Une
carte postale est enfin arrivée de mon oncle qui avait disparu depuis qu’il
était allé à Bornéo pour chercher des antithèses en septembre dernier. Elle
représentait une image assez banale, un grenier et des cocotiers, mais c’était
quand même quelque chose que mon oncle a envoyé bien que ce soit quelqu'un qui
écrit très rarement.
«
Je suis vraiment navré. Même ici, les antithèses qu’on peut qualifier de grandes
ont disparu l’an dernier », avait-écrit mon oncle. Son écriture était tremblante car il avait écrit sur un canoë.
«
Les indigènes disent qu’ils n’ont pas vu d’antithèse de huit mètres depuis des
années. Celle que j’ai capturée il y a un mois est évidemment une antithèse
moyenne de cinq mètres vingt-cinq, mais même celle-ci est un ‘’miracle’’ selon
eux. C’est vraiment dommage. En ce qui concerne la cause de la disparition des
antithèses, certains disent que c’est dû à la diminution des cendres
volcaniques, d’autres disent que c’est dû au changement de la géothermie. Mais
en réalité, on ne sait pas exactement. Si la situation ne change pas, je devrai
rentrer au Japon avant juin. »
Dans
ma chambre est accrochée la vieille photo représentant mon oncle avec des
indigènes qui portent une antithèse de douze mètres et demie sur leurs dos.
C’était en 1966 qu’il a trouvé cette immense antithèse, et celle-ci est
officiellement répertoriée comme la plus grande antithèse capturée dans les
années soixante. À cette époque-là, mon oncle était à l’apogée de sa carrière
comme chasseur d’antithèses, on peut reconnaître sa vigueur aussi sur cette
photo. C’était une période prospère qu’on pourrait appeler ‘’les Grandes
découvertes’’ pour les chasseurs d'antithèses.
Aujourd’hui,
l'occasion de trouver une véritable antithèse brillante dans le restaurant
français est aussi rare que celle de recevoir une météorite avec une raquette
de tennis. Bien entendu, il y en a de temps en temps sur les menus, mais ce
sont de petites antithèses d’Inde insipides et sèches, qui arrivent d'ailleurs toujours
surgelées. Si mon oncle voyait un tel menu, il le déchirerait en un clin d’œil.
« Une grande antithèse, sinon rien. » C’est sa devise.
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