samedi 18 août 2018

Another day of sun


 C’était vendredi. Je suis allé faire des courses parce que mon réfrigérateur était presque vide. Devant une boulangerie se tenait un homme maigre à la peau rouge brûlée par le soleil, habillé comme un randonneur ou un SDF. Je me suis rendu compte qu’il me disait quelque chose, mais je n’entendais pas car j’avais mis des écouteurs. Je savais que c’était un SDF et pas un randonneur. Les personnes qui m’adressent la parole dans la ville ne sont que des mendiants et des fous. D’habitude, quand on me demande de la monnaie, je leur dis « Je suis désolé » et je les quitte immédiatement, mais aujourd’hui, je me suis arrêté et j’ai enlevé mes écouteurs. Comme j’écoutais à ce moment-là la bande sonore de « La La Land », j’espérais secrètement qu’il allait se mettre à danser et à chanter, mais mon attente à été déçue. Le regard mélancolique, il m’a simplement demandé si je n’avais pas quatre-vingts centimes et m’a dit qu’il voulait acheter du pain en indiquant du doigt la boulangerie. Sa façon de parler était calme et polie, un peu comme un professeur d’université. La ville était déserte et silencieuse. Un tram est passé derrière nous en faisant retentir sa sonnerie. J’ai ouvert mon portefeuille. Pendant que je cherchais quatre-vingts centimes, il m’a demandé si j’étais chinois. « Je suis de nationalité japonaise, ai-je dit. – Ah ! Je connais un peu de mots japonais, ‘’Konnichiwa !’’, ‘’Arigatô’’ ! », m’a-t-il dit. J’ai mis une pièce de cinquante centimes, de vingt centimes et de dix centimes dans la paume de sa main. L’air hésitant, il m’a bredouillé : « Euh, vous n’avez pas de vingt centimes de plus ? Parce que pour acheter une baguette… ». Sans rien dire, j’ai repris la monnaie et l’ai remise dans mon portefeuille. Il a pensé que j’étais vexé, et m’a dit : « Ah non ! C’est bon ! C’est bon ! ». « Attendez », ai-je dit doucement. Cette fois, j’ai pris une pièce d’un euro et l’ai mise dans sa main. Les poissons ont besoin d’eau. La terre a besoin du soleil. Les créatures vivantes ont besoin d’oxygène et les Français ont besoin de baguettes. « Merci ! Bonne journée ! », m’a-t-il dit et il est entré dans la boulangerie.
 Au supermarché, j’ai acheté de la nourriture pour une semaine. Comme ça, même si les zombies envahissaient soudainement Strasbourg, je survivrais au moins sept jours.

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