vendredi 3 août 2018

L'éléphant et la girafe




















 


























 Je suis allé au zoo de Maruyama vers midi. Le zoo se trouve de l’autre côté du parc de Maruyama, non loin du sanctuaire d’Hokkaîdo. Sur le chemin, j’ai trouvé une maison à colombage comme on en voit souvent en Alsace. Je m’en suis approché et j’ai découvert une plaque d’or sur laquelle il était écrit : « L’Auberge de l’Ill ». L’Ill, est-ce la rivière de Strasbourg ? Alors, est-ce vraiment une maison alsacienne ?
 J’allais souvent à ce zoo quand j’étais écolier, mais en grandissant, j’avais de moins en moins d’occasion d’y aller. Au guichet, j’ai d’abord été étonné par le tarif très bon marché. Le zoo est d’abord gratuit pour les personnes âgées de plus de 65 ans, pour les personnes handicapées et les écoliers. Le tarif pour les adultes est seulement de 600 yens et le billet annuel coûte 1000 yens. Si on n’y va deux fois, on peut récupérer cette somme. Je suis devenu un peu inquiet en me demandant si le zoo faisait assez de profit pour nourrir ses animaux. Mais il semble avoir beaucoup de succès. Il y avait beaucoup de visiteurs, surtout des enfants.
 Le zoo avait un peu changé. Les cages des oiseaux et le pavillon des reptiles et anthropoïdes étaient les mêmes, mais quelques bâtiments avaient été ajoutés. Le plus impressionnant était le pavillon des animaux marins. Il y avait un tunnel qui traversait l’immense bassin d’eau où vivaient les phoques. J’ai regardé en haut et un phoque nageait doucement juste au-dessus ma tête.
 L’un des pavillons était nommé « Zoo pour les enfants ». Il s’agit d’un endroit où on peut toucher les animaux. Il était écrit en gros « pour les enfants », mais j’ai ignoré et j’y suis entré. Les adultes aussi voudraient toucher les animaux. C’était, semblait-il, l’heure du déjeuner. Des moutons étaient en train de manger de l’herbe avec ardeur. Ils étaient entourés par une multitude de petits enfants qui ne cessaient de les caresser. Les moutons s’en fichaient complètement. On aurait dit que pour eux, seule l’herbe comptait. Ils mangeaient d’un air vraiment heureux, comme s’ils disaient : « Il n’y a rien d’aussi délicieux. Ceux qui n’apprécient pas le foin sont des minables ». Pendant que je les contemplais, moi aussi, j’ai un peu eu envie de manger de l’herbe. J’ai caressé la robe de l’un d’entre eux. Elle était douce et mes doigts s’y enfonçaient. J’ai ajouté sur la liste de mes rêves: « Vivre avec un mouton ». Par un jour d’hiver, je voudrais lire un livre en serrant un mouton dans mes bras.
 À un moment donné, j’ai eu un peu faim. Dans mon enfance, si ma mémoire est exacte, il n’y avait qu’un seul restaurant petit et vieux, tenu par une dame aussi petite et vieille qui devait être là depuis l’ouverture du zoo. Aujourd’hui, j’ai constaté qu’il y avait plusieurs restaurants chics qui servaient divers repas, tels que du curry, des churros, du pain frit, des pâtes etc. Mais le vieux restaurant existait encore. Les tables étaient toutes vides et j’étais le seul client. J’ai acheté des saucisses sur bâtonnet et je les ai mangées sur un banc.
 Après avoir fait le tour du zoo, je me suis rendu compte qu’il n’y avait pas d’éléphant. Dans mon souvenir, il y avait la zone africaine où vivaient une girafe et un éléphant. L’endroit où elle se trouvait autrefois était entouré de murs sur lesquels on pouvait lire : « En travaux ». Il semble que le pavillon d’éléphants ouvrira cet automne. Mais pendant ce temps, où se cachaient l’éléphant et la girafe ?
 J’ai trouvé la réponse lorsque je suis entré dans le pavillon de zoologie peu avant de partir. J’ai rencontré l’éléphant et la girafe dans ce bâtiment. Dans un endroit où il n’y avait rien avant, les squelettes de l’éléphant et de la girafe étaient exposés. Selon le commentaire, c’était l’éléphant femelle, Hanako, morte en 2007 à l’âge de 61 ans. La girafe était Takayo, morte l’année suivante à l’âge de 30 ans. C’étaient donc l’éléphant et la girafe que je voyais dans mon enfance. Je me tenais à dix centimètres d’eux. Leurs corps qui étaient si énormes avaient maintenant l’air fins et même fragiles.

 Il y a une raison pour laquelle leurs squelettes sont exposés côte à côte.
 Hanako est arrivée au zoo de Maruyama en 1953, peu après son ouverture. À cette époque-là, l’éléphant était encore un animal rare au Japon et Hanako était la vedette du zoo. Plus tard, une autre éléphante plus jeune, Lily l’a rejointe. Elles sont devenues toute de suite amies. Cependant, Lily s’est blessé la patte et elle est morte en 1999. Hanako qui se comportait plutôt affablement jusque-là est devenue renfermée. Elle tournait souvent les fesses aux visiteurs du zoo. Mais elle avait encore une autre amie qui n’était pas une éléphante. C’était la girafe Takayo, née dans le zoo en 1978. Leurs cages se trouvaient côte à côte. L’éléphante et la girafe se frôlaient souvent, même si elles n'étaient pas de la même espèce. Il semble que c’était souvent Takayo qui touchait Hanako. En 2007, l’année suivante après avoir fêté ses 60 ans, Hanako est morte. Un an plus tard, Takayo s’est aussi éteinte comme si elle suivait Hanako. Au Japon, Hanako est le deuxième éléphant pour la longévité, et Takayo, la girafe qui a vécu la plus vieille. Je ne sais pas si elles ont été heureuses. L'éléphant et la girafe ne sont pas des animaux qui vivent dans un pays de neige. Elles ont terminé leur vie sans jamais vu ni les vastes étendues ni le soleil ardent d'Afrique. Tout ce qu'elles voyaient, c'étaient un sol et un mur en béton, le regard curieux des visiteurs et quelques arbres. Mais je peux dire une seule chose. Au moins, elles n’étaient pas solitaires. Sur une photo qui reste des deux animaux, on voit que la girafe embrasse le dos de l’éléphante avec son long cou.

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