Il y a cent
quatre ans aujourd'hui, le 6 avril 1912, Sôseki travaillait à la création de
son roman-feuilleton « À l'équinoxe et au-delà », qui avait commencé en janvier
de la même année. Le temps s'améliorait de jour en jour, les cerisiers étaient
en pleine floraison. Les visiteurs venus les admirer se pressaient dans le parc
d’Ueno et les environs de Mukôjima. Sôseki, qui aimait beaucoup le printemps,
aurait voulu s’évader de son bureau et y aller, mais il était pris par son
travail quotidien. Contraint de rester chez lui, il était légèrement irrité.
D’ailleurs, à l’instar de son titre, le feuilleton « À
l’équinoxe et au-delà » devait se terminer en avril, peu après l’équinoxe
de printemps. Cependant, Kokyô Nakamura qui était censé prendre la suite de « À
l’équinoxe et au-delà » avec « Kara (La Coque) »,sur la
recommandation de Sôseki lui-même, est tombé malade. La plume de Sôseki n’avançait
plus. Fallait-il attendre la guérison de Kokyô ou chercher un autre écrivain. Quoi
qu’il en soit, afin de gagner du temps, Sôseki se trouvait contraint de retarder
la fin du récit et de continuer à écrire.
Il a eu envie de se plaindre de la situation. Il a
écrit la lettre suivante à l’un de ses acolytes, le directeur du collège
d’Okayama, Denshi Nomura.
« Ueno et la berge du fleuve Sumida sont remplis de monde. Il y a longtemps que je n’ai pas admiré des fleurs, et en ce moment je dois me contenter de ce qu’en disent les journaux. Comment sont les cerisiers à Okayama ? C’est de très mauvais goût d’écrire un roman en avril, un mois riche en événements intéressants. Je prendrai garde à ce que cela ne se reproduise pas l’année prochaine ».
Le dernier épisode de « À l’équinoxe et au-delà »
a enfin paru environ trois semaines plus tard, dans le journal du 29 avril. Le
roman-feuilleton de Hakuchô Masamune « Le Fantôme vivant » a commencé dès le
premier mai. Inquiet pour Kokyô Nakamura, Sôseki a jugé que ce dernier devait d’abord
se concentrer sur sa guérison.
Le roman autobiographique de Kokyô « Kara (La Coque) »
a paru dans le journal "Asahi" à partir du 26 juillet, pendant la
suspension du « Fantôme vivant » de Hakuchô Masamune.
À propos, Sôseki n’a pas pu éviter le mauvais goût de
travailler en avril, même les années suivantes. En avril 1913 en effet, Sôseki,
malade, publiait le roman-feuilleton « Le voyageur ou l’homme qui va ».
L’année suivante encore, en avril 1914, il écrivait un autre roman-feuilleton,
son chef-d’œuvre « Le pauvre cœur des hommes ».
Sa vie n’allait pas toujours comme il le souhaitait et
son œuvre était loin d’être achevée.
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