J’ai participé pour la première fois
au café de langues. Comme j’avais un peu peur d’y aller tout seul, j’ai amené
mon esclave, Ophélie. Elle avait l’air mélancolique comme d’habitude. Dans le
tram, je lui ai demandé ce qu’elle a fait aujourd’hui. Sa réponse est toujours
la même. « Rien ».
Nous sommes descendus à l’arrêt
Gallia et nous avons marché jusqu’au foyer d’étudiants catholiques. Ni Ophélie
ni moi étions catholique. Nous avons passé une arcade et nous avons aussitôt
trouvé un grand panneau sur lequel il était écrit « Euro Student Café ». Devant
la porte, j’ai demandé à Ophélie d’ouvrir la porte. Elle a hésité. Elle a
marché un peu autour, puis elle a enfin ouvert la porte. Un homme d’un certain
âge assis sur une table s’est tourné vers nous. Il nous a demandé de nous
installer à sa table. Il n’était sans doute pas français car il nous a parlé dans
un anglais parfait. Je comprenais ce qu’il disait, mais comme j’ai du mal à
parler anglais, je laissais mon esclave lui répondre. Ophélie s'est présentée à
lui en lui disant qu'elle était étudiante en marketing, qu’elle avait vécu un
an en Chine etc. Pendant ce temps, j’observais l’intérieur du café. À part le
serveur, qui était tout seul au comptoir, il n'y avait presque personne. Je ne
savais pas si c’était normal ou si d’autres personnes arriveraient au fur et à
mesure. Plusieurs minutes se sont écoulées ainsi. À un moment donné, une petite
dame asiatique est entrée par la porte. L’homme qui parlait anglais s’est levé et l’a saluée. J’ai su qu’elle était japonaise car
j’ai entendu l’homme l'appeler par son nom.
La dame japonaise, Ophélie et moi,
nous nous sommes déplacés vers une autre table, une table de japonais, français
et chinois chinois (mais aucun Chinois n’est venu ce soir). La dame avait
encore du mal à parler en français. J’ai éventuellement interprété ce qu’elle
voulait dire. Plus tard, il s’est révélé qu’elle entrait dans un conservatoire
à Strasbourg. Elle nous a dit qu’elle jouait d’un instrument particulier, que
très peu de personne connait, ‘’Ondes Martenot’’. Je ne connaissais pas cet
instrument, Ophélie non plus. Elle m’a dit que Messiaen s’en servait puis m’a
demandé si je connaissais d’autres compositeurs de son époque. Je n'ai pas une
bonne mémoire en ce qui concerne les dates, je me trompe peut-être, mais j’ai
cité mes quelques compositeurs modernes préférés : Schoenberg, Bartok, Stravinsky.
Elle nous a raconté l’histoire de l'Ondes Martenot, que Martenot venait du nom
de l’inventeur, que c’était un soldat de la première guerre mondiale et qu’il
l’a inventé car il était inspiré par la vibration des tubes à vides
tripolaires. Selon la petite recherche que j’ai effectuée chez moi, il semble
que Johnny Greenwood de Radiohead se sert de cet instrument né en France. Ce
qui est étrange, c’est qu’elle m’a dit qu’elle avait joué « Ave Maria » avec
cet instrument récemment. Par hasard, j’avais écouté « Ave Maria » de Maria
Callas hier. « Ave Maria » est un morceau populaire, mais je ne l’avais pas
écouté depuis longtemps.
Dans le tram du retour, l’une des
deux filles qui sont montées à l’arrêt Wakecn m’a fréquemment regardé du coin
de son œil et je me suis senti gêné. Elle avait une tête en forme d’un œuf et
des cheveux bruns qui tombaient sur ses épaules frêles. Elle parlait à son amie,
mais ses yeux étaient rivés sur moi. Je sais bien que je ne suis pas beau, mais
mon visage est-il si bizarre qu’une personne ne peut s’empêcher d’y fixer un
regard intense ?
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