Pendant
que je traduisais le long roman de John Irving « Liberté pour les ours ! »,
j’ai visité le jardin zoologique de Schönbrunn à Vienne. Comme ce zoo est un
endroit important dans le roman, je voulais le voir de mes propres yeux. Après
avoir visité l’Allemagne, je suis allé à Vienne. Sans avoir grand-chose à faire,
je me suis promené dans le zoo toute la journée.
Depuis
longtemps, j’aime les zoos et les grottes. Si j’en trouve au cours de mes voyages,
j’ai envie d’y aller. Les zoos calmes et déserts sont mes préférés. Si c’était
au beau milieu de l’hiver et si la bise soufflait, ce serait idéal: je pourrais
regarder les animaux sans entrave.
Le
jardin zoologique de Schönbrunn se trouve dans le parc du palais royal. À
l’origine, il a été construit pour distraire la famille royale des Habsbourg et
les nobles. Comme la date de son ouverture est 1752, il se peut que Marie
Antoinette ait aussi passé de joyeux moments ici dans son enfance.
Mais
lorsque je l’ai visité il y a vingt-cinq ans, c’était un zoo complètement
inanimé. Sans aucune énergie, les animaux aussi avaient l’air las. C’était
comme si on disait : « On a mis des animaux dans des cages. Regardez-les si
vous voulez ». Personnellement, j’aime une telle atmosphère, détendue et sans
but.
Récemment je suis allé à Vienne après une
longue absence. J’ai profité de cette occasion pour visiter le zoo de
Schönbrunn et j’ai été très étonné car il était devenu un zoo beau et moderne. On
y voyait des animaux rares, comme les pandas et les koalas ; l’équipement aussi
avait été rénové. Il semble que la gestion ait été confiée à une entreprise
privée pour remédier à la baisse progressive du nombre de visiteurs.
Toutefois,
ce jour-là, une vague de froid traversait Vienne et il n’y avait presque
personne. Les lions de ce zoo vivaient dans un environnement proche de la
nature ; sans grille, la cage était entourée de vitre en plastique. Tandis que
j’observais une famille de lions, une femelle s’est mise à marcher et s’est arrêtée
devant moi, puis elle a contemplé mon visage. En bref, cette lionne et moi, nous
étions face à face, séparés par un mur transparent.
C’était
une expérience inattendue. Je n’avais jamais regardé un lion de si près. La
lionne s’ennuyait peut-être car il n’y avait que peu de visiteurs. Ou a-t-elle
trouvé quelque chose d’attirant en un romancier asiatique. J’ai pu sentir dans
son attitude une sorte de curiosité innocente que manifestent parfois les
félins – au moins, c’est l’impression que j’ai eue.
Quoi
qu’il en soit, cet après-midi glacial de la fin de l’automne, séparés par la
paroi transparente, la lionne et moi, nous nous sommes contemplés pendant un
long moment, en silence. Je lui ai adressé un sourire, sans réponse de sa part.
Elle n’a manifesté aucune émotion. Un moment plus tard, nous nous sommes éloignés
du mur (on ne pouvait pas y rester dans ce froid atroce) et nous sommes
retourné à notre vie quotidienne.
Rentré
à l’hôtel, j’ai observé mon visage dans le miroir. Mais il n’avait rien de
particulier. C’était juste moi, rien de très brillant. La lionne, que
cherchait-elle dans mes yeux ?
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