Aujourd’hui, c’était mon dernier jour
de travail. Les nuages de pluie qui stagnaient dans le ciel d’Alsace s’étaient
complètement dissipés, et il a fait beau toute la journée comme si le ciel bleu
bénissait notre départ. Pour la première fois depuis mon arrivée, j’ai l’impression
d’avoir travaillé. Jusqu’ici, mon travail d’interprète se limitait à traduire
les discussions qui ne dépassaient souvent pas trente minutes, entre mon patron
et le directeur de l’usine. Aujourd’hui, le dernier jour de mon séjour dans ce
petit village, j’ai enfin traduit une réunion où tous les gens importants, le
PDG, le président, le directeur de l’usine et mon patron étaient réunis. De
plus, j’ai pu regarder un peu la production dans l’usine. Je pense que mon
interprétation était toujours maladroite. Parfois, j’avais du mal à trouver des
mots pertinents ou à construire des phrases. Cependant, je ne pense pas avoir
fait de bêtises ou de contresens. Globalement, tout s’est bien passé. À la fin
de la réunion, le président m'a serré la main et m'a félicité pour mon travail en
mentionnant mon « professionnalisme ». Ce compliment qui semblait
trop pour qualifier ma compétence m’a fait rougir. C’était la journée la plus
longue de mon séjour. Lorsque tout le monde a quitté la salle de réunion,
derrière la porte, j’ai poussé un profond soupir.
En réalité, mon patron et moi étions
censés travailler beaucoup plus. Mais une succession de contre-temps nous a réduits
à être au chômage. Tout ce que nous avons fait pendant ces trois semaines,
c’était des randonnées en voiture et de manger au restaurant. Mon patron, un
homme d’affaires, était apparemment déçu parce que le travail est sa passion.
Quant à moi, au début, j’étais secrètement content de n’avoir rien à faire,
mais avec le temps, j’ai aussi commencé à m’ennuyer.
Demain je quitterai ce village.
C’étaient les trois semaines les plus étranges et les plus intenses de ma vie.
J’ai visité Milan, Nancy, Dijon et Colmar. Pour l’instant, je ne sais pas si
j’aurai l’occasion de revenir ici. Qui sait ? Il me semble que j'y reviendrai
un jour, mais je sens aussi que c’est la dernière fois que je suis ici. Au
revoir, le patron amical du restaurant de hamburger ambulant. Au revoir, le
patron mince et souriant du restaurant italien. Au revoir, la patronne aux
cheveux blonds et courts du restaurant alsacien, au revoir les employés de
l’usine, au revoir les enfants du village. Au revoir, au revoir.
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