Près de chez moi, il y a un petit
restaurant que fréquentent les habitants des environs car les touristes sont
rares dans mon quartier. Le soir, chaque fois que je passais devant, de la
lumière orangée filtrait par les fenêtres ainsi que le brouhaha des clients et
le parfum appétissant de la cuisine. Depuis que je me suis installé ici,
j’avais toujours envie d’y aller. Mais le temps s’est écoulé sans que l’occasion
s’en présente.
Il y a quelques jours, le jour où
j’ai déménagé, j’étais épuisé et contrairement à mon habitude, je n’avais pas
la force de cuisiner. À ce moment-là, j’ai eu l’idée de dîner dans ce
restaurant local, loin d’imaginer ce qui allait m’arriver. La porte était
fermée, mais l’intérieur était éclairé. Le restaurant semblait prêt à
accueillir les clients. J’ai monté le perron et j’ai craintivement poussé la
porte qui s’est ouverte facilement. Aussitôt, un homme moustachu, blond, trente
centimètres de plus que moi, robuste comme un catcheur, vêtu d’une chemise à
carreaux et d’un jean comme un chanteur folk des années soixante-dix, s’est
tourné vers moi et m’a dit : « Le restaurant est fermé, Monsieur ». J’ai
parcouru la salle des yeux : les tables étaient impeccablement dressées ;
une assiette, un couteau, une cuillère et une fourchette sur chacune d’elles. Le
restaurant était ouvert ; c’était certain. Toutefois je n’y pouvais rien
si cet homme, peut-être le patron disait qu’il était fermé. À ce moment-là, un
autre homme d’un certain âge, svelte aux cheveux bruns, assis à une table comme
un client, m’a dit comme s’il lisait mes pensées : « Il est exceptionnellement
fermé aujourd’hui ». L’homme robuste de tout à l’heure a ajouté : « Il y a eu
un cambriolage », et m’a indiqué la caisse enregistreuse à laquelle je n’avais
pas prêté attention jusque-là. En effet, le tiroir de la machine était tordu.
On avait peut-être essayé de le forcer avec une sorte de pied-de-biche, mais en
vain. Le présumé patron m’a expliqué que le cambrioleur n’avait pas réussi, et
que de toute façon, il n’y avait qu’une petite somme d’argent dedans. Toutefois
il n'avait aucune idée de la façon dont le voleur s'y était introduit, sans
abîmer ni fenêtre ni porte. « La police sera bientôt là. Je n’y touche pas, je
n’y touche pas », a-t-il dit comme s’il fredonnait. C’était la première fois
que je voyais un restaurant cambriolé, plus exactement un restaurant qui avait
failli être cambriolé, quoique ce type d’affaires doive être fréquent partout.
« Je reviendrai un jour. Au revoir,
ai-je dit.
– Je suis désolé, Monsieur », a dit
le patron.
J’ai rouvert la porte comme lorsque
j’étais entré, et j’ai quitté le restaurant le ventre toujours vide.
Finalement, malgré mon expérience
amère dans un restaurant chinois (référence : le journal du 10 juin « Sushi au
saumon »), je suis allé au restaurant de sushis qui est aussi dans le coin.
J’ai commandé un chirashi mixte de saumon et de thon. C’est vrai que j’ai un
peu oublié le goût des sushis japonais, mais le chirachi était assez bon et
j'étais satisfait, même si ''chirachi'' désigne un autre plat au Japon.
J’ai souvent l’impression que le
restaurant où j’aimerais manger est fermé quand j’y vais réellement, mais qu’il
est ouvert lorsque je n’ai pas particulièrement envie d’y aller. Est-ce uniquement
mon cas ?
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