Je suis allé à la cuisine commune de
ma résidence pour utiliser le micro-onde. Sur une chaise longue comme un banc
était assis un homme. Dans le micro-onde émettant une lumière orange tournait
une tasse. J’habite dans une résidence universitaire. La majorité des habitants
sont jeunes, mais il avait l’air d’avoir entre trente et quarante ans. En
marmonnant, il lisait à haute voix un livre anglais qu’il tenait à la main. Sur
la couverture, on voyait le plan du métro d’une ville anonyme. Sans entrer dans
la cuisine, j’attendais que sa tasse soit réchauffée. Pendant ce temps, je
regardais la route par la fenêtre. « Tu
viens d’où ? », ai-je entendu dans mon dos. Je me suis retourné. L’homme qui
lisait le livre s’était levé et se tenait à côté de moi sans que je l’aie entendu
approcher. « Du Japon, ai-je dit. – C’est loin ! a-t-il dit. – Et vous ? - Je
viens de l’Ukraine », m’a-t-il dit. L’Ukrainien avait les yeux bleus et une
barbe de quelques jours. Son T-shirt avait des trous. « Pourquoi on dit ‘’au
Japon’’ et pas ‘’en Japon’’ ? », m’a-t-il demandé tout à coup. « Parce que le
Japon est masculin. Les pays qui se terminent par ‘’e’’ sont le plus souvent
féminins, la France, l’Espagne, la Chine etc, ai-je expliqué.
- Mais le Canada ? Ça se termine par
une voyelle, m’a-t-il dit.
- Ce n’est pas une question de
voyelle, mais de la lettre ‘’e’’.
- Et le Mexique ?
- Le Mexique est une exception. Je ne
sais pas pourquoi. Parce qu’on a l’impression que c’est un pays viril ? Avec
les mafias tout ça ?
- Ah », fit-il. Il avait l’air
convaincu, mais son histoire ne s’est pas arrêtée là. Il a continué :
« Je pense que ce n’est pas une
question de terminologie. C’est parce que quand on regarde sur la carte, le
Japon est loin de la France et on dirait un point, c’est pourquoi on utilise
‘’à’’. Sur la carte, la Russie est immense. C’est pour ça qu’on dit ‘’en
Russie’’ »
C’était un point de vue très
original, mais je n’étais pas convaincu, puisque selon cette logique, on devrait
dire « en États-Unis » et « en Canada », alors qu'en réalité, ce n’est pas le
cas. C’est donc une question de morphologie. Comme j’allais le lui dire, le
micro-onde a sonné. Il a repris la tasse et, je ne sais pas pourquoi, en la
regardant, il a dit « Ah, merde ». Sans que j’aie le temps de lui demander le
titre de son livre, on s’est séparés.
Le soir, j’ai regardé « 007 : Spectre
». Les scenarii des films de « 007 » sont un peu tous les mêmes et c’est ce qui
est bien. Il y a James Bond, M et Q. Ils se battent contre le méchant qui veut
souvent détruire ou dominer le monde. Aucun méchant ne se contente de s’amuser
à massacrer des fourmis, ou de rester toute la journée au lit à regarder la
télé. Ils sont très motivés pour exécuter leur projet vicieux. Au cours de
l’histoire apparaît une femme mystérieuse qui aide l’agent secret et le MI6 sont
toujours victorieux.
La Bond Girl de ce film était Léa
Seydoux. Tantôt elle était belle, tantôt elle ressemblait à une Coréenne qui a
subi de nombreuses opérations de chirurgie esthétique. On dirait un
trompe-l’œil. Dans le film, Bond a fait sombrer son Aston DB10 dans la rivière,
exploser plusieurs bâtiments et a s’écraser un hélicoptère.
Quand je regarde « 007 », je me
souviens de « Casino Royale » que j’ai vu avec des amis quand j’allais à
l’école primaire. C’est le premier film dans lequel Daniel Craig incarnait James
Bond. La grande scène est celle où Bond joue au poker avec le méchant Le
Chiffre, incarné par Mads Mikkelsen et la séquence d'ouverture en noir et blanc
était vraiment cool. Parmi les nombreux « 007 », ma Bond Girl préférée demeure Eva
Green.
À l’époque, aller au cinéma une fois
par mois serrant mon argent de poche dans la main, était un grand plaisir pour
moi. Lorsque j’y repense, j’ai l’impression que j’étais surtout attiré par
l’ambiance du cinéma plutôt que par les films eux-mêmes. Du popcorn, des
hotdogs et du coca vendus au comptoir multicolore. Des affiches d’acteurs et
d’actrices collés partout et les brochures exposés dans les vitrines. Les
fauteuils rouges de la salle de spectacle étaient confortables, et surtout,
j’aimais l’instant où la lumière s’éteignait après les pubs. Avec un cliquètement,
le projectionniste changeait la pellicule, et le film allait commencer.
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