
Hors ce Tisserand, la misère qu'apporte la laideur est surtout focalisée dans ce livre.
Le narrateur avait une camarade qui s'appelait ''Brigitte Bardot'' au lycée.
Voici, c'est un extrait.
''Au moment où je l'ai connue dans l'épanouissement de ses dix-sept ans, Brigitte Bardot était immonde. D'abord elle était très grosse, un boudin et même un surboudin, avec divers bourrelets disgracieusement disposé aux intersections de son corps obèse. Mais eût-elle même suivi pendant vingt-cinq ans un régime amaigrissant de la plus terrifiante sévérité que son sort n'en eût pas été notablement adouci. Car sa peau était rougeâtre, grumeleuse et boutonneuse. Et sa face était large, plate et ronde, avec de petits yeux enfoncés, des cheveux rares et ternes. Vraiment la comparaison avec une truie s'imposait à tous, de manière inévitable et naturelle.''
Certes, c'est horrible mais c'est marrant.
D'abord parce qu'elle porte le même nom que l'actrice française légendaire.
Mais son physique en est presque l'opposé.
Ensuite parce que simplement la laideur fait rire quand on est un tiers.
Si Monsieur Pignon, incarné par l'acteur Jacques Villeret, était un bel homme, ''Dîner de cons'' n'aurait pas eu de succès.
Le titre vient évidemment de ce passage.
''...En système économique parfaitement libéral, certains accumulent des fortunes considérables. D'autres croupissent dans le chômage et la misère. En système sexuel parfaitement libéral, certains ont une vie érotique variée et excitante. D'autres sont réduits à la masturbation et la solitude.Le libéralisme économique, c'est l'extension du domaine de la lutte, son extension à tous les âges de la vie et à toutes les classes de la société.''
Il n'a pas tort.
De nos jours, beaucoup de monde a l'impression que le monde se divise malgré les vagues de la globalisation.
Même dans les pays puissants tels que la France, les États-Unis, les disparités sociales ne cesse de s'aggraver.
Je considère personnellement que le Bréxit et la victoire inattendue de Donald Trump sont les conséquences de cette extension du domaine de la lutte.
La fossé s'agrandissant entre les gagnants et les perdants devient de plus en plus visible.
Je ne fais sans doute pas exception car je suis aussi plutôt quelqu'un d'introverti, solitaire et célibataire.
Je partage un certain sentiment avec le narrateur.
Il a le sentiment que c'est comme s'il était derrière un rideau, comme s'il y avait une séparation absolue entre le monde extérieur et lui.
Ce livre a été publié en 1994.
Un après ma naissance.
L'année où la chute de l'économie japonaise se faisait ressentir jour après jour.
Toutefois le monde était plus uni qu'aujourd'hui.
C'est en 1993 que le traité sur L'union européenne (le traité de Maastricht) a été signé.
Il y avait quand même de l'espoir.
Ce livre était-il une sorte de prédiction sur le monde actuel?
Ou une telle situation était-elle déjà prévisible dans les années quatre-vingt dix?
Je venais de naître, je ne peux rien juger.
On verra, où ce libéralisme économique nous amènera dans l'avenir.
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