Dans
ma résidence, il y a trois bâtiments au total. Au début du mois de juillet, il
y aura des travaux dans les deux bâtiments, et leurs habitants sont forcés de
déménager au troisième pavillon, ce qui est aussi mon cas. Je suis donc allé à
l’accueil pour réserver une nouvelle chambre. La réceptionniste m’a donné une
clef et je suis allé la voir. Elle était similaire à mon ancienne chambre sauf
quelques détails. Retourné à l’accueil, j’ai dit à la réceptionniste que je
voulais en regarder d’autres, mais l’abrutie m’a dit que c’était impossible
jusqu’à ce soir, parce qu’il y a des gens qui partent. Je ne comprends pas
cette logique. Certes, il y a des gens qui partent, et alors ? Cela n’empêche
pas de regarder les autres chambres déjà disponibles. Mais je lui ai dit que je
prenais cette chambre, car je me suis dit que de toute façon elles n’avaient
pas de grande différence. J’ai remarqué que le bâtiment trois est le plus vieux
et le plus abîmé. Les murs sont brisés et il y a des trous. Ce bâtiment ressemble
à une ruine ou sinon à un Auschwitz confortable. Jusque-là, je tolérais de
vivre dans une résidence dont les toilettes et les douches sont en commun,
parce que dans mon ancien étage, il n’y avait que peu d’habitants et cela ne me
posait pas de problèmes. J’ai aussitôt remarqué que dans mon nouvel étage, les
toilettes et les douches sont cassés et inaccessibles, de sorte que je dois
aller chaque fois à un autre étage pour me laver ou aller à la selle. Mais ce
n’est pas tout. Pendant que je déménageais, une femme de ménage, une vieille
dame aux cheveux ébouriffés, m’a demandé dans quelle chambre j’allais habiter.
Je lui ai dit son numéro, et elle m’a dit d’un ton péremptoire : « J’aime les
gens propres. Faites le ménage une fois par semaine. J’entrerai dans votre
chambre régulièrement ». Déjà, je n’aime pas trop qu’on pénètre dans mon lieu
sacré. D'ailleurs, je ne fais le ménage qu’une fois tous les six mois lorsque
des toiles araignées commencent à envahir mon territoire. Plus tard, un ami m’a
dit que cette démente signalait au directeur tous les étudiants dont la chambre
était en bordel pour les avertir ou, au pire, les renvoyer. J’ai regretté
davantage mon ancien bâtiment, car la femme de ménage là-bas était adorable et
douce, comme une petite fille introvertie, et pas un monstre comme celui-ci.
Il
est déjà trop tard pour chercher une autre résidence universitaire. Comme je
suis pauvre, je commence sérieusement à penser à une colocation. Je manque en
effet de sociabilité, je suis souvent triste et sombre, toutefois calme et
aussi anodin qu’un bébé mouton. Même si je ne suis pas adorable et que je ne
sais pas cuisiner, je ne causerai (peut-être) aucun dégât. Je ne fume pas. Je
ne bois que rarement. Je me brosse les dents tous les jours avant de dormir. Je
n’ai jamais oublié de rendre les livres à la bibliothèque avant la date du
retour. Je parle plusieurs langues, le japonais, le français, l’anglais, un peu
d’allemand et le faux chinois. Y aurait-il quelqu’un qui accepterait le mouton
errant que je suis ?
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