vendredi 19 mai 2017

Sur la traduction

Ces quelques jours, je me suis concentré sur la traduction d'une dizaine de récits courts de Haruki Murakami.
Par hasard, j'ai découvert qu'un blogueur japonais avait mis plusieurs textes entiers sur son blog.
Le livre original s'intitule ''Yoru no kumozaru (singe-araignée de la nuit)''
Je l'avais déjà lu il y a longtemps.
C'est un recueil de nouvelles mais les histoires qu'il comprend sont beaucoup plus courtes, elles ne me dépassent pas une page.
Je me rappelle que le dessinateur Mizumaru Anzai, qui est décédé sans aucun signe il y a quelques années, avait illustré ce livre de ses dessins sophistiqués.
Il était également l’un des amis les plus intimes de l’écrivain.
J'imagine que le lecteur étranger ne le sait pas, mais le vrai nom de Mizumaru Anzai était Noboru Watanabe.
Ce nom a inspiré l'écrivain pour créer le personnage qui a le même nom (Noboru Watanabe) dans ''La chronique de l'oiseau à ressort''.
Ou même des personnages qui ont le même nom apparaissent plusieurs fois dans ses autres nouvelles.
Il y a une anecdote racontant que comme Noboru Watanabe dans ''La chronique de l'oiseau à ressort'' est un personnage vicieux, Haruki avait promis à Mizumaru qu'il écrirait ''Noboru'' en katakana (en japonais trois types de caractères existent ).
Sans doute, ce recueil ne sera pas traduit en d'autres langues car il est différent de ses romans, un peu trop facile à lire pourtant agréable et bien plus surnaturel.
J'ai choisi quelques histoires, j'ai décidé de les traduire en français.
Comme elles étaient courtes, j’ai pensé que ce ne serait pas un fardeau pour moi.

Cette émotion apparue soudainement de vouloir transférer ces récits du japonais au français ressemblait à une soif.
J'ai traduit une phrase puis une autre comme si je buvais de l'eau à grande gorgée.
J'ai d'abord écrit des brouillons dans mon cahier et le lendemain je les ai dactylographiés sur l'ordinateur.
Je les ai élaborés et des Français charitables les ont corrigés en ligne.

Ce qui était particulièrement intéressant était la traduction de mots japonais spécifiques tels que ''Chikwua (pâte de poisson)'', ''Oseibo (cadeau de fin d'année en signe de remerciement).
J'ai finalement préféré laisser le mot chikuwa tel quel parce qu'il semblait que cette sonorité composée de trois syllabes ''chi-ku-wa'' déployait un charme spécial dans son récit.
Par contre, j'ai remplacé ''Oseibo'' simplement par le mot ''cadeau'' pour faciliter la lecture en français.

Je suis bien conscient que mon français n'est pas naturel.
Par exemple, lorsque je lis un bouquin, ou Le monde, je me dis chaque fois que je ne pourrais pas écrire d'une manière si élaborée.
Même les articles d'un magazine de potins m'impressionnent.
Je fais fréquemment des fautes grammaticales, j'utilise des tournures que les Français n'auraient pas choisies.
Lorsqu'un Français me compliment sur mon bon niveau, je pense au fait que le français n'est pas ma langue maternelle et qu'il ne le sera jamais.
Toutefois j'éprouve une étrange réticence à traduire du français au japonais, alors que si je traduisais du français au japonais, je n'aurais pas besoin de demander à quelqu'un de corriger ma traduction.
Malheureusement je n'ai pas de mots pour expliquer ce sentiment.
Mais en fait, rien ne m'oblige d'écrire dans ma langue maternelle.
Certes, je n'ai pas eu le droit de choisir ma nationalité, mais j'ai le droit de choisir une langue qui sert à exprimer mes idées, n'est -ce pas ?

J'ai relu ''Le château'' de Kafka.
(Le délai de la bibliothèque s'approchait silencieusement.)
J'ai entendu une anecdote curieuse sur Kafka.
Franz Kafka était de nationalité tchèque mais il a écrit ses romans en allemand.
Par conséquent, d'après ce dont j'ai entendu parler, maintenant la plupart de Tchèques le considère comme allemand et non pas tchèque.
En plus, ils ne lisent quasiment pas de Kafka bien que ce soit l'un des plus grands écrivains du XXe siècle.
Effectivement avant sa mort prématurée, Kafka a vécu à Berlin avec sa jeune amoureuse, Dora mais du à sa santé qui s'empirait de jour en jour, ce séjour n'a jamais été prolongé.
Si bien qu'ils sont retournés à Prague, puis au final, Kafka est mort à Vienne.
Si on lui avait demandé s'il se considérait comme allemand, j'imagine qu'il aurait répondu que non.
Il n'est tout de même pas allemand.
Mais si les Tchèques ne le considèrent pas comme leur compatriote, qu'est-il ?
Cette anecdote m'a fait penser au protagoniste du Château, K.
Il est géomètre mais personne ne pense qu'il le soit dans le village, d'ailleurs K lui-même est obligé de travailler en tant que homme de servie à l'école.

Cet été, je pense à reprendre la traduction de ''Mademoiselle Nanakamado et sept adultes pitoyables''.

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