mercredi 1 novembre 2017

''L'autre côté de l'espoir''



 J'ai fait un cauchemar dont je ne me souviens plus. Dans l’obscurité de la nuit, mon cerveau était éveillé tandis que mon corps était endormi. Quelqu’un a murmuré mon nom à mon oreille à plusieurs reprises. Qui était-ce ?

 Je me suis réveillé vers dix heures en gémissant. Après avoir bu un café, je me suis rappelé que j’avais des livres à rendre à la bibliothèque. J'ai mis ‘’The Buried Giant’’ et un album de reproductions de David Hockney dans mon sac à dos, je me suis vite habillé, et je suis sorti.

 Je marchais en écoutant les Concertos pour clavecin de Bach. Au bout d’un passage clouté que j’ai traversé, trois ou quatre policiers attendaient. L’un d’entre eux qui portait des lunettes de soleil sportives m’a dit de faire un détour. J’ai donc fait demi-tour et à ce moment-là, j’ai remarqué qu’il y avait beaucoup de policiers autour de la Cour européenne. Ils serraient tous des fusils dans leurs bras. Pour aller à l’arrêt de tram, j’ai emprunté un autre passage-piétons et là, il y avait d’autres policiers. Le chemin que je prenais toujours était barricadé.

« Bonjour», m'a dit l'un de ces policiers.


 Il avait une tête ronde. Ses joues étaient rouges comme une pomme à cause du froid. Lui aussi tenait un grand fusil.


« Bonjour, lui ai-je dit.
- Vous êtes invité ?»


 Évidemment je n'étais pas invité. Pourquoi a-t-il pensé qu'un homme asiatique à la barbe légèrement poussée, avec un sweat à capuche et un jean est invité. Je lui ai dit que je souhaitais prendre le tram.


« Le tram, il est fermé. Il faut le prendre là-bas. », a-t-il dit.

Son doigt indiquait le chemin que j'avais emprunté pour arriver jusque-là.


 Je ne voulais pas retourner à mon point de départ. J’ai décidé d’aller à la BNU à pied. Des gens en costumes-cravate marchaient à contresens vers moi. Les policiers et leurs motos blancs étaient partout. Sans doute y avait-il un congrès important aujourd’hui, sauf que cela n’avait aucun rapport avec moi.

 Pendant que je continuais à marcher, je me suis rendu compte que je me trouvais dans un endroit inconnu. J’étais perdu dans un quartier résidentiel. Il y avait des immeubles blanc et rose. Sur un pont, une femme d’âge mûr prenait des photos. Un vieux couple se promenait main dans la main. Je me suis arrêté et j’ai regardé les alentours. Au loin, j’ai pu apercevoir les deux tours de l’église Saint-Paul. Elle m’a permis de me repérer. Cependant, quelques minutes plus tard, l’église a disparu derrière des immeubles. Je me suis perdu à nouveau. À côté de moi, il y avait un bâtiment immense. Sur le panneau, il était écrit ‘’maison de retraite’’. Une vieille dame en noir y est entrée et s’est évanouie comme une brume. J’ai activé Google Map, toutefois la connexion Internet était faible. En fin de compte, j’ai renoncé et j’ai décidé de poursuivre sur le chemin qui s’ouvrait devant moi. C’était un bon choix parce qu’au bout se trouvait l’arrêt Wacken qui m’était familier.

 J’ai rendu ‘’The Buried Giant’’ et l’album de reproductions de David Hockney à la BNU. Après avoir erré d’étagère en étagère, j’ai finalement choisi la vieille édition de poche de ‘’Setting Free The Bears’’ de John Irving et je l’ai empruntée.
Avant de rentrer chez moi, j’ai visité l’exposition sur le Néo-gothique dans la BNU. Dès que je suis entré dans la salle, l’une des jeunes réceptionnistes qui chuchotaient entre elles m’a regardé et m’a dit bonjour à voix basse.

 L’exposition était plus riche que je ne m’y attendais. Il y avait beaucoup d’illustrations d’un artiste strasbourgeois qui s’appelle Léo Schnug. Ses œuvres représentaient souvent les légendes de l’époque médiévale, la composition était délibérément construite et toutes les formes étaient encadrées un peu comme les célèbres affiches de Mucha.

 Le plan représentant la maquette de la Cathédrale de Strasbourg a attiré mon attention. J’ai déjà la maquette en carton de la Cathédrale Notre-Dame de Paris chez mes parents. J’aimerais bien avoir aussi une Cathédrale de Strasbourg en miniature. 
 Il y avait aussi un dessin représentant la Cathédrale à deux tours. Ce projet de construire une deuxième tour n’a finalement pas abouti, mais cette asymétrie fait partie du charme de la Cathédrale de Strasbourg.

 Ce soir, avec l'ourson Talleyrand, j’ai vu le dernier film d’Aki Kaurismaki, ’L’autre côté de l’espoir’’. C’est l’histoire d’un réfugié syrien, qui demande l’asile en Finlande. Malgré son espoir, l’État refuse froidement de l’accueillir. Le pauvre Syrien va être raccompagné aux frontières turques. Il s’enfuit et il devient un sans-abri. Un groupe de néo-nazi le chasse et essaie de le tuer. Dans tout ce malheur, il rencontre le patron d’un restaurant et il commence à y travailler.

 Au milieu de l’histoire, ce restaurant se transforme en un restaurant de sushis et tous les clients qui viennent sont japonais. Mais je suis certain que les touristes japonais ne viendront pas dans un restaurant japonais en Finlande. Ils iront forcément dans un restaurant local. Quant à moi, je ne vais jamais dans les restaurants japonais en France. Je préfère goûter de la cuisine alsacienne.

 Bref, peu importe. Ce n’est qu’une petite remarque personnelle. Il paraît qu’Aki Kaurismaki a déclaré de prendre sa retraite cette année, si bien que celui-ci est son dernier film. Il avait affirmé qu’il tournerait une trilogie sur le thème du migrant. La première partie, c’était ‘’Le Havre’’, et la deuxième est ce ''L'autre côté de l'espoir''. Il n’y aurait donc pas de troisième.

 À propos, avez-vous remarqué qu'il y a 'le ‘’géant'' de Twin Peaks dans ce film ?

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