Sauf
quand c’est vraiment nécessaire, je ne relis pas mes livres. Je ne les prends
pas dans ma main non plus parce que je me sens gêné. De la même manière, je n’ai
pas envie de regarder la photo de mon permis de conduire (pourquoi a-t-on
souvent une tête bizarre sur la photo de son permis de conduire ?). J'oublie
donc facilement ce que j’ai écrit comme si du sable tombait de mes doigts.
Ça,
ce n’est pas un problème. Par contre, il m’arrive d’écrire deux fois la même
chose sans m'en rendre compte. Ce n'est pas pour réutiliser un vieux sujet,
mais parce que, simplement, j’ai une mauvaise mémoire. S’il vous arrive de
penser « J’ai déjà lu ça », prenez-moi pour un singe d’une montagne (j’ai déjà
écrit ça) et ne m’en veuillez pas.
Il
se peut donc que j’aie déjà écrit cette histoire un jour. Mais comme je ne sais
plus du tout où et quand je l’ai écrite, je la raconte comme si c'était la
première fois.
Je
n’aime pas trop les plats sucrés. Je ne mange presque pas de gâteaux, je
n’achète presque jamais de chocolat. Cependant, je suis pris du désir violent
de manger du chocolat environ deux fois par an. Sans que rien ne laisse
prévoir, ce désir me tombe dessus comme une avalanche.
Je
ne sais pas pourquoi cela se produit. Peut-être qu’un nain colérique qui a un
faible pour le chocolat se cache dans mon corps ; d’habitude, ce type dort
paisiblement, mais il se réveille à un moment et se mets à crier de toutes ses
forces : « Hé, chocolat ! Chocolat ! Où est le chocolat ? Bon sang ! Je veux du
chocolat tout de suite ! Ce salaud ! Apporte-moi du chocolat immédiatement ! ».
Il se peut qu’il tape du pied et qu’il frappe violemment le mur. Je le sens et
alors, je ne peux m’empêcher de courir à la supérette. J’achète du chocolat
(c’est toujours, sans raison particulière, du chocolat aux amandes de Grico)
pour apaiser la colère du nain. En marchant dans la rue, j'ouvre le paquet en
hâte, et je dévore tout le chocolat comme un démon affamé par une nuit d’orage.
Une
fois terminée ce rituel, le nain est satisfait ; il se calme et se rendort sous
sa couette. Cette sorte de crise de chocolat m’arrive environ deux fois par un.
Dieu seul sait quand le nain colérique se réveillera.
Il
y a quelques années, cette crise s’est produite le 12 février, deux jours avant
la Saint-Valentin. J’ai eu envie de protester : « C’est pas vrai ! Alors que je
pourrai manger du chocolat autant que je voudrai dans deux jours, pourquoi
maintenant….. », mais c’était plus fort que moi. J’ai couru à la supérette
comme d’habitude, j’ai acheté du chocolat aux amandes de Grico et je l’ai
ingurgité. Apaisé, le nain s’est endormi. Deux jours plus tard, je n’avais plus
aucune envie de manger du chocolat.
Ce
nain est vraiment sans-gêne, franchement.
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