mercredi 18 janvier 2017

Les arbres de Montmartre


Mon téléphone portable est à l'agonie.
Il a eu un problème au port de rechargement.
Comme une vieille dame démente qui ne reconnaît pas son fils, mon iphone 5c n'a pas reconnu son chargeur.
C’était triste.
Si bien que la batterie s'est épuisé peu à peu, elle s'est finalement complètement vidée.
L'écran s'est éteint comme s'il disait au revoir à tout le monde.
Depuis lors, il n'émet aucun bruit, il ne bouge plus.
Est-il mort?
On pourrait, en effet, le considérer mort mais je dirais plutôt qu'il est en état de léthargie.
Parce que si on répare son chargeur, il ressuscitera comme Jésus Christ.
Je n'ai donc pas fait ses funérailles.
Je le laisse tranquille.
Peut-être est-il trop fatigué.

Ça fait plus de trois ans que je l'utilise.
Je me souviens clairement que je l'ai acheté dans une boutique Orange qui se trouvait dans le quartier de l'Opéra à Paris.
Cette boutique doit exister encore au même endroit.
Je me souviens aussi d'un employé qui m'a accueilli.
C'était un homme petit avec la peau brunâtre.
Il était sans doute d'origine arabe.
Il était sympathique mais étourdi, car quelques jours plus tard, il m'a demandé de revenir au magasin pour signer un contrat qu'il avait complètement oublié.

Paris est en effet une ville mixte.
Certains y vivent en tant qu'étudiants.
Certains y travaillent en tant qu'immigrés.
Certains l'ont visité juste pour faire du tourisme.
Il y a même ceux qui ont fui la guerre.
La ville magnifique de Paris me plaisait, mais en même temps, elle me rendait petit à petit instable.
Je ne me sentais pas en sécurité à Paris.
Autrement dit, je n'étais pas à l'aise.

Un jour, un groupe de filles m'a entouré pour me voler.
Elles étaient jeunes, pas laide, mais habillées à moitié comme des SDF.
Peut-être que si elles avaient été mieux habillées, elles auraient pu être plus belles.
Je leur ai finalement échappé.
Je ne me suis rien fait voler.
Ces filles ne m'ont pas irrité.
Mais elles m'ont rendu triste et misérable.

Dans un RER, je voyais souvent une mère et un petit garçon qui faisaient la manche.
Une telle scène m'a pincé le cœur.
Mais je ne leur ai pas donné de monnaie.
Car de tels mendiants, il en existe partout à Paris.
Si je donnais de la monnaie à chaque mendiant, un jour, ce serait moi qui devrais mendier.

J'ai souvent vu des gens s'engueuler à Paris.
Un soir, je rentrais tard et dans le métro, un homme noir et deux hommes pakistanais (peut-être pakistanais, je ne suis pas certain) se sont tout à coup mis à s'engueuler juste devant moi.
Je ne sais pas ce qui leur est arrivé.
Peut-être la cause était une chose insignifiante telle que l'un des Pakistanais ait marché sur le pied de l'homme noir.
L'homme noir les menaçait en français avec un accent africain.
Un Pakistanais essayait de lui répliquer mais comme il n'avait pas suffisamment de connaissance en français, il en était réduit à bégayer.
L'autre Pakistanais tentait de les apaiser.
Et moi, je les regardais.
Puis je suis descendu car le métro était arrivé à ma station d'arrivée.
L'autre jour, je me promenais à Montmartre avec une amie française.
C'était une vraie Française.
Elle était fière d'avoir des ancêtres nobles (dont quelques-uns ont été guillotinés lors de la Révolution française).
Près du Sacré-Cœur, un homme immigré, probablement sans papier, a enroulé adroitement un bracelet brésilien autour de son doigt.
Cette scène était ridicule.
Il essayait de nous (surtout à elle) vendre ses bracelets brésiliens.
Elle lui disait ''Je suis française ! '' sans aucun accent.

Après nous en être échappé, nous avons regardé, de la colline de Montmartre, la ville de Paris.
Nous voyions les Invalides, la Tour Eiffel, la Tour Montparnasse...
J'ai vu de la fumée monter depuis des agglomérations.
Mais je ne voyais pas mon appartement.
Il était trop loin.
Il était dissimulé par les autres bâtiments.
Ce fut à ce moment-là que je me suis rendu compte que tout le monde était étranger à Paris.
C'est une ville où je perdais mon identité.
Les regards des gens se croisaient, mais rarement se rencontraient.


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