Je suis allé à Otaru, une
ville maritime au nord de Sapporo. La verrerie est la spécialité de cette
ville. Je suis entré dans une boutique où divers articles de verre
étincelaient. De petits verres pour boire du saké. Des verres de vin, des
chopes et aussi de petits objets en cristal. C’était comme si j’étais entré
dans un kaléidoscope. Tandis que je me promenais dans la boutique, j’ai trouvé
des stylos de verre. Des stylos complètement transparents comme la
glace étaient dans des boîtes. Des motifs complexes étaient enfermés dans les corps en verre.
J’avais envie de les toucher, mais ils se trouvaient sous une fine membrane de
cellophane. Certains étaient vendus avec de l’encre. Les cartouches si petites
que des papillons de nuit pourraient y vivre étaient remplies d’un liquide bleu
foncé. C’est incroyable que l’on puisse réellement écrire avec des stylos si
fragiles qu'ils semblaient devoir s'écraser sitôt posés sur ma paume. La plume était
fine et dessinait une courbe évoquant les reins d’une femme. À ce moment-là, la
folle envie d’en acheter un, un désir si violent que j'avais même
envie de pleurer, m’a pris. J'ai regardé le prix. Ce n’était pas bon marché,
mais ce n’était pas exorbitant non plus. Je pouvais acheter si je sacrifiais mes
quatre milles yens. Un long moment s'est écoulé ainsi dans la boutique
silencieuse, et tout à coup, la raison m’a ramené à la réalité. Je me
suis demandé à quoi me servirait un stylo de verre puisque j’écris toujours sur
l’ordinateur. Je n’utilise presque jamais de stylo de bille, sauf lorsque je
prends des notes à l’université. Mais pourrais-je apporter un stylo de verre en
cours ? Je regretterais à jamais si je cassais un objet aussi précieux. J’avais l’impression que je pourrais écrire une jolie
lettre avec cette encre bleue, en imaginant la sensation de froid que me
donnerait le corps en verre, mais je n’avais personne à qui envoyer une lettre.
Si j’utilisais ce stylo de verre, pourrais-je écrire une belle histoire qui
toucherait tout le monde ? Ce n’était qu’une illusion. Je ne pourrais rien
écrire et quelques gouttes tomberaient de la plume sur le papier, en laissant
de minuscules taches insignifiantes.
Finalement,
je suis sorti sans rien acheter. Une paire de clochette en verre, attachée à un
poteau électrique tintait de temps en temps dans le vent. Quelques jours se
sont déjà écoulés depuis ce voyage. Je songe encore au stylo de verre que j’ai
vu dans une boutique de verrerie à Otaru, par un jour particulièrement ensoleilé de l’été.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire