mardi 10 avril 2018

Le 8 décembre 1980



 Des étudiants ont bloqué l'entrée du Patio avec des barricades, et mon examen de littérature française du dix-septième siècle a eu lieu à l’Atrium.

 Comme je ne m’intéresse pas beaucoup à la politique, je ne comprends pas trop le motif de cette manifestation. C’est peut-être contre la réforme universitaire qu’a proposé le Président. En regardant des étudiants assis devant les barricades, il me semblait sentir pourquoi et comment la Révolution française a eu lieu. Et je me suis dit que pour ‘’faire’’ la démocratie, il faudrait avoir une certaine résolution.

 Certains Japonais font aussi des manifestations, particulièrement contre la modification du neuvième article de la Constitution que souhaite le premier ministre ou contre la remise en activité des centrales nucléaires. Ils sont peut-être sérieux. Ils veulent vraiment garder le neuvième article de la Constitution ; ils ne veulent aucune centrale nucléaire au Japon. Je partage ce sentiment. Mais je ne peux m’empêcher de penser qu’ils semblent manquer de ce que l'on pourrait appeler l'esprit révolutionnaire des manifestants français. C'est, me semble-t-il, la différence entre le pays qui a ‘’gagné’’ la démocratie, et celui qui l’a ‘’reçue’’ de l’Occident. Parfois je me demande si le Japon est un pays vraiment démocratique, avec le parti conservateur qui règne sur la nation depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, à quelques exceptions près.

 On pourrait dire la même chose pour le féminisme au Japon. Pour les Françaises, le féminisme est le fruit de leur bataille. Pour les Japonaises, c’est quelque chose qu’elles ont reçu de l’Occident, un cadeau tombé du ciel. Par exemple, au Japon, il y a des wagons dans les trains réservés uniquement aux femmes parce qu’elles sont souvent victimes de satyres. Évidemment, c’est la faute de ces satyres. Cependant, comme je ne suis pas très intelligent, je ne comprends pas pourquoi les féministes japonaises acceptent volontiers, voire souhaitent, cette mesure, car on peut considérer que les wagons réservés aux femmes sont la preuve qu'elles sont socialement faibles, et doivent être protégées, ce qui s’oppose à la notion de base du féminisme selon laquelle les femmes et les hommes sont égaux.

 J’ai fait une longue digression. Je voulais écrire sur le partiel. Honnêtement, je ne pensais pas pouvoir réussir cet examen, parce que la professeure est sévère, dure comme l’institutrice Rottenmeier de « Heidi ». Après l’avoir passé, mon avis n’a pas changé. Je ne pense pas l’avoir réussi même si j’ai rempli une copie de deux pages. En particulier, j’ignorais la réponse aux dernières questions. « Citez trois titres des Fables de La Fontaine ». Si on laisse du blanc, c’est sûr que l’on n’aura pas de point. Mais si on écrit quelque chose, il y a toujours la possibilité que l’on tombe sur la bonne réponse. J’ai donc inventé trois titres qui font penser à cet ouvrage. « La fourmi et la sauterelle », « La chouette avare et trois souris », « Le tigre qui avait faim ». Ils sont parfaitement vraisemblables, n’est-ce pas ?

 Les autres questions étaient la date de la publication du Malade imaginaire de Molière et de l’Illusion comique de Corneille, quelque chose de ce genre. Je l’ignorais complètement. De la même manière, j’ai inventé une date. C’est dommage ; si la question avait été « Donnez la date du meurtre de John Lennon par Mark Chapman », j’aurais pu répondre sans problème.  C’est bien le 8 décembre 1980 !


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