C’était un jour
comme d’habitude, sans rien de spécial. Les vendredis, après le cours magistral
de littérature générale et comparée, je dois tuer le temps pendant quatre
heures jusqu’au cours suivant.
Je suis allé à
la bibliothèque U2-U3. C’est rare pour moi, mais aujourd’hui je me suis assis
sur une chaise devant la table. Une ou deux heures plus tard, j’ai enfin terminé
« Le printemps romain de Mrs.Stone ». Le professeur de ce cours nous avait dit
: « La semaine prochaine, ne franchissez pas la porte de cette salle de cours
sans avoir lu ‘’Le printemps romain de Mrs. Stone ! ». J'ai donc obtenu le
droit d’y entrer dignement, la tête haute. Toutefois, je n’ai pas très bien
compris la fin de ce roman. Déjà, je n’arrive pas à comprendre les sentiments
des filles de mon âge. Alors pourquoi pourrais-je comprendre ceux d’une femme d’une
quinquagénaire ? Parler avec un cheval serait encore plus facile.
« Carotte ? dis-je.
- Carotte. », dit le cheval.
En cours
d’anglais, Willy nous a demandé de parler de nos expériences de petit
boulot. Une fille assise à côté de moi écrivait des caractères japonais sur son
cahier comme une folle, alors que c’était le cours d’anglais. Elle a dit
qu’elle avait travaillé chez un glacier lorsqu’elle avait quinze ans. Elle
avait une petite tête ronde. Il y avait une ombre dans ses yeux, ce qui
n'apparaissait sans doute pas lorsqu'elle avait quinze ans.
Ensuite, il m'a
demandé les petits boulots que j’avais faits. Moi aussi, j’ai travaillé chez un
glacier. Toutefois je n’étais pas vendeur. J’étais interprète. J’ai aussi
travaillé dans un hôtel, un supermarché, à Seven-Eleven, et dans une boulangerie.
Le pire, c’était la boulangerie. Je me souviens encore du jour où je me suis
enfui de cet enfer. J’avais éteint mon portable. J’avais pris le train dans une
autre direction et je m’étais réfugié dans un petit cinéma de Shibuya. C'était un film européen ennuyeux à mort, cependant je ne m’étais jamais senti aussi libre.
Tous ces boulots
ont exacerbé ma misanthropie. Plus tard, j’aimerais faire un travail qui ne
nécessite pas de communiquer avec d’autres personnes. Je crois que c’est dans
‘’La ligue des rouquins’’ de Conan Doyle que le protagoniste est obligé de
transcrire un dictionnaire toute la journée dans une pièce fermée. Si quelqu’un
me demande ce que j’aimerais faire plus tard, je lui répondrai sûrement : « La
transcription d’un dictionnaire ». Ou sinon, j'aimerais attraper les enfants
dans le grand champ de seigle de Salinger toute la journée, pour les empêcher de
tomber de la falaise.
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