Avant d’aller au supermarché, je
pensais diverses choses.
« Il faut acheter des sac-poubelle. Je vais faire du curry avec des roux que
j’ai apportés du Japon. Pour ça, j’ai besoin de pommes de terre, de carottes et
d’oignons. La boîte à savon sera bientôt vide. Ah, je me rappelle qu'il n’y a
plus de film-plastique ». Lorsque j’ai franchi la porte automatique du
supermarché, j’ai tout oublié. Ma tête était vide comme celle d’un vieillard de
cent ans souffrant d’Alzheimer. J’ai fouillé dans ma mémoire pour retrouver les
objets auxquels je pensais, mais il n’y avait plus ni sac-poubelle, ni curry,
ni savon ni film-plastique. À la poissonnerie, j’ai trouvé des poissons que je
n’avais jamais vus. Ils étaient roses et longs, et ressemblait un peu aux
anguilles, mais plus épais. Cette créature étrange m’a rappelé les bébés
d’Alien. J’ai fait des recherches sur Internet plus tard et j’ai
appris que ce poisson s’appelle « Scyliorhinus canicula ». Il m’intéressait
mais je n’en ai pas acheté parce que j’avais peur qu’il me brise le ventre
pendant mon sommeil. Finalement, j’ai acheté un verre et une bouteille de
Garola pétillante. J’avais envie de regarder des bulles éclater.
Après avoir payé à la caisse, j’ai lu
les avis des clients. En gros, il était griffonné deux fois, « INADMISSIBLE »
au-dessus et au-dessous du corps du texte comme le chapeau d’un journal, mais
comme j’ai besoin de quelques jours voire quelques années pour déchiffrer
l’écriture des Français, je ne sais finalement pas ce qui était inadmissible.
Des fruits étaient-ils pourris ? La date limite de consommation du lait
était-elle déjà passée, ou votre madeleine préférée avait-elle disparu des
rayons ? Quant à moi, ça m’énerve un peu quand les caissières sont maussades.
En l’occurrence, je les torture de diverses manières dans ma tête.
Le soir, je me suis lassé d’« Eugénie
Grandet » de Balzac. J’ai sauté des pages et j’ai lu seulement la fin. La fille
était larguée.
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