dimanche 18 février 2018

Le calendrier Sôseki


 Une série d’articles intitulée « Le calendrier Sôseki » a été mise en public. Son concept est de présenter chaque jour ce que Natsume Sôseki a vécu le même jour de son vivant. Il semble qu’elle a été achevée le 31 décembre 2016. Comme je ne suis pas très instruit, je ne connaissais pas le nom de l’écrivain qui s'en occupait, mais chaque article est très bien écrit, de plus, les ‘’petits riens’’ de tous les jours de Sôseki sont si intéressants que je veux tourner toutes les pages de cette éphéméride en une journée.
 J’aimerais traduire quelques épisodes qui m’ont particulièrement attiré. Je pense que Pauline sera contente.

Le 28 novembre, Natsume Sôseki regarde ‘’Une maison de poupée’’ d’Ibsen au théâtre impérial  
 Aujourd’hui, à la même date qu'il y a cent cinq ans, c’est-à-dire le 28 novembre en 1911 (44 de l’ère Meiji), Sôseki, quarante-quatre ans, songeait à Londres en regardant le ciel de Tokyo. 
 Un faible soleil transparaissait de l’autre-côté des nuages épais et sombres, il pouvait sentir l’arrivé de l’hiver. Au moins, c'était une chance que l’air de Tokyo fût frais par rapport à Londres où une multitude de charbons brûlait à cause de la Révolution industrielle. 
 Il a commencé à pleuvoir à partir de midi. Il se senti un peu triste en regardant la pluie tomber sur les bananiers japonais de son jardin. 
 Ce jour-là, Sôseki était invité par l’association culturelle. La représentation d’« Une maison de poupée » d’Ibsen avait lieu au théâtre impérial. L’ouverture était à quatre heures et demi de l’après-midi. 
 Sôseki prit un bain et il fit sa toilette. Il mit une redingote et demanda un pousse-pousse. En Europe, il était d’usage de s'habiller sur son trente-et-un pour aller au théâtre. 
 Quatre heures furent passées. Le pousse-pousse était parti chercher les filles de Sôseki à l’université. Il ne revenait pas alors qu’il était déjà quatre heures vingt. Au moment où il se demanda s’il annulait le rendez-vous et qu’il mit sa main sur son manteau pour l’enlever, le pousse-pousse revint. 
 Lorsque Sôseki arriva au théâtre impérial, la pièce avait déjà commencé. 
 À cause du mauvais temps, il y avait moins de monde que prévu. Mais il reconnut les visages de quelques connaissances. Il salua ses collègues du journal d’Asahi, Chûjirô MATSUYAMA et Suimu NISHIMURA. 
 Pendant l’entracte, le critique qui avait commencé lui aussi à écrire un roman, Shûkô CHIKAMATSU lui adressa la parole : « Je suis ravi que vous soyez venu », puis il ajouta : « Ponta est là aujourd’hui ». Ponta était le nom d’une geisha célèbre à Shinbashi. 
 Ponta passa juste devant Sôseki, mais il n’eut pas l’impression qu’elle soit une femme aussi belle que les rumeurs le disaient. Au premier étage, il y avait Kyoshi TAKAHAMA. Sôseki leva la tête vers lui, alors ce dernier lui répondit en agitant son pamphlet. Sôseki lui s’inclina. 
 Hôgetsu Shimamura s’occupait de la mise en scène et du scénario. L’héroïne Nora était incarnée par Sumako MATSUI, mais son visage n’allait pas bien avec son costume. Sa gesticulation et son expression sentimentales avaient quelque chose d’artificiel comme si elle tentait d’imposer une certaine stimulation au public et Sôseki fut déplu. En revanche, les acteurs masculins étaient plus naturels, sans affectation. 
 Ce fut quelques années plus tard que le scandale de la relation adultère entre Hôgetsu et Sumako fut révélé. 
 Sôseki croyait que ce n’était pas encore trop tard, mais quand il rentra chez lui, il était déjà neuf heures et demi. Bien qu’il n’eût pas dîné, son épouse Kyôko lui dit qu’il n’y avait rien à manger. En pensant : « J’aurais dû manger quelque chose au théâtre », il lui demanda : « Alors, tu peux commander la livraison de nouilles soba ? » 
 Après une pièce qui lui donna l’impression qu’elle était ornée à l’occidentale de manière forcée, pour lui, savourer des soba étaient sans doute le meilleur moyen de se rafraîchir.
 Le mot de Sôseki du jour :
« Quand on est jeune, il semble que l’on prête facilement attention aux belles femmes ». (‘’L’hérédité du goût’’)

 Il y a quelques jours, j'ai dit à Pauline que je relisais en ce moment ''1Q84'' en ouvrant une page au hasard. Alors, elle m'a appris que je lisais de la même manière que Sôseki, que dans ''L'Oreiller d'herbe'' il y a un passage où le héros dit à une femme qu'il ne faut pas toujours lire un livre dans l'ordre des pages. Ce ''petit rien'' de la vie me fait toujours plaisir.

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