mardi 19 juin 2018

Le déménagement


 Dans ma résidence, il y a trois bâtiments au total. Au début du mois de juillet, il y aura des travaux dans les deux bâtiments, et leurs habitants sont forcés de déménager au troisième pavillon, ce qui est aussi mon cas. Je suis donc allé à l’accueil pour réserver une nouvelle chambre. La réceptionniste m’a donné une clef et je suis allé la voir. Elle était similaire à mon ancienne chambre sauf quelques détails. Retourné à l’accueil, j’ai dit à la réceptionniste que je voulais en regarder d’autres, mais l’abrutie m’a dit que c’était impossible jusqu’à ce soir, parce qu’il y a des gens qui partent. Je ne comprends pas cette logique. Certes, il y a des gens qui partent, et alors ? Cela n’empêche pas de regarder les autres chambres déjà disponibles. Mais je lui ai dit que je prenais cette chambre, car je me suis dit que de toute façon elles n’avaient pas de grande différence. J’ai remarqué que le bâtiment trois est le plus vieux et le plus abîmé. Les murs sont brisés et il y a des trous. Ce bâtiment ressemble à une ruine ou sinon à un Auschwitz confortable. Jusque-là, je tolérais de vivre dans une résidence dont les toilettes et les douches sont en commun, parce que dans mon ancien étage, il n’y avait que peu d’habitants et cela ne me posait pas de problèmes. J’ai aussitôt remarqué que dans mon nouvel étage, les toilettes et les douches sont cassés et inaccessibles, de sorte que je dois aller chaque fois à un autre étage pour me laver ou aller à la selle. Mais ce n’est pas tout. Pendant que je déménageais, une femme de ménage, une vieille dame aux cheveux ébouriffés, m’a demandé dans quelle chambre j’allais habiter. Je lui ai dit son numéro, et elle m’a dit d’un ton péremptoire : « J’aime les gens propres. Faites le ménage une fois par semaine. J’entrerai dans votre chambre régulièrement ». Déjà, je n’aime pas trop qu’on pénètre dans mon lieu sacré. D'ailleurs, je ne fais le ménage qu’une fois tous les six mois lorsque des toiles araignées commencent à envahir mon territoire. Plus tard, un ami m’a dit que cette démente signalait au directeur tous les étudiants dont la chambre était en bordel pour les avertir ou, au pire, les renvoyer. J’ai regretté davantage mon ancien bâtiment, car la femme de ménage là-bas était adorable et douce, comme une petite fille introvertie, et pas un monstre comme celui-ci.

 Il est déjà trop tard pour chercher une autre résidence universitaire. Comme je suis pauvre, je commence sérieusement à penser à une colocation. Je manque en effet de sociabilité, je suis souvent triste et sombre, toutefois calme et aussi anodin qu’un bébé mouton. Même si je ne suis pas adorable et que je ne sais pas cuisiner, je ne causerai (peut-être) aucun dégât. Je ne fume pas. Je ne bois que rarement. Je me brosse les dents tous les jours avant de dormir. Je n’ai jamais oublié de rendre les livres à la bibliothèque avant la date du retour. Je parle plusieurs langues, le japonais, le français, l’anglais, un peu d’allemand et le faux chinois. Y aurait-il quelqu’un qui accepterait le mouton errant que je suis ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire