dimanche 29 janvier 2017

Une semaine



Lundi ; Depuis le deuxième semestre, je n'ai pas de cours le lundi.
Je n'ai rien fait. Peut-être ai-je lu quelques magazines ou ai-je regardé des vidéos sur Youtube.
Mais en fait, je ne m'en souviens plus.
Il est comme une pièce blanche dans ma tête.
Peut-être aurais-je voulu  que demain ne vienne jamais.
Mais il est venu.

Mardi ; Lorsque je me suis réveillé, j'étais déjà las.
J'ai pris le bus comme d'habitude pour aller à l'université.
Je n'aime pas trop ma nouvelle professeur de latin.
Mon ancienne professeur était plus jeune, plus joyeuse telle une animatrice d'une émission pour enfants.
En plus elle avait des gros seins.
Ma nouvelle professeur est plus âgée, plus sévère, moins souriante.
Ses seins tombent sous l'effet de la gravité terrestre.
Elle nous donne plus de devoirs et nous fait passer plus fréquemment des contrôles.
Je ne déteste pas le latin.
Je l'apprécie plutôt.
Lorsque j'apprends le vocabulaire latin, je songe à la gloire et la décadence de l'Empire romain.
J’énumère chaque bataille de l'Empire que je connais dans ma tête.
Ces soldats hurlent comme orage de minuit.
Certains s’effondrent mais d'autres se relèvent.
Mais je sais qu'à l'avenir je n'utiliserai pas leur langue.
Alors cela me décourage un peu.

J'ai eu aussi le cours de littérature française.
La professeur de ce cours est aussi austère.
Sa haine envers les chewing-gums est profonde.
Elle a répété une trentaine de fois ''pas de chewing-gum'' durant le cours.
Je partage le même avis qu'elle.
Je n'aime pas les chewing-gums non plus.
C'est dégoûtant de mettre dans la bouche une chose qu'on ne peut pas avaler.
Lorsque je mâche du chewing-gum, je ressens comme si j'étais une vache qui rumine.
Après ce cours, j'ai fixé un rendez-vous avec mon partenaire de l'exposé.
Elle est italienne.
Mais on ne le devine pas facilement parce que lorsqu'elle parle français son accent est presque imperceptible.
C'est impressionnant car tous les autres Italiens que j'ai rencontrés avaient un accent italien qui chantait, sautillait, boulait en français.
Je n'arrive pas à me débarrasser de mon accent japonais.
Mon français est en fait mal rythmé et mal prononcé.
Mais que pourrais-je faire ?
Ça s’améliore, cependant il ne me quittera jamais.
Ainsi la malédiction de la langue japonaise me suit partout comme Jack l'Éventreur qui suit secrètement sa proie dans les ruelles.
L'Italienne est dix cent-mètres plus grande que moi.
Elle est souriante et gaie.
Je suis morose et dépressif.
Elle doit avoir beaucoup d'amis, le weekend elle doit aller voir son copain.
Je n'ai aucun ami, le weekend je ne veux voir personne.
Sa gaieté m'a rendu encore plus dépressif.
J'étais désolé pour elle que je sois son partenaire.
J'étais aussi désolé de ne pas connaître un seul mot chinois.

Mercredi ; Au matin, j'ai eu le cours de méthodologie.
Les étudiants doivent développer leur compétence en écriture.
La professeur nous a rendu des courtes dissertations qu'on avait faites la semaine dernière.
Mon français était déplorable.
J'ai déprimé.
J'ai commencé à m'amuser à déprimer.
J'avoue que je n'aime pas voire que je ne veux pas m'exprimer dans ma langue maternelle car comme j'ai déjà indiqué, je la considère comme une malédiction.
Mais si mon français est déplorable, dorénavant comment pourrais-je m'exprimer ?
J'en suis réduit à être muet.
Le voleur des voix s'est emparé de la mienne.

Je répète l'action d'ouvrir et fermer infiniment la bouche comme un poisson rouge dans un bol, toutefois aucun bruit n'en sort.

Jeudi ; je ne reçois toujours pas mon portable.
Pourquoi n'arrive-t-il pas ?
Où est-il ?
Il y avait une rumeur que tous les cours au Portique étaient annulés dû à la panne des chauffages.
Mais quand même j'y suis allé.
J'ai découvert qu'il y avait cours comme d'habitude.
Pas mal d'étudiants étaient absents cette fois-là.
La professeur a insisté que les cours n'étaient pas annulés et que c'était selon le choix des professeurs.
Mais ceux qui avaient cru que le cours était annulé n'étaient pas venus, alors c'était évidemment inutile de se plaindre à nous.
Pour finir son beau discours, elle a ajouté qu'elle s'était levée à 5 heures du matin pour venir à Strasbourg de Paris.
J'ai été touché de compassion à la vue de cette absurdité qui l'a infectée.
Ô la France ! Ta grandeur rend-elle les gens malheureux ?
Même la vitesse des TGV que nous offre la modernité ne dépasse pas les champs grandioses de l'Hexagone !
Cette professeur est aussi joyeuse, toujours de bonne humeur.
Elle a les cheveux blonds coupés au cou, son front est rond et beau comme la lune.
Son élocution est fluide et agréable.

La mélancolie me chasse comme si j'étais un prisonnier à exécuter.
La mélancolie est-elle devenue une part de ma personnalité ?
Personne n'y répond.

Vendredi ; La professeur du cours de littérature francophone africaine est âgée et a des rides qui me rappellent les traces de la pluie.
Ses cheveux sont tout noirs comme les miens.
Malgré son âge, elle est l'une des professeurs les plus dynamiques.
Ce qu'elle nous raconte m'égaye.
Ce jour-là, elle nous a parlé qu'Oscar Wilde avait été condamné aux travaux forcés à cause de son homosexualité.
(À l'époque, l'homosexualité était considérée comme véritable crime.
Donc, ceux qui pensent la même chose de nos jours viennent sans doute du XIX siècle ? )
Mais comme il n'y avait que des hommes dans la prison, notre professeur se demandait si cette mesure était vraiment efficace pour ''guérir'' son homosexualité, si ce châtiment, au contraire, ne lui avait pas plu.
J'ai souri pour la première fois pendant cette semaine.

Dans le couloir, j'étais heureux d'avoir un paquet de Kit-Kat.
J'aime le chocolat, j'aime les Kit-Kat.
Contrairement à la guerre, le chocolat rend les gens heureux.
Mais en même temps, je me doute qu'il y a des gens qui préfèrent la guerre aux chocolats.
Je l'ai ouvert pour en ingurgiter mais à cause de l'élan, j'ai répandu le contenu sur le plancher.
Mon bonheur s'est dissipé en un clin d’œil.
Je suis redevenu très vite malheureux à cause de ces putains de Kit-Kat.
J'ai dû les ramasser en subissant les regards hostiles des gens.
J'ai me suis senti comme si j'étais une prostituée qui ramassait de l'argent que son client lui avait jeté sur le sol.
Cependant une fille à lunettes s'est approchée de moi et elle m'a aidé à les ramasser.
J'ai essayé de lui dire ''merci beaucoup'' mais comme j'avais du snickers visqueux dans ma bouche, je n'arrivais pas à prononcer correctement.
J'ai maudit la viscosité du snickers.
Pourquoi un chocolat doit-il être gluant ?
Ce n'est pas de la colle !
Plus tard, j'ai regretté de ne pas lui en avoir donné un.
Mais c'était trop tard.
D'ailleurs je ne connais même pas son nom.

Le soir, j'ai vu mon partenaire italien.
Mais nous n'avions pas grand-chose à nous dire.
En plus, à ce jour-là, j'étais plus dépressif et plus renfermé que d'habitude.
Le présage de l'approche du printemps déréglait quelque chose en moi.
Après nous être dit au revoir, ma dépression était à son comble.
Il ne faisait pas encore nuit.
Le temps était suspendu entre le noir et le crépuscule.
Le ciel était étrangement rouge-bleu.
J'ai remarqué que c'était la même instabilité que représentaient les tableaux de René Magritte.
Je ne pensais plus rien, je ne ressentais plus rien.
C'était agréable.

Avant de rentrer chez moi, j'ai fait des courses à Simply.
(Sinon il n'y aurait rien dans mon frigo.)
À la caisse, j'ai vu un homme petit et obèse dont le nez était immense parlait fort à la caissière.
Il faisait un sourire très amical en montrant ses dents jaunâtres.
Quelques dents étaient manquantes tel un vieux peigne.
Comme il criait presque, tout le monde entendait son discours.
Mais ce qu'il disait était incompréhensible.
Peut-être son langage était-il compréhensible de lui seul.
Venait-il d'une autre planète ?
Finalement, un gardien noir robuste et grand est venu, l'homme de l'espace a été emmené quelque part.
Même après qu'il eut disparu, on entendait ses cris au loin.
J'étais impressionné car c'était la première fois que je voyais un homme de l'espace.

Samedi ; j'ai fini de lire ''Hier'' d'Agota Kristof.
L'histoire était sombre comme ses autres romans que j'avais déjà lus.
(''Le grand cahier'' ''La preuve'' ''Le troisième mensonge'')
Agota Kristof est déjà décédée, sa peronnalité ressemblait-elle à la mienne ?
On ne sait pas.
Peut-être un peu.
La simplicité et le mystère de son écriture me plaisent.
Ses récits ont toujours quelque chose d’irréel.
Les lieux qu'elle décrits semblent exister quelque part mais en réalité indéterminables voire inexistants.
C'est en effet ce que je ressens toujours.
Je ne sais pas où aller.
Je ne sais pas où j'étais.
Je ne sais pas où je suis.
Mais j'ai l'impression que les personnages meurent un peu trop facilement dans ses romans.

samedi 28 janvier 2017

Hier


Hier tout était plus beau

la musique dans les arbres

le vent dans mes cheveux

et dans tes mains tendues

le soleil


Agota Kristof

mercredi 25 janvier 2017

Les femmes sont-elles magiques ?

Lorsque j'étais à Paris, j'habitais une résidence qui se situait en banlieue.
Ce n'était pas un quartier chic, mais pas violent non plus.
En bref, c'était un quartier médiocre qu'on peut trouver partout dans le monde.
Une station de métro, des HLM, un centre commercial, des bistros que fréquentent les gens locaux etc.
À cette époque-là, je fréquentais une école de langue à Châtelet.
Les professeurs (c'était tous des femmes) étaient sympathiques.
J'étais à l'aise mais les cours étaient trop faciles et m'ennuyaient.
La directrice était une Japonaise qui s'était mariée à un Français.
Il y avait une photo de ses deux fils à l'accueil.
L'un ressemblait à un Japonais.
L'autre ressemblait à un Français.

En réalité, je détestais Châtelet.
C'est l'un des quartiers les plus déplaisants à Paris.
(Bien sûr, ce n'est que mon avis personnel.
Même si vous l'adorez et vous le fréquentez tous les jours pour respirer son air à pleines poumons, je n'ai rien contre.)
Comme elle se situait au centre de Paris, la gare Châtelet les Halls avait de nombreuses correspondances.
Si bien qu'elle était toujours bondée de foule.
Les gens me bousculait, marchaient sur mes pieds si je m'arrêtais au milieu.
Un moment donné, j'ai entendu un claquement de langue derrière moi.
Il sentait l'odeur d'urine car il y avait des mendiants qui y vivaient.
L'architecture singulière me déplaisait autant.
Les centres commerciaux qui se trouvaient dedans représentaient un symbole monstrueux du capitalisme.
Ces magasins de chaîne faisaient tous des produits similaires.
Un jour, un être-humain fera-t-il aussi partie de leurs produits ?

À ce moment-là, j'avais un ami qui y habitait.
Après les cours, il m'invitait souvent gentiment chez lui.
Il habitait avec sa copine dans un studio d'un appartement.
Son studio était très étroit à cause de l'inondation des livres et des DVD, mais quand même agréable.
Il y avait une salle de bain et une cuisine simple.
Par la seule fenêtre, on pouvait voir les gens aller et venir comme le courant d'une rivière.
D’où venaient-ils ?
Où allaient-ils ?
Je voulais interroger chaque passant mais ils avaient tous l'air occupés, voire chassés par quelque chose d'effrayant.
Que faisons-nous dans ce temps là ?
Pas grand-chose.
Nous étions deux casaniers.
On a seulement bavardé ensemble en prenant quelques verres de vin.
Les sujets étaient souvent la politique, la France ou sinon le Japon.
(mais je ne voulais pas parler sur le Japon.
Je voulais l'effacer de ma tête lorsque j'étais en France.
J'imaginais une carte mondiale où rien ne se trouverait à côté de la Chine...que de vaste mer )
ou la vie, l'amour.
Il était obsédé par les femmes.
Il en a connu énormément.
Je n'en ai connu aucune.
Le mot ''amour'' me causait toujours une légère nausée.
Je ne voulais pas être nu devant une femme.
Je ne voulais pas voir une femme nue.
Mais j'aimais les jolis visages et les longs cheveux.
Peut-être que ne veux-je pas que quelqu'un s'introduise en moi ?
Après nos discussions, de temps à autre, nous allions au bistro.
Une fois, il a amené un ami français d'origine indienne.
Il avait l'air triste et semblait maudire le monde.
Peut-être ne m'aimait-il pas ?
Plus tard, il m'a expliqué que cet ami indien avait changé depuis qu'il avait divorcé de sa femme.
Elle était une belle blonde, mais couchait avec n'importe quel homme.
Alors qu'ils avaient un fils, elle ramenait souvent un autre homme chez eux.
Après l'arbitrage, elle s'est emparée de sa fortune et de son fils
( C'est souvent le cas.
La femme est souvent plus avantagée que l'homme à l'égard de l'autorité parentale.
Souvenez-vous du film ''Kramer contre Kramer'' !
Ému par les larmes de Meryl Streep, le juge lui cède !)
C'est ainsi qu'il a tout perdu et est devenu alcoolique.
Depuis lors, il buvait même au bureau.

Dans un vieux film de François Truffaut, il y a une scène où Jean-Pierre Léaud demande à Jean-Pierre Aumont

''À votre avis, est-ce que les femmes sont magiques ?''

Après quelques réflexions(sans doute il devait songer aux femmes qu'il avait rencontrées dans sa vie), il lui répond,

''Certaines, oui. D'autres, non, non...''

Donc, certaines femmes sont en effet magiques.

La noyée (2)

Tout-à-coup, un désir violent de la posséder l'a envahi.
Le fait qu'elle n'était plus vivante l'a étrangement excité.
Après le vol de son âme, son corps s'était transformé en un objet.
Maintenant ce n'était qu'une masse de plusieurs organes dont le fonctionnement était complètement arrêté.
C'était un objet, telle une statue antique.
C'était une sculpture qui représentait une plénitude absolue, l'essence d'un moment précieux, qui était pétrifié à jamais.
Il l'a imaginée dans son appartement.
Il l'entreposerait dans une vitrine.
Ainsi, il pourrait vivre avec elle jusqu'à sa mort.
Il lui dirait bonjour chaque matin.
Il lui dirait bonne nuit lorsqu'il irait se coucher.
Mais cette idée était ridicule car c'était un cadavre.
Cela impliquait qu'elle pourrirait de jour en jour dans la vitrine.
Elle se déformerait peu à peu, son sourire magnifique serait lui aussi ingurgité par les innombrables vers.
Ce ne serait finalement qu'une masse grotesque de chair et de liquide.
Mais pour l'instant, c'était une fille dont le visage lui adressait immuablement un sourire doux.
Depuis qu'il l'a découverte tout à l'heure, cette expression angélique qui était remplie de bonheur n'a nullement changé.
L'instant où elle a esquissé ce sourire éthéré était rendu éternel par une force surnaturelle.

La noyée était vêtue d'une blouse ornée de volants.
Lorsqu'elle était vivante, sa blouse avait été impeccablement blanche, comme la neige lorsqu'elle venait tout juste de tomber.
Maintenant sa toilette était tachée de multiples souillures d'égout, de terre, d'herbe du fond du fleuve.
Sous la lumière nocturne de Paris, sa blouse émettait une faible clarté jaunâtre.
La blouse qui avait absorbé l'eau était devenue transparente et collait à la peau de la fille.
Au travers, il voyait l’entièreté de son corps nu.
Sa nuque gracile, ses seins plutôt discrets mais d'une bonne forme qui lui rappelaient deux pamplemousses.
Une dune blanche en pente douce se trouvait entre ses cuisses.
Ses longues jambes étaient écartées d'une manière libre en laissant tout son poids à la gravité terrestre.

Il céda finalement au désir sexuel.
Il frôla de ses doigts le profil de la noyée.
La courbe de son visage était aussi lisse que celle de la lune.
Passant par son cou, ses doigts descendirent jusqu'à sa poitrine.
La rigidité cadavérique envahissait petit à petit la fille.
Il sentait la peau froide et rigide comme le marbre contre sa paume.
Avec l'index, le majeur et l'annuaire, il est descendu jusqu'à la dune croissante.
En sentant encore une touche quelque peu élastique, ses doigts ont finalement cessé la descente au genou.
Au comble du bonheur, il a versé quelques larmes.
Ces larmes sont tomés dans l'interstice imperceptible entre les lèvres supérieure et inférieure de la noyée puis ont disparu à jamais dans l'abysse.

Toutefois, en même temps il était écoeuré.
C'était un écoeurement si fort qu'il n'en avait jamais ressenti de tel.
L'odeur qui montait de la Seine lui provoquait une nausée aussi féroce que son avidité sexuel était violent.
Il avait envie de vomir.
Il voulait complètement vider son estomac.
Malgré plusieurs tentative, rien n'est monté dans son œsophage.
Tout ce qu'il a pu verser étaient des larmes et du suc gastrique acide.
Il ne supportait plus cette situation à laquelle il était condamné.
Entre la paradoxe d'un sentiment de bonheur et de cette nausée atroce, son être était sur le point de se déchirer.
Avant d'appeler la police, il a embrassé la noyée.
L'odeur désagréable d'un poisson pourri a rempli sa bouche, puis est sortie par ses narines.
Lorsqu'il en est séparé, il a soudainement ressenti une montée de vomi.
Il s'est levé et a couru à la rive.
Il a rendu tout ce qu'il y avait dans l'estomac.

lundi 23 janvier 2017

La noyée


C'était un soir en 1900 à Paris.
Un homme se promenait seul le long de la Seine.
Il aperçut soudainement un objet étrange dans la Seine.
Cet objet était échoué sur la rive opposée à celle qu'il longeait.
Ayant été balancé par les vagues douces, il oscillait lentement et paisiblement.
Il était blanc.
De loin, il était semblable à une méduse.

Était-ce le débris d'une ombrelle ?
Non, une ombrelle devait bien avoir des ossatures.
Était-ce un chapeau feutre ?
Non, il n'y avait pas de chapeau aussi grand.
La lumière des réverbères était trop faible pour l'éclairer.
Il ne voyait que très vaguement.
Les quelques personnes qui se baladaient autour de lui ne s'en étaient pas rendus compte ou du moins, ils étaient indifférents.
Il entendit au loin les cris d'un fou insomniaque qui semblait s'adresser à lui-même.
La nuit était déjà tombée.
Il essaya de se débarrasser de la présence de cet objet étrange dans sa tête.
Mais plus il essaya de l'oublier, plus sa curiosité s'élargissait sans cesse.
Il décida finalement d'aller le vérifier.
Pour s'en rapprocher, il descendit par l'escalier.
Une mauvaise odeur sortait de la Seine.
En s'approchant peu à peu, son cœur battait de plus en plus rapidement.
Il commençait à sentir mal.
Il voulait vomir.
Mais maintenant il lui était impossible de rentrer chez lui sans l'avoir vu.
Il reconnu d'abord une masse de cheveux noir de jais.
Il réfléchit quelques instants puis se rendit compte que c'était une femme.
C'était le cadavre d'une noyée.
''Elle'' se couchait à plat ventre.
Sa partie inférieure du corps était dans l'eau glaciale de la Seine.
Il ne voyait donc pas son visage.
Il frôla de ses doigts son épaule frêle.
Sa chair morte était si souple qu'il crut qu'elle s'effriterait en un coup.
Sa peau qui avait absorbé l'eau était aussi transparente qu'il vit même ses veines bleuâtres.
Curieusement, il n'eut pas peur.
Le temps s'était arrêté autour de lui.
Il était submergé par un sentiment de bonheur, comme s'il venait de retrouver une amante qu'il n'avait pas vu depuis longtemps.
Il avait hâte de découvrir son visage.
Il glissa son bras sous sa poitrine, la renversa ensuite tout en soutenant le poids de son corps.
La noyée lui souriait.
Il fut ému par ce sourire angélique qui l'attendait.
Il ôta le sable parsemé sur son visage, puis débarrassa son front de ses cheveux mouillés et collants, pour dévoiler ses traits.
Il la contempla longuement comme s'il admirait une statue grecque.
Ses yeux étaient clos, son nez dessinait un trait droit tel une allée.
Sa lèvre supérieure légèrement retroussée esquissait un sourire harmonieux avec l'inférieure.
Il s’efforça de tirer son corps de la Seine, cependant, elle était alourdie par l'eau.
Si bien qu'il tomba en arrière, couvert par la dépouille de la fille.
Il senti le parfum sucré de celle-ci, mélangé à la mauvaise odeur d'égout de la Seine.

dimanche 22 janvier 2017

Le rideau



Je me suis rendu compte que j'ai confondu l'horaire de deux cours.
Celui de la littérature française et celui de latin.
Si bien que je suis arrivé à l'université vers dix heures du matin, deux heures d'avance que le cours d'anglais du midi.
C'est ainsi que j'ai perdu le droit de faire la grasse matinée.
Je n'avais rien à faire.
Je ne voulais pas rester dehors car il faisait froid à l'extérieur.
Un vent glacial pénétrait dans mon manteau.
Je suis donc entré dans la bibliothèque.
Elle était déserte et chauffée.
Il n'y avait que très peu de monde.
Certains travaillaient sur l'ordinateur.
D'autres lisaient.
Quelques-uns s'assoupissaient sous le soleil du matin.
Ce jour-là, le vent était glacial mais le soleil était agréable.
Je voyais les bribes de ciel bleu telle la lumière fuyante d'une porte entre-ouverte.
En cette lumière chaleureuse, j'ai perçu le parfum du printemps.
Le printemps s'approchait petit-à-petit.
Cette nouvelle que m'a apporté le temps m'a secrètement réjoui.
Ce petit signe marquait ma peau d'ombres jaunâtres.
J'ai tiré un livre que j'étais en train de lire de mon sac.
Ce livre s'intitulait ''L'insoutenable légèreté de l'être''.
C'est un livre connu car j'en avais déjà entendu parler.
Mais c'était la première fois que je lisais une oeuvre de cet auteur.
Celui-ci me plaisait.
L'écriture était fluide.
Contrairement à la pesanteur du sujet philosophique, c'était vraiment agréable à lire.
Dans le chapitre que je parcourais, Tereza était redevenue serveuse d'une brasserie.
Thomas était devenu laveur de carreaux alors qu'il était chirurgien qualifié.
Ce livre allait être probablement classé comme histoire d'amour.
Ce n'est pas faux...
On pourrait le considérer comme histoire d'amour.
Mais selon moi, c'est plutôt une histoire sur l'être comme indique le titre.
L'amour n'est qu'un vecteur qui incite le lecteur et les personnages à faire une réflexion sur leur être.
L'être...

''Être'' est le premier mot français que j'ai appris.
Ce mot fut le début de la nature et de la langue.
Sans ce verbe, rien ne naît.
''Je'' n'existe pas sans ''être''.
''Je'' dois être toujours suivi de ''suis'' et tous les autres verbes insinuent la présence de l'être.
Par contre, être doit être l'un des verbes les plus difficiles à définir.
Nul ne sait ce que c'est.
Je considérais personnellement que mon être était caractérisé par sa fragilité et son instabilité.
Car il me manque la sensation de réalité.
Lorsque je me promène, je ressens toujours la présence d'un rideau invisible et impalpable, qui me sépare du monde extérieur.
J'imagine dans ma tête une scène où une voiture fonce tout à coup sur moi.
C'est une voiture tout ordinaire qu'on voit partout.
Peut-être le chauffeur avait-il pris de l'alcool ou était-il mort d'une crise cardiaque en agrippant le volant, peu importe.
Elle fonce tout à coup sur moi, d'une manière absurde et imprévisible.
Je n'ai pas le temps de fuir.
Elle m'écrase atrocement.
Mes entrailles volent dans les airs.
Je ne serais plus vivant.
Malgré le fait que ça peut m'arriver (un tel accident peut arriver à n'importe qui), je ressens toujours la sensation d'être ailleurs.
Alors que je reconnais mon visage ensanglanté, je me dis que non, ce n'est pas moi...
C'est en fait une tentative d'obtenir une sensation du réel mais qui échoue toujours comme si une plume légère tombait de ma main.
Pour aborder un autre exemple, lorsque quelqu'un m'adresse la parole, j'ai toujours l'impression que cette personne parle à quelqu'un d'autre.
Pourtant mon corps y répond automatiquement.
Alors où est mon âme?
Cette dualité incompatible entre le corps et l'âme, mon moi et le monde extérieur me déchire plus brutalement qu'une voiture qui m'écrase.
C'est un écrasement sans déformation corporelle ni hémorragie.
Lorsque mon être est transparent, cette déchirure est aussi invisible.
Mais ai-je essayé de chercher le moyen d'ouvrir ou de couper ce rideau ?
Peut-être que non.
Car je sais que le rideau appartient au monde extérieur, alors cette recherche reste forcément vaine.
Ce rideau fin tel la cornée d'un œil est, d’un autre point de vue, un protecteur de mon être.
Parce qu'en même temps je ressens que mon être est menacé par l'extérieur.
Lorsque ce rideau disparaît, regagnerai-je ma propre sensation du réel ?
Ou disparaîtrai-je ?
La question la plus fondamentale est la suivante ; souhaite-je m'en débarrasser ?
Dans cette accumulation d'incertitude, j'en suis réduit à flotter entre quelque part et nulle part, ici et ailleurs.

Les Aïnous


Beaucoup de monde, même de nombreux Japonais croient que le peuple japonais est homogène.
Il est difficile de répondre à cette question quand on n'est pas spécialiste en ethnologie.
Cependant, pour aborder un autre sujet plus certain, la langue japonaise n'est pas instituée comme langue officielle du Japon.
C'est juste une langue que la plupart des Japonais utilisent dans l'Archipel.
De même, aucune ville n'est déterminée comme capitale du Japon.
Finalement, l'hymne japonaise a été instituée en 1999.

En réalité, une autre langue en dehors de la langue japonaise existe au Japon.
L’aïnou.
Malheureusement, de nos jours, c'est une langue en voie de disparition.

Comme je suis originaire d'Hokkaido, je suis bien familier avec leur culture (qui ne s'expose que dans les musées de nos jours).
Ceux qui parlaient cette langue étaient les Aïnous.
Dans le domaine de l'anthropologie, ils sont considérés comme descendants directs des premiers autochtones japonais (Jyo-mon-jin).
Les Aïnous sont toujours restés en Hokkaido.
Mais en 1869, l'ethnie japonaise a commencé à s'installer sur l'île d'Hokkaido.
C'était une politique gouvernementale pour faire opposition à la Russie.
Par conséquent, l’île d'Hokkaido a été complètement conquis par les Yamatos.
Les Aïnous ont été obligé de s'inscrire dans l'état civil japonais.
Depuis lors, ils ont fait l'objet de racisme.
Les Yamatos les ont appelés ''Dojin (inculte)'' et chassés de leurs terrains.
En outre, la pêche et la chasse, qui étaient leur principaux moyens de subsistance, ont sévèrement été restreintes.
Les écoles pour ces ''Dojin'' ont été construites partout en Hokkaido, leur éducation a été effectuée en japonais.

Aujourd'hui, il n'existe plus d’Aïnou pur.
Il est établi que tous les Aïnous sont mélangés avec les Yamatos.

J'aime personnellement la sonorité des mots aïnous.
Les Aïnous n'avaient pas d'écriture (comme les Japonais avant l'importation des kanjis de Chine).
Leur langue a donc été conservée par oral (jusqu'à l'époque moderne).
Une multitude de noms des lieux d'Hokkaido vient de l’aïnou.
Par exemple, ''Sapporo'' vient de ''Sat-poro-pet (une grande rivière sèche), ''Shiretoko'' vient de ''Sir-etok''(la fin du monde).
''Toyohira'' vient de ''Tuye-pirc''(une falaise effondrée).

Le mot ''Aïnou'' désignait ''l'homme'',
Dieu était ''Kamuy''
Yamato était ''Sisam''
Le Macareux huppé(une espèce d'oiseau marin) était appelé ''Etopirika''

jeudi 19 janvier 2017

Dans le placard

Pendant les vacances, je n'ai rien fait.
J'ai flemmardé toute la journée, tous les jours.
Je ne voyais personne.
Lorsque j'ai le droit d'être seul, pourquoi dois-je voir des gens ?
Je ne comprends pas les gens qui ne supportent pas d'être seuls.
Ou alors peut-être que je suis différent et que je ne ressens pas le manque d'avoir de la compagnie auprès de moi contrairement aux autres.
Parce qu'il est difficile de comprendre certaines émotions de l'être-humain.
L'amour m'est déjà d'abord incompréhensible.
Je ne pense pas que je sois déjà tombé amoureux de quelqu'un.
Que diffère un sentiment d'amour d'un simple attachement ?
On n'apprend pas l'amour à l'école.
C'est une chose qui est déjà incrustée dans l'instinct de l'homme.
Cependant, il semble qu'on a oublié de le mettre en moi lorsque je suis né.
Lorsque l'on n'a pas de sentiment d'amour, le rapport sexuel semble encore plus étrange.
Cela dépasse même la limite de l'étrangeté.
Cela m’effraie.
Je décide intérieurement à ne pas m'approcher de ce monde défendu.
Je tremble de peur avec mon chat dans le placard obscur.
Mais j'entends des souffles haletants d'un homme et d'une femme.
Leurs souffles sont rythmiques comme une musique africaine.
Je ferme mes yeux, je couvre mes oreilles de mes mains.
Mon chat fait le même geste que moi.

Le chat

Pendant les vacances, plus de cinquante huîtres sont entrées dans mon estomac et ont fondu.
J'ai ouvert une trentaine de canettes de bière et une vingtaine de bouteilles de vin.
J'ai dormi quand j'ai voulu m'éteindre, je me suis réveillé quand j'ai voulu m'activer, tel un ordinateur.
De temps en temps, je suis sorti de ma chambre pour jouer avec des chats qui habitaient dans ma résidence.
Un est gris et gros, l'autre est blanc et plutôt mince.
Lorsque je suis allé les voir, le gros dormait comme d'habitude.
Il a poussé un léger gémissement pendant que j'ai caressé sa tête.
Le petit est plus actif.
Il était occupé à regarder l'espace quand je l'ai visité.
Que voyait-il ?
Alors qu'il n'y avait rien de particulier.
Que pensait-il ?
Une  de ses oreilles était ébréchée en forme de croissant.
Si j'étais son maître, je le nommerais ''croissant''.
Il était affectueux.
Aussitôt que je m'en suis rapproché, il a commencé à frotter sa tête contre mes jambes.
Pendant que je lui ai caressé la tête, il s'est couché et m'a montré le ventre comme s'il me demandait de le caresser davantage.

mercredi 18 janvier 2017

Les arbres de Montmartre


Mon téléphone portable est à l'agonie.
Il a eu un problème au port de rechargement.
Comme une vieille dame démente qui ne reconnaît pas son fils, mon iphone 5c n'a pas reconnu son chargeur.
C’était triste.
Si bien que la batterie s'est épuisé peu à peu, elle s'est finalement complètement vidée.
L'écran s'est éteint comme s'il disait au revoir à tout le monde.
Depuis lors, il n'émet aucun bruit, il ne bouge plus.
Est-il mort?
On pourrait, en effet, le considérer mort mais je dirais plutôt qu'il est en état de léthargie.
Parce que si on répare son chargeur, il ressuscitera comme Jésus Christ.
Je n'ai donc pas fait ses funérailles.
Je le laisse tranquille.
Peut-être est-il trop fatigué.

Ça fait plus de trois ans que je l'utilise.
Je me souviens clairement que je l'ai acheté dans une boutique Orange qui se trouvait dans le quartier de l'Opéra à Paris.
Cette boutique doit exister encore au même endroit.
Je me souviens aussi d'un employé qui m'a accueilli.
C'était un homme petit avec la peau brunâtre.
Il était sans doute d'origine arabe.
Il était sympathique mais étourdi, car quelques jours plus tard, il m'a demandé de revenir au magasin pour signer un contrat qu'il avait complètement oublié.

Paris est en effet une ville mixte.
Certains y vivent en tant qu'étudiants.
Certains y travaillent en tant qu'immigrés.
Certains l'ont visité juste pour faire du tourisme.
Il y a même ceux qui ont fui la guerre.
La ville magnifique de Paris me plaisait, mais en même temps, elle me rendait petit à petit instable.
Je ne me sentais pas en sécurité à Paris.
Autrement dit, je n'étais pas à l'aise.

Un jour, un groupe de filles m'a entouré pour me voler.
Elles étaient jeunes, pas laide, mais habillées à moitié comme des SDF.
Peut-être que si elles avaient été mieux habillées, elles auraient pu être plus belles.
Je leur ai finalement échappé.
Je ne me suis rien fait voler.
Ces filles ne m'ont pas irrité.
Mais elles m'ont rendu triste et misérable.

Dans un RER, je voyais souvent une mère et un petit garçon qui faisaient la manche.
Une telle scène m'a pincé le cœur.
Mais je ne leur ai pas donné de monnaie.
Car de tels mendiants, il en existe partout à Paris.
Si je donnais de la monnaie à chaque mendiant, un jour, ce serait moi qui devrais mendier.

J'ai souvent vu des gens s'engueuler à Paris.
Un soir, je rentrais tard et dans le métro, un homme noir et deux hommes pakistanais (peut-être pakistanais, je ne suis pas certain) se sont tout à coup mis à s'engueuler juste devant moi.
Je ne sais pas ce qui leur est arrivé.
Peut-être la cause était une chose insignifiante telle que l'un des Pakistanais ait marché sur le pied de l'homme noir.
L'homme noir les menaçait en français avec un accent africain.
Un Pakistanais essayait de lui répliquer mais comme il n'avait pas suffisamment de connaissance en français, il en était réduit à bégayer.
L'autre Pakistanais tentait de les apaiser.
Et moi, je les regardais.
Puis je suis descendu car le métro était arrivé à ma station d'arrivée.
L'autre jour, je me promenais à Montmartre avec une amie française.
C'était une vraie Française.
Elle était fière d'avoir des ancêtres nobles (dont quelques-uns ont été guillotinés lors de la Révolution française).
Près du Sacré-Cœur, un homme immigré, probablement sans papier, a enroulé adroitement un bracelet brésilien autour de son doigt.
Cette scène était ridicule.
Il essayait de nous (surtout à elle) vendre ses bracelets brésiliens.
Elle lui disait ''Je suis française ! '' sans aucun accent.

Après nous en être échappé, nous avons regardé, de la colline de Montmartre, la ville de Paris.
Nous voyions les Invalides, la Tour Eiffel, la Tour Montparnasse...
J'ai vu de la fumée monter depuis des agglomérations.
Mais je ne voyais pas mon appartement.
Il était trop loin.
Il était dissimulé par les autres bâtiments.
Ce fut à ce moment-là que je me suis rendu compte que tout le monde était étranger à Paris.
C'est une ville où je perdais mon identité.
Les regards des gens se croisaient, mais rarement se rencontraient.


Au revoir aux jours de débauche



Les jours de débauché se sont terminés.
Maintenant je dois me lever tôt chaque matin.
En somnolant je bois une tasse de café, puis je m'habille, je sors et je prends le bus.
Ce matin il faisait un froid particulièrement glacial.
Le froid s'introduisait dans mon manteau en dévorant mes os.
Malgré cette rigueur d'hiver, le bus n'est pas venu tout de suite.
J'ai attendu environ dix minutes.
Ces dix minutes me semblaient quasi éternelles.
À ma droite, il y avait un garçon noir élancé.
Une lumière douce d'un réverbère cernait son profil.
Il mettait des écouteurs aux oreilles.
Il frissonnait légèrement.
À ma gauche, il y avait une fille petite blonde.
Elle était si blanche que je voyais ses veines bleuâtres à travers sa peau presque transparente.
Elle frissonnait aussi légèrement.
Dans le bus, j'ai songé à un lit.
Un lit aussi douillet qu'une masse de duvets.
Ce lit qui est modérément chauffé et prêt à m'accueillir.
Je voulais m'effondre tout de suite dans ce lit imaginaire.
En réalité j'étais assis sur un siège âpre du bus.
J'avais mal aux fesses.
Il me semblait même absurde que ce bus ballottant n'était pas équipé de lits.
Si ce bus avait été équipé de lits, mon sommeil aurait été prolongé, je n'aurais pas été aussi maussade.
Dans la société, les lits se trouvent dans des endroits incroyablement restreints.
Ce sont les hôpitaux, les maisons, les hôtels.
C'est tout.
Ce fait signifie-t-il que l'homme n'est pas fait pour dormir hors ces lieux?
Selon moi, l'homme est un animal intrinsèquement menteur.
Alors qu'ils sont tous amoureux de lits, ce qu'ils ont déposé dans les bureaux, dans les écoles sont des tables et des chaises dures.
De temps à autre, une table peut tuer.
Si quelqu'un heurte la tête contre le coin d'une table violemment, son crâne pourrait se briser.
Au pire des cas, cette personne meurt.
Par contre on ne meurt pas en bousculant la tête contre un matelas.

Une université anglaise a fait des recherches sur le rapport entre le lit et le stresse.
Selon cette étude, au cas où le bureau d'une entreprise aurait fourni des matelas et des oreillers moelleux, le stresse des employés serait réduit à 60 pour-cent.
C'est un mensonge que j'ai crée à l'impromptu.
Voilà, une preuve que l'être-humain est un animal qui ment.

Je me suis souvenu d'une chanson des Beatles qui s'intitulait ''I'm only sleeping''.

When I wake up early in the morning...

Lift my head, I'm still yawning...

When I'm in the middle of a dream...

Stay in bed, float up stream...

lundi 16 janvier 2017

La serviette bleue



Ma serviette préférée est en tissu-éponge.
Ça fait plus de six ans que je l'utilise.
Au début je l'utilisais en tant que serviette de bain.
C'était une serviette tout ordinaire, qui n'avait rien de particulier.
À ce moment-là, elle était bleu clair.
Elle était brodée d'une fleur.
Cette broderie est presque invisible maintenant.
Une nuit tropicale d'été de Tokyo, j'ai couvert sans raison mon oreiller de cette serviette.
Lorsque j'ai mis ma tête contre elle, j'ai ressenti un confort indescriptible.
Elle n'était plus une serviette de bain ordinaire.
Cette nuit mémorable, j'ai dormi pour la première fois avec elle, en sentant le parfum du vent de nuit et son toucher contre ma peau.

Depuis ce jour-là, j'ai pris l'habitude de me la mettre autour du cou lorsque j'étais chez moi.
Quand on est habillé, le cou est souvent la partie nue du corps.
Ainsi j'ai pu toujours sentir son toucher.
Je ne la mettais pas dehors parce que s'il y avait quelqu'un qui se promenait avec une serviette autour de son cou, les gens se moqueraient de lui.
J'ai préféré garder notre secret intime et non ostentatoire.

Un jour, j'ai voyagé.
Bien sûr, j'ai apporté ma serviette.
Sans elle, comment pourrais-je dormir?
Mais la tragédie a eu lieu.
Peut-être étais-je inconsciemment excité.
Lorsque j'ai quitté l'hôtel, je l'ai laissée dans ma chambre.
Je ne m'en suis pas rendu compte avant d'être rentré à Tokyo.
En fouillant mon sac dans mon appartement, mon angoisse se gonflait telle un ballon.
J'ai paniqué en comprenant que je l'avais laissée dans l'hôtel.
Quel imbécile je suis !
J'ai crié.
Mon cri de détresse a retenti jusqu'au-delà de l'horizon.

La serviette n'était plus neuve.
À ce moment-là, elle était déjà usée car je ne cessais de la caresser.
Pour employer une expression plus directe, elle était sale.
Elle était devenue bleu-gris.
Cela insinuait la possibilité qu'un employé de cet hôtel pourrait la jeter comme une ordure.
Je l'ai imaginée jetée dans une poubelle avec de vraies ordures.
Cette idée m'a terrifiée plus que tout autre chose.

J'ai immédiatement téléphoné à l'hôtel.
Puis j'ai demandé au réceptionniste que s'il n'y avait pas une serviette oubliée.
C'est à ce moment que j'ai cru à la présence de Dieu.
Il m'a dit que oui.
Ayant été rassuré, j'ai poussé un soupir.

Quelques mois plus tard, j'ai déménagé en France.
Le jour du départ, je l'ai mise dans mon sac.
Dans l'avion je voulais l'ouvrir et en tirer ma serviette pour sentir son toucher contre mes joues mais j'ai du patienter pendant le trajet de douze heures.
Son absence m'a rendu insomniaque.
Pendant que la plupart des passagers dormaient, j'ai été forcé de lire un livre pour passer le temps.
Les passagers devaient sans doute rêver de la Tour Eiffel.
Je rêvais de ma serviette.

Après être arrivé dans mon appartement, j'ai ouvert mon sac avant ma valise.
Je l'en ai tirée.
Elle avait l'odeur de l'intérieur de l'avion.
Plusieurs mois se sont écoulés depuis mon arrivée en France.
Ma serviette s'est usée encore plus qu'avant.
Maintenant elle a même une petite déchirure à cause de mes multiples frottements.
Je ne sais pas combien de nuits je pourrais passer avec elle dorénavant.
Cependant, même si un jour elle me quitte, personne n'oubliera l'histoire de cette serviette bleu ciel.

dimanche 15 janvier 2017

Destination Paris-Montparnasse



J'étais dans le train pour Paris.
Mon RER y arrivait dans une heure.
Au début, le train était presque désert mais au fur et à mesure des passagers sont montés.
Les sièges de ce train étaient usés et partiellement abîmés.
Des mots d'insultes étaient grattés sur la vitre.
Je regardais la vaste prairie.
Seul le ciel bordait l'horizon.
À ce moment-là, j'ai perçu la grandeur de la France.
L'horizon semblait s'étendre infiniment.

Il y avait un groupe de filles qui bavardaient.
De temps à autre, elles riaient tout bas.
Le train s'est arrêté à Versailles.
Des passagers y sont montés.
Sous le ciel grisâtre de l'île de France, ils avaient l'air mélancoliques.
Honnêtement ils étaient mal habillés... comme des gangsters dans un film hollywoodien.
Leurs longues jambes étaient telle l'ombre allongée de crépuscule.
Un garçon s'est rapproché de moi et m'a dit qu'il avait besoin d'argent car il venait de sortir de prison, et qu'il voulait rentrer à Toulon où habitaient ses parents.
Je ne sais pas si toutes ces choses qu'il m'a racontées étaient vraies.
Il avait les yeux creusés, de sa bouche sortait une odeur désagréable.
''Je suis désolé...'' lui ai-je dit.
Il est partit aussitôt.
Où est-il maintenant ?
Je ne me souviens plus de son visage.
Lorsque j'ai levé les yeux, la prairie avait disparu.
Les HLM qui avaient exactement la même couleur que le ciel gris de Paris l'avaient remplacée.
Ces immeubles ressemblaient aux arbres morts.

''Destination Paris-Montparnasse...Paris-Montparnasse...''

Cette annonce signifiait que le train arriverait dans quelques minutes.
J'ai aimé cette manière de dire ''Paris-Montparnasse''.
Cette voix féminine était exclusivement neutre.
Elle ne manifestait aucune émotion.
Toutefois ce n'était pas une voix artificielle.
C'était évidemment la voix d'une femme qui avait un corps.
J'ai essayé de l'imaginer dans ma tête mais aucune image n'est venue à mon esprit.
Je suis devenu tout-à-coup triste.
Le train est entré dans le tunnel.
L'extérieur est devenu complètement obscur.
Les vitrines ont reflété l'intérieur du train tel un miroir.
C'était une apparition d'un monde parallèle.
Un monde qui n'existait que dans la réflexion du miroir.
J'ai vu mon visage dans la vitre.
Mais j'ai eu du mal à me reconnaître.
C'était un visage de quelqu'un d'autre, d'un homme que je ne connaissais pas.


samedi 14 janvier 2017

Yasuke, un samouraï noir


On ne connaît que très peu de choses sur sa vie mais c'est un personnage qui a réellement existé.
Son nom est Yasuke, le seul samouraï noir dans l'histoire japonaise.
L'histoire commence par la visite d'un jésuite italien, Valignano, au Japon.
À l'instar de la plupart des jésuites qui étaient au Japon à cette époque-là, son objectif était la propagation du christianisme.
Le 27 mars 1581, il eut une rencontre avec Oda Nobunaga, l'un des seigneurs les plus puissants de l'époque.
Lors de cet entretien, il avait amené un esclave noir d'environ vingt-six ans, mesurant un mètre quatre-vingt deux. (Une taille relativement grande par rapport aux Japonais.)
N'ayant jamais vu un homme noir auparavant, le seigneur japonais qui était connu pour sa cruauté, a cru que cet homme s'était peint le corps en noir.
Dubitatif, Nobunaga lui a ordonné de prendre un bain pour voir si sa couleur de peau était naturelle.
Sa couleur de peau n'a pas changé, au contraire, la noirceur de sa peau a semblé être encore plus foncée sous la lumière brillante du soleil.
Nobunaga fut finalement convaincu que sa peau noire était naturelle.
Il était très intéressé par cet étranger.
Il a finalement demandé au missionnaire de le lui offrir.
Après leur accord, Nobunaga a surnommé cet homme noir ''Yasuke'', puis lui a donné une position officielle de samouraï.
Ce fut la naissance du seul samouraï noir.

Cependant le destin est atroce.
Malgré le fait que Nobunaga était sur le point de dominer tout le Japon, il reçut une attaque-surprise et succomba le 21 Juin 1582.
Cette attaque était projetée par son alter ego, Akechi Mitsuhide.
Il s'agissait donc d'une trahison.
Selon un document historique, étant réveillé par le tumulte, Yasuke a d'abord donné l'alarme au château et s'est ensuite battu contre l'ennemi.
Mais il fut finalement capturé.
La scène est décrite ainsi ;

''Après que l'homme noir qu'avait offert le missionnaire s'est battu longuement, un vassal de Mitsuhide s'en est rapproché et lui a demandé de donner son katana.
L'homme céda et lui passa.''

Sur place, Mitsuhide l'a libéré sous prétexte qu'il ne savait rien et qu'il n'était même pas japonais.
Après cette libération, aucun document concernant Yasuke n'a été découvert.
Il a littéralement disparu.

Une émission japonaise a fait des recherches sur lui.
L'équipe de cette émission s'est rendue au Mozambique, l'île qui était considérée comme le lieu de sa naissance.
Ils ont découvert qu'au Mozambique, il y avait une dance traditionnel dont le costume était similaire au kimono.
En plus, ce costume s'appelait ''Kimau''
Il y a en effet une similarité sonore entre ''Kimono'' et ''Kimau''
Toutefois, ce fait est trop faible pour être une preuve.
L'émission s'est terminé en présumant qu'après avoir perdu son seigneur, Yasuke était sans doute rentré dans son pays natal, où il transmit une part de la culture japonaise.

vendredi 13 janvier 2017

''L'extension du domaine de la lutte''


J'ai fini ''L'extension du domaine de la lutte'' de Michel Houellebecq.
C'est son premier livre.
J'ai connu cet écrivain français lorsque j'étais au Japon.
Un jour, mon professeur de français (C'est un homme français marié à une japonaise) m'en a parlé.
Le lendemain, je suis allé à la bibliothèque la plus grande de ma ville.
Le rez-de-chaussé était consacré aux livres en japonais.
Les livres en langues étrangères se trouvaient au premier étage.
Malheureusement la partie consacrée aux livres en français était relativement petite par rapport aux livres en anglais.
Franchement je ne pensais pas qu'il y aurait un livre de Michel Houellebecq.
C'était la bibliothèque d'une ville régionale.
D'ailleurs je n'avais jamais entendu le nom de cet écrivain.
Le nom ''Houellebecq'' sonnait étrangement pour moi.
C'est long par rapport aux noms tels que ''Hugo'', ''Camus'', ''Sartre''.
Je me suis demandé si c'était vraiment un nom français.
Dans un tel moment, je l'ai vu.

Dans une étagère poussiéreuse d'une bibliothèque régionale d'une ville du nord, un livre de Michel Houellebecq dormait.
Le temps l'avait jauni.
Mais chaque page avait l'air intacte.
Cela signifiait que ce livre n'avait pas été touché depuis longtemps.
Sur la couverture, il était écrit ''Les particules élémentaires''.

''Les particules élémentaires''....

J'ai répété ce titre dans ma tête.
Il y avait également une photo d'un homme mince ayant une cigarette à la main.
Sa veste me semblait trop grande pour son corps.
Son visage ne manifestait aucune expression.
Il semblait se méfier de tout.
Cet homme est probablement l'auteur.
Ça doit être lui, ''Houellebecq''.

La semaine suivante, j'ai montré ce livre à mon professeur.
Il était aussi surpris que moi que ce livre se trouve dans une bibliothèque de ma ville.
Il m'a dit qu'il n'appréciait pas du tout son style littéraire mais qu'il était connu en France.
S'il était autant méprisé, je voulais savoir pourquoi.
Ainsi, j'ai ouvert la première page des particules élémentaires.
Ce livre était difficile pour un apprenti du français.
En plus, à cette époque-là, mon niveau du français était plus bas qu'aujourd'hui.
Je n'ai donc pas tout compris, surtout les passages où le narrateur faisait une longue réflexion philosophique.
Mais j'ai quand même pu suivre l’entièreté du récit.
En bref, c'était horrible.
Ce livre atteignait l'extrémité de la vulgarité.
Il était pleins d'argots, d'insultes, d'expressions sexuelles et de temps en temps racistes.
Dans le monde il y a des livres sexuels, des livres remplis d'argots, des livres racistes, mais celui-ci comprenait à la fois tous ces éléments.
Cependant il était aussi certain que cette histoire avait quelque chose de touchant, quelque chose qui arrivait à faire trembler nos cœurs.
Lorsque j'ai terminé la dernière page, j'étais perplexe.
Je n'avais jamais lu un tel livre auparavant.

Je pense que c'est grâce à mon professeur que j'ai réussi DALF C1 (un examen officiel du français).
Avant de partir en France, il m'a prêté un livre de Houellebecq, ''La carte et le territoire''.
Il m'a dit qu'il ne m'en voudrait pas même si je le perdais.
Le livre était déjà usé.
Il l'avait lu dans l'avion pour le Japon.
Je l'ai lu dans l'avion pour la France.
Celui-ci était beaucoup moins vulgaire par rapport aux particules élémentaires.
C'est un livre qu'on peut recommander publiquement aux gens.
Celui-ci a reçu le Prix Goncourt en 2010.
Cette fois, j'ai cherché l'origine de l'auteur, au moment où l'extension de sa lutte a commencé.
Maintenant je me suis habitué à son style.
La vulgarité de l'auteur ne me bouleverse plus.
''L'extension du domaine de la lutte'' est un récit sans salut ni espoir.
J'ai eu l'impression que le protagoniste représentait l'auteur lui-même mais je ne peux pas l'affirmer.
Le héros est un informaticien d'un cadre moyen, dépressif et célibataire.
J'ai oublié si son âge était clarifié.
Mais son collègue, Tisserand avait 28 ans.
J'imagine donc qu'il devait avoir à peu près le même âge.
Tisserand est un homme obèse et laid, selon ce que le narrateur dit ''Il a exactement le faciès d'un crapaud-buffle.''.
Il cherche toujours à coucher avec une femme mais sa laideur rebute toutes les femmes.
Hors ce Tisserand, la misère qu'apporte la laideur est surtout focalisée dans ce livre.
Le narrateur avait une camarade qui s'appelait ''Brigitte Bardot'' au lycée.
Voici, c'est un extrait.

''Au moment où je l'ai connue dans l'épanouissement de ses dix-sept ans, Brigitte Bardot était immonde. D'abord elle était très grosse, un boudin et même un surboudin, avec divers bourrelets disgracieusement disposé aux intersections de son corps obèse. Mais eût-elle même suivi pendant vingt-cinq ans un régime amaigrissant de la plus terrifiante sévérité que son sort n'en eût pas été notablement adouci. Car sa peau était rougeâtre, grumeleuse et boutonneuse. Et sa face était large, plate et ronde, avec de petits yeux enfoncés, des cheveux rares et ternes. Vraiment la comparaison avec une truie s'imposait à tous, de manière inévitable et naturelle.''

Certes, c'est horrible mais c'est marrant.
D'abord parce qu'elle porte le même nom que l'actrice française légendaire.
Mais son physique en est presque l'opposé.
Ensuite parce que simplement la laideur fait rire quand on est un tiers.
Si Monsieur Pignon, incarné par l'acteur Jacques Villeret, était un bel homme, ''Dîner de cons'' n'aurait pas eu de succès.


Le titre vient évidemment de ce passage.

''...En système économique parfaitement libéral, certains accumulent des fortunes considérables. D'autres croupissent dans le chômage et la misère. En système sexuel parfaitement libéral, certains ont une vie érotique variée et excitante. D'autres sont réduits à la masturbation et la solitude.Le libéralisme économique, c'est l'extension du domaine de la lutte, son extension à tous les âges de la vie et à toutes les classes de la société.''

Il n'a pas tort.
De nos jours, beaucoup de monde a l'impression que le monde se divise malgré les vagues de la globalisation.
Même dans les pays puissants tels que la France, les États-Unis, les disparités sociales ne cesse de s'aggraver.
Je considère personnellement que le Bréxit et la victoire inattendue de Donald Trump sont les conséquences de cette extension du domaine de la lutte.
La fossé s'agrandissant entre les gagnants et les perdants devient de plus en plus visible.
Je ne fais sans doute pas exception car je suis aussi plutôt quelqu'un d'introverti, solitaire et célibataire.
Je partage un certain sentiment avec le narrateur.
Il a le sentiment que c'est comme s'il était derrière un rideau, comme s'il y avait une séparation absolue entre le monde extérieur et lui.
Ce livre a été publié en 1994.
Un après ma naissance.
L'année où la chute de l'économie japonaise se faisait ressentir jour après jour.
Toutefois le monde était plus uni qu'aujourd'hui.
C'est en 1993 que le traité sur L'union européenne (le traité de Maastricht) a été signé.
Il y avait quand même de l'espoir.
Ce livre était-il une sorte de prédiction sur le monde actuel?
Ou une telle situation était-elle déjà prévisible dans les années quatre-vingt dix?
Je venais de naître, je ne peux rien juger.
On verra, où ce libéralisme économique nous amènera dans l'avenir.



Le hurlement du vent




Je me suis réveillé tout-à-coup à minuit.
J'ai entendu la pluie taper violemment contre la fenêtre.
Ça a sonné comme si quelqu'un frappait à la porte.
Le vent hurlait, ébranlait les arbres et les maison comme s'il était enragé.
Je n'arrivais plus à me rendormir.

J'étais dans un bateau.
J'étais un marin solitaire naufragé.
Personne n'était autour de moi.
J'étais seul.
Les vagues s'acharnaient à avaler mon bateau.

Je me suis enfoui sous mes couvertures.
Le grondement du vent ressemblait à la voix d'un homme.
Une image d'un homme corpulent, souriant d'une manière sinistre est apparue dans mon esprit.
Cette image ressemblait à une vieille photo.
J'ai vu ses gencives étrangement écarlates entre ses dents jaunâtres.
Il s'approchait de plus en plus de moi.
Son sourire grotesque était figé tel un masque.

Ce matin lorsque je me suis réveillé, tout était calme.
Je n'entendais aucun bruit.
J'ai ouvert les volets.
La ville était comme à l'ordinaire comme si rien ne s'était passé la veille.
Malgré le hurlement du vent et la pluie battante, aucun arbre n'était tombé, aucun dégât ne s'était produit.
Puis j'ai vu par la fenêtre un homme essuyer soigneusement un carreau de sa maison.
Il me souriait.

Ein franko-phonischer Schriftsteller

Am letzen Freitag, habe ich eine französische Literatur Prüfung gehabt.

Es war morgens um acht Uhr.
Ich war noch schläfrig.
Genauer gesagt gab es zwei Prüfungen.
Eine war über französische Literatur, eine weitere war über ''Frankophonie''.

''Frankophonie'' ist ein Thema, dass schwierig auf Deutsch zu übersetzen ist.
Es bedeutet im groben, die Literatur auf französisch, die von Ausländern geschrieben wird.
Frankreich hat viele Kolonien gehabt, außerdem gibt es in Europa mehreren Länder, in denen Menschen französisch sprechen.
Wie Belgien, die Schweiz oder Luxemburg.

Es gab eine Frage, in der der Name eines franko-phonischen Schriftsteller erfragt würde.
Ich denke, dass der Professor einen afrikanische Autor erwartet hat weil wir in Kursen über afrikanischen Schriftsteller gesprochen hatten.
Er hatte uns gesagt, wir sollen zwei Bücher von franko-phonischen Schriftstellern lesen.

Ich habe leider keins gelesen.

Dann habe ich über darüber nachgedacht und mir fiel einer ein.

Amélie Nothomb !

Aber sie ist keine Afrikanerin, sie ist Belgierin.

Ich habe gedacht, dass es besser wäre als nichts zu schreiben.
Also habe ich ihren Namen aufgeschrieben.
Ich weiß nicht ob der Professor sie als eine franko-phonische Autorin anerkennt.

Ich war nach der Prüfung ein bisschen deprimiert.

Eine mündliche Prüfung

Heute hatte ich eine mündliche Prüfung in Englisch.
In einem Raum, waren ein Prüfer und ein französischer Student.
Der Prüfer war ein kleiner schwarzer Mann.
Der Student hat gesagt, dass er Film studiert.
Der Prüfer hat zu mir gesagt, dass ich meinen Namen auf Japanisch schreiben soll.

''Auf Japanisch?''
''Ja.''
''Warum?''
''Weil es mich interessiert.''

Dann habe ich meinen Name in sein Heft geschrieben.
Ich habe ihn erklärt, dass mein Name ''wilder Fluss'' bedeutet.
Er hat mir gesagt, dass er aus Afrika kommt und der Klang seiner Muttersprache dem Japanischen ähnlich ist.
Dann habe ich mit dem Filmstudent über unser Thema diskutiert.
Laut Thema waren wir Brüder und ich musste ihn überreden, Musikunterricht zu nehmen.
Ich mag mündliche Prüfungen nicht, weil ich eher ein ungeselliger Typ bin.
Ich wollte schnell wieder nach Hause !

jeudi 12 janvier 2017

Le sommeil


J'avais sommeil ce matin.
En fait, j'ai toujours sommeil.
Est-ce que cela a un rapport avec ma tension artérielle basse?
Je ne sais pas.
Mais selon ce dont j'ai entendu parler, ceux dont la tension artérielle est basse, ont souvent du mal à se réveiller le matin.
La mienne est plus basse que la moyenne des hommes.
En tous cas, le seul fait que je peux affirmer est que j'ai sommeil toute la journée.
En ce moment, je suis en vacances.
J'ai le droit de faire la grasse matinée tant que je veux.
Chaque matin, la lumière douce qui s'introduit à travers les jalousies baissées me réveille tendrement comme si une femme caressait ma peau.
Je n'ai pas la moindre envie de me lever.
La couette est chauffée grâce à ma température corporelle.
Je suis une limande qui s'endort sous les fonds marins.
Il n'est pas l'heure de me lever.
Je ne suis plus dans un rêve profond mais je ne suis pas réveillé non plus.
Je suis encore entre le réel et l’irréel.
En plus, l'air frais de l'hiver me coince encore dans mon lit.
J'entends imperceptiblement sonner le réveil de mon voisin.
Celui-ce ne cesse de sonner.
Mon voisin est une autre limande.
Il n'arrive pas à se lever.
Vers onze heures, je renonce à rester dans le royaume du sommeil.
Je lis la suite de mon roman, ''Extension du domaine de la lutte''.
Il est certain que Michel Houellebecq est pessimiste.
Un grand pessimiste de la France du XXI siècle.
C'est en effet un écrivain qui fait polémique car son style est plus ou moins provocant.
Avant lui, y avait-il un écrivain français qui a essayé d'écrire sur le sentiment de vide et le ridicule de la société moderne capitaliste ?
Je n'en connais aucun.
Il y en avait certainement.
Mais ils n'ont pas tous réussi en tant qu'écrivains.
Le grand pessimiste de la littérature française contemporaine me fait de temps en temps rire.
Il a un bon sens de l'humour.

Vers treize heures, j'ai eu faim.
J'ai ouvert le frigo, il n'y avait rien dedans.
En fait, il y avait une conserve d'haricots mais je l'avais ouverte il y a longtemps.
Je ne la considère plus comme comestible.
C'est du poison.
C'est à ce-moment que je décide de sortir.
Il n'y a pas de sommeil quand on a faim.
Je me suis rappelé aussi que j'avais un document à scanner.
Je suis donc d'abord allé à l'université.
L'université était plus déserte que d'habitude.
Peut-être pas mal d'étudiants sont-ils encore en vacances comme moi.
Que font-ils?
Une fête?
Une révision?
L'amour?
Tremblent-ils face à la fin des vacances?
Toutes ces activités humaines me semblent importer peu par rapport à dormir.

En marchant je me pose un tas de question.
Certains disent que le sommeil est une forme provisoire de la mort.
Comment peuvent-ils savoir?
Ont-ils déjà été morts?
Quelle est la différence entre une personne qui est en train de dormir et une personne morte?
Les signaux vitaux, sans doute.
Lorsqu'on dort, l’âme flâne dans un autre monde.
L'âme des morts part-il aussi pour un autre monde?
Je ne sais pas.
Je ne sais jamais.
Comment pourrai-je le savoir?
L'huître est plus importante que ces questions.
L'huître m'importe plus que la femme pour moi.

Après avoir scanné mon document à la bibliothèque de la fac(les feuilles étaient bouchées comme d'habitude), je suis allé à Simply.
À mes yeux, Simply était aussi désert qu'habituellement.
Peut-être que c'est parce que j'y suis arrivé vers 14 heures.
L'heure où les clients sont relativement peu nombreux.
Le climatiseur sortait un air tiède et lâche.
Par rapport au supermarché japonais, j'aime le supermarché français parce qu'il ne diffuse pas à grand bruit de musiques publicitaires ridicules toute la journée.
Si j'étais caissier dans un supermarché nippon, je deviendrais fou.
Je chanterais à tue-tête des chansons publicitaires ridicules d'un supermarché ridicule d'une société ridicule.

À la caisse, un homme disait quelque chose à la caissière.
Comme j'étais un peu éloigné, je n'ai pas compris ce que cet homme lui disait.
Il avait l'air triste.
Il lui montrait un sac plastique rempli de morceaux de verre.
Ces morceaux cliquetaient dans le sac.
La caissière, une femme d'âge mûr, ayant une voix rauque lui répondait quelque chose.
J'ai entendu l'homme dire ''poisson'' et '' cinq euros''.
Cet homme réclamait probablement quelque chose concernant un poisson à cinq euros.
J'en ai déduit que ce poisson qu'il avait acheté était un monstre et avait détruit les vitrines de sa maison.
J'ai entendu la femme dire ''Je n'ai jamais vu une telle chose.''
Moi non plus.
Ils se parlaient assez longtemps.
Une femme âgée qui était derrière moi a soupiré.
Je suis resté discret toutefois j'étais curieux de ce qui s'était passé.

La route était boueuse à cause de la neige.
Il neigeait de plus en plus.
J'ai vu deux filles se jeter des boules de neige.
À l'arrêt de bus, il y avait une femme qui téléphonait à quelqu'un.
Au début, elle parlait en français.
Au milieu, elle a commencé à parler une langue que je ne connaissais pas.
L'arabe, peut-être.
Mais je ne suis pas sûr.
À côté de cette femme téléphonant, une vieille dame frissonnait de froid.
Un couple se penchait contre la paroi.
Ils avaient l'air tristes.
De temps à autre, ils échangeaient quelques paroles mais la plupart du temps ils restaient silencieux.
La chute de neige ne représentait rien devant la tristesse qui le couvrait.

Chez moi, j'ai ouvert une bouteille de bière.
J'ai bu une gorgée directement au goulot.
J'apprécie ce moment précieux que nous apporte la bière.
Ce liquide en or traverse ma gorge, par la suite, la saveur remplit ma bouche et me sort par mes narines.
La bière a toujours le parfum du début d'été.
J'ai également préparé des huîtres.
Les huîtres et la bière forment une bonne combinaison.
La bière apaise la chair salée de l'huître.
La fraîcheur de la bière et l'opulence de l'huître s’emmêlent comme un couple dansant.
Je m'effondre sur mon lit.
Mon oreiller, ma couette et ma serviette préférée m’accueillent toujours gentiment.
Dans mon rêve, je suis une huître.
Les vagues cadencées de la mer berce ma coquille nacrée.
Je sais que je ne me réveillerais plus jamais.



L'outre-tombe



J'étais chez mes parents.
Je regardais la télé avec mon père.
À l'écran, il y avait quatre ou cinq personnes dont les visages étaient étrangement défigurés.
Ils étaient assis côte à côte.
Il n'y avait rien derrière eux, juste du blanc.
Ils bredouillaient quelque chose aux microphones.
Je n'ai pas compris ce qu'ils disaient.
Mon père m'a regardé sans aucune expression puis dit sèchement,

''Ce sont des victimes de la guerre.''

 Je me suis réveillé dans mon appartement.
J'ai d'abord vu le plafond, puis les murs.
Après avoir réfléchi quelques instants, je me suis rendu compte que c'était un rêve.
Un mauvais rêve.
Mais qu'est-ce que ces gens invalides étaient en train de nous dire?
Il ne faut pas s'en souvenir.

mardi 10 janvier 2017



La légère couche de neige sur le toit d'une maison française, la transforme en gâteau en forme de maison.
Et les habitants en poupée de sucre.
Sont-ils mangeables?
Sans doute que non.
Mais la neige avait transformé tout le paysage en monde miniature.
Les passagers que je voyais, des poupées de sucre.
Les voitures s'étaient transformées en jouets pour enfants.
Tout semblait pétrifié comme si ce monde n'était qu'une illusion.
Je posai ma main sur ma poitrine.
Je sentis le battement de mon cœur et la chaleur de ma peau.
Je fus rassuré de voir que je n'étais pas une poupée.
La poupée n'a ni cœur ni chaleur.
Je sortis de ma maison pour vérifier que tout le monde était encore humain.
Je rendis visite à la maison enneigée qui se trouvait à l'opposée de la mienne.
Je frappa à la porte et criai ''Bonjour !''
Personne ne me répondit.
Je criai encore ''Bonjour !''
Après quelques instants, une dame qui avait l'air nerveuse entrouvrit la porte.
Je lui fis un sourire d'ange.

''Je fais une enquête sur la situation fiscale des familles françaises.'' mentis-je.

''Il fait particulièrement froid aujourd'hui. Entrez.'' me dit-elle.

Mais l'intérieur de la maison était aussi glaciale que l'extérieur.
Je commençais de plus en plus à frissonner.
Mes dents craquaient.
Puis la dame me demanda si je voulais boire quelque chose.
Comme j'avais froid, je lui répondis que oui, que si je pouvais avoir un boisson chaud, ce serait un grand plaisir.
Elle s'enferma dans la cuisine.
Il n'y avait que très peu d'objets dans la maison.
Un canapé sur lequel j'étais assis, des livres aux noms d'auteurs inconnus.
La télé était éteinte tel un cadavre.
J'entendais le bouillonnement de l'eau.
Puis la dame m'apporta un thé sur un plateau.
Comme mon corps frissonnait, ma main tremblait de la même manière.
Lorsque j'essayai de le tenir dans ma main, je le renversai.
''Excusez-moi !'' m'excusais-je en levant la tête.
La main de la dame avait fondu.

lundi 9 janvier 2017

La neige



Aujourd'hui il a neigé énormément à Strasbourg.
Je me suis levé vers 5 heures.
À l'extérieur, il faisait encore nuit.
La ville entière dormait.
J'ai vu une couche de neige par la fenêtre.
La noirceur du ciel nocturne et la blancheur de la neige formaient un contraste lumineux.
Quelques arbres étaient éclairés par des réverbères.
Ce jour-là, tous les corbeaux se taisaient.
Ils se dissimulaient dans l'obscurité.
Le seul son que je pouvais percevoir était celui de ma respiration.
La neige avait tout absorbé, même les sons.
Je n'ai même pas entendu le bruit que font les voitures, la sirène d'une ambulance s'éloignant.
Depuis mon enfance, je me demandais où allaient les voitures qui circulaient dans la nuit.
Pourquoi ces voitures circulent-elles à une heure aussi tardive?
Retourne-ils à la maison?
Où étaient-ils?
Vont-ils au bureau?
Non, c'est une heure inadéquate pour se rendre au bureau.
Sont-ils insomniaques?
Quelques-uns, oui, peut-être.
Sinon, ce sont des fantômes.
Des fantômes qui viennent et vont, ne laissant aucune trace derrière eux.
Des fantômes que seuls ceux qui sont éveillés peuvent percevoir.

dimanche 8 janvier 2017

Les cuisses de grenouilles

Hier, j'ai mangé pour la première fois des cuisses de grenouilles.
La veille, j'ai noté qu'on vendait au supermarché.
Comme j'aime les mets étranges, les cuisses de grenouilles m'ont tout de suite obsédé.
Je suis allé au supermarché pour en acheter.
Elle m'ont coûté 4 euros 500g.
C'est bon marché.

À la maison, j'ai d'abord mis du beurre sur la poêle chauffée.
Puis j'ai mis des cuisses de grenouilles.
Après les avoir suffisamment cuites, je les ai saupoudrées de poivre noir et de sel.

Elles étaient bonnes.
Cela ressemble au poulet mais je sens également la saveur du poisson à chair blanche.
Par contre, il y a beaucoup d'os.
Par conséquent, il n'y a pas assez de parties mangeables.
Il ne faut pas penser à se remplir le ventre d'un tel plat.
J'ai remarqué que les os des grenouilles ressemblent au cartilage du poulet.
Je ne sais pas si les Français en mangent mais au Japon on consomme les cartilages du poulet frit.
je pense que si on s'ingénie un peu à trouver une recette adaptée, on pourrait manger l'entièreté d'une cuisse de grenouille, os inclus.

今日は日本の皆さんにも紹介したいので、日本語でも書こうと思います。
スーパーで冷凍の「カエルの脚」を見つけたので、買ってみました。
あまりそういうイメージはないかもしれませんが、フランスでは大抵の夫婦が共働きな影響で冷凍食品がすごく発達しています。
冷凍食品は日本でも豊富ですが、フランスのほうが発達しているかもしれません。

袋はこんな感じ。


あけると、小袋に小分けされている。


バターを敷いてあたためたフライパンに、カエルの脚をのせ、良い焼き色がついたら黒コショウと塩で味付けしました。
焼く前に、小麦粉をつければよかったと後で少し後悔しました。



ぷりぷりのカエルの脚が、なんとも言えずにセクシーです。
食べると、鶏肉と白身魚の中間のような味。
少しぱさぱさしているけどおいしい。
お酒のおつまみによさそうです。
ただ、骨が多くて、食べられる部位はあまりありません。
骨は軟骨のような感じ。
簡単に砕けます。
軟骨のように、適切な調理をすれば骨もおいしく食べられるようになるかもしれません。

レストランで食べると高いカエルの脚ですが(というか、レストランにもそもそもあんまりないけど)冷凍食品だと安いですね。
4ユーロでした。

ごちそうさまでした。